Virginie Despentes, Blanca Li, Audrey Diwan – voilà quelques-unes, parmi les plus connues, des femmes désignées "femmes de culture 2022". Car au total, ce sont pas moins de 100 femmes qui ont été honorées à l'occasion de cet évènement, dont Agnès Jaoui était, pour cette 4e édition, l'ambassadrice. Écrivaines, chorégraphes ou directrices de musées, sous les projecteurs ou pas, ces actrices majeures du monde culturel français méritent d'être mises en avant.
"Les femmes et la culture ont beaucoup en commun. Toutes deux ont de tout petits ministères, et encore, pas dans tous les pays ! Elles sont essentielles, et pourtant ne sont pas considérées comme telles. Les mettre de côté semble toujours être la plus pratique des solutions, et pourtant ce sont elles qui donnent et sauvent des vies", lance Agnès Jaoui, en discours d'ouverture de la 4e édition de la cérémonie 100 femmes de Culture, le 17 octobre 2022 au Palais de Tokyo, à Paris. Un évènement dont TV5monde et Terriennes étaient partenaires.
Aujourd'hui, si vous voulez réussir, Mesdames, Mesdemoiselles, je vous conseille l'armée plutôt que la culture, regardez les chiffres !
Agnès Jaoui, marraine de "100 femmes de culture 2022"
"Malgré leurs points communs, le monde de la culture n'a pas toujours bien accueilli les femmes. Aujourd'hui, si vous voulez réussir, Mesdames, Mesdemoiselles, et gravir les échelons, je vous conseille l'armée plutôt que la culture, regardez les chiffres !", conclut, non sans ironie, la comédienne, marraine de l'évènement cette année.
100 femmes pour porter haut la culture
L’association "100 femmes de culture", créée par Stéphan Paris et présidée par Hélène Fulgence, organise depuis quatre ans le prix du même nom, avec comme objectif de mettre en avant les dirigeantes, entrepreneuses ou personnalités inspirantes de la culture et des industries culturelles et créatives, des femmes qui se sont distinguées par leur parcours ou leur action.
Cette manifestation rend visible chaque année 100 parcours différents. Il y a un esprit de communauté, de sororité.
Hélène Fulgence, présidente de "100 femmes de culture"
"Cette manifestation rend visible chaque année 100 parcours différents. Il y a un esprit de communauté, de sororité. Il ne s'agit pas de distinguer trois gagnantes avec un podium, mais de montrer la diversité de l'influence et du pouvoir que les femmes ont dans le domaine de la culture. C'est important, car la culture, peut-être autant que l'éducation, c'est ce qui forme le regard sur le monde et le regard à autrui, d'une certaine manière.", explique Hélène Fulgence, présidente de 100 femmes de Culture, et directrice du patrimoine de la maison Chanel.
Les 100 femmes primées ont ensuite l'opportunité de rejoindre, dans l'association, celles des années précédentes, afin de pouvoir rester en contact entre elles et d'activer une newsletter participative. Le but est de mettre en réseau ces femmes, influentes dans le milieu, mais parfois méconnues du public.
Les inégalités persistent, de manière inconsciente
"C'est étonnant, mais quand on regarde les chiffres, même si les choses progressent un peu, on se rend compte que la place des femmes dans la culture est pire qu'ailleurs. A la moindre crise, on est les premières reléguées à l'arrière-plan, comme toujours. C'est pour cela que je dis qu'il vaut mieux aller dans l'armée si on veut monter les échelons ! La culture reste encore un combat à mener et une chasse gardée des hommes, et ce de manière très inconsciente, c'est pour ça que les chiffres sont importants. Dans beaucoup de domaines, on a du mal à se rendre compte à quel point les femmes ont à lutter pour avoir le même salaire, les mêmes postes de pouvoir. C'est assez ahurissant", nous confie Agnès Jaoui.
Même constat du côté d'Hélène Fulgence :
"On cite souvent les chiffres dans la musique classique, notamment pour les femmes cheffes d'orchestre, qui sont moins de 4% dans le monde. Dès qu'il y a une dimension de direction, managériale, c'est le cas des cheffes d'orchestre, des metteuses en scènes ou des chorégraphes, les chiffres sont très bas, c'est-à-dire en moyenne inférieurs à 20%".
On se trompe quand on pense que le monde de la danse est un milieu féminin. Quand on regarde qui occupe les postes de pouvoir, ce sont des hommes, alors que les femmes sont bien plus nombreuses.
Blanca Li, danseuse chorégraphe
Dans le milieu de la danse, ce sont
"des hommes qui sont aux postes de direction", ajoute de son côté Blanca Li, l'une des 100 Femmes de Culture 2022.
"On se trompe quand on pense que le monde de la danse est un milieu féminin. Quand on regarde qui occupe les postes de pouvoir, ce sont des hommes, alors que les femmes sont bien plus nombreuses. Moi-même j'ai postulé plusieurs fois pour diriger des centres chorégraphiques, et je n'ai jamais réussi. En France, sur dix-neuf centres, quatre sont dirigés par femmes. On voit bien qu'il y a un problème !", remarque la chorégraphe franco-espagnole.
On a pu nommer, pour la première fois, une femme à la tête du Louvre, ce n'était pas arrivé depuis 1793. Une première femme à la tête des Beaux-Arts, ce n'était pas arrivé depuis 150 ans.
Rima Abdul-Malak, ministre française de la Culture
Il faut néanmoins saluer des progrès, notamment aux postes de direction d'établissements culturels de première importance, comme tient à le souligner la ministre Rima Abdul-Malak lors d'un entretien accordé à TV5monde.
"On a pu nommer, pour la première fois, une femme à la tête du Louvre, ce n'était pas arrivé depuis 1793. Une première femme à la tête des Beaux-Arts, ce n'était pas arrivé depuis 150 ans. Une femme au chateau de Fontenaibleau, ce n'était jamais arrivé.". À lire ► "100 Femmes de Culture", entretien avec Rima Abdul-MalakUne solidarité et des choix au féminin
Pour Marianne Berger-Laleix, directrice générale déléguée au Palais de Tokyo, le combat pour la visibilité et les droits des femmes doit se faire à tous les niveaux :
"Nous avons choisi, au Palais de Tokyo, l'écriture épicène, pour que la langue ne soit pas une barrière, mais un facteur d'inclusion, précise-t-elle lors de son introduction à la journée 100 femmes de culture.
Cela passe aussi, en tant qu'institution centrale de la promotion de l'art contemporain, par la programmation d'artistes femmes."Car souvent, ce sont des choix, des priorités et une solidarité au féminin qui font la différence.
"Je me rends compte que tout au long de mon parcours, toutes les étapes décisives qui, imperceptiblement, nous font passer d'une marche à une autre, sont gravies grâce à des femmes, confie à la tribune Rima Abdul-Malak, ministre française de la Culture et femme de culture 2020.
Que ce soit dans mon tout premier travail, au sein d'une ONG, où ce sont deux femmes qui m'ont accueillie pour m'offrir un stage, pour une aventure qui a duré six ans avec des voyages à travers le monde, ou à la Mairie de Paris où, là aussi, c'est une femme qui m'a encouragée, a donné mon nom, m'a poussée. Par la suite, ce fut à chaque fois grâce à des femmes que je me suis retrouvée aujourd'hui ministre de la Culture !" Réseauter, voilà donc une pratique essentielle, selon la présidente de 100 femmes de culture, qui souligne qu'avec quatre éditions,
"nous sommes déjà 400 ! L'idée de 100 femmes de culture, c'est de montrer que c'est possible", conclut Hélène Fulgence.
Agnès Jaoui Avec un César de la meilleure actrice dans un second rôle pour le film
On Connait la chanson, quatre César du meilleur scénario original ou adaptation et un César du meilleur film avec
Le Goût des autres, Agnès Jaoui est la femme la plus récompensée aux César.
Actrice, metteuse en scène, réalisatrice scénariste, Agnès Jaoui mène aussi une carrière de chanteuse, moins connue du grand public, avec son ensemble vocal Canto allègre, ou son groupe latino Le quintet official. Depuis, elle a signé plusieurs albums, le premier aux sonorités latines
Canta (Victoire de la Musique) suivi de 2 autres
Dans mon pays et
Nostalgias, et d’un disque
Rio Paris, avec Helena Noguerra et Nathalie Dessay.