100 jours de Trump : être transgenre aujourd'hui aux Etats-Unis

Comme il l'avait annoncé pendant sa campagne, le président Donald Trump a mis un coup d'arrêt aux avancées des droits des personnes trans dans la société qui, depuis son investiture, régressent. De jeunes transgenres se mobilisent contre leur "effacement".

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Iowa, Des Moines

Manifestants contre le projet de loi révoquant les règles de protection des personnes transgenres, le 27 février 2025, au Capitole de l'Iowa, à Des Moines.
 

AP Photo/Charlie Neibergall)
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En campagne, Donald Trump promet de "mettre fin au délire transgenre". Lors de son investiture, il déclare : "À partir d'aujourd'hui, la politique officielle du gouvernement des États-Unis sera de dire qu'il n'y a que deux sexes, masculin et féminin". Il a ensuite signé des décrets pour empêcher les personnes transgenres de servir dans l'armée ou de pratiquer des sports féminins.

"Propulsée dans l'action" 

Comme beaucoup d'amis de son âge, la vie de Lorelei Crean, 17 ans, se partage entre le lycée, la recherche d'une université et les sorties. Mais avec l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, cette jeune personne transgenre se sent "attaquée" tous les jours et passe à l'action pour défendre sa communauté. "Il se passe beaucoup de choses. J'ai l'impression d'aller à un événement chaque semaine", raconte Lorelei, en énumérant une liste de manifestations pour s'opposer à l'offensive du président des Etats-Unis contre la communauté transgenre : "cela me propulse dans l'action".

Lorelei Crean

Lorelei Crean menant une manifestation pour les droits des personnes transgenres, le 7 avril 2025 à New York, à l'occasion de la journée pour la visibilité trans.

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"Deux sexes et une seule vérité biologique"

Depuis trois mois, Donald Trump a mis un coup d'arrêt aux avancées des droits des personnes trans dans la société. Dès le jour de son installation dans le bureau ovaleson, il proclamait qu'il n'y avait que "deux sexes, masculin et féminin", et une seule "vérité biologique". 

Mon existence est en quelque sorte en contradiction avec la déclaration de Trump. Lorelei Crean

Première conséquence : la fin de toute mention neutre "X" sur les passeports ou certificats de naissance de certaines personnes, qui ont reçu des documents officiels leur assignant un genre différent de celui qu'elles ont choisi. "Avec d'autres, on s'est empressé de changer nos papiers", avant que la mesure ne prenne effet, dit Lorelei, dans un parc proche de son domicile, dans le quartier de Washington Heights à Manhattan. "Mon nouveau certificat de naissance est arrivé par la poste avec un passeport de genre X...  Mon existence est en quelque sorte en contradiction avec la déclaration de Trump", souligne l'adolescent.

Lorelei Crean Instagram

Publication de Lorelei Crean sur son compte Instagram.

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Contexte pesant

Donald Trump a aussi essayé d'interdire aux personnes transgenres de servir dans l'armée américaine, banni toute référence aux trans dans les conseils de voyage du département d'Etat, et puni les Etats américains qui autorisent les athlètes trans dans le sport.

C'est quelque chose qui pèse sur nous tous... C'est une attaque quotidienne. Lorelei Crean

"On reçoit tout le temps des notifications, 'urgent' : Trump a encore fait quelque chose de fou ou d'illégal, raconte Lorelei. C'est quelque chose qui pèse sur nous tous. Pas seulement sur moi en tant que jeune trans, mais sur tous mes amis, les personnes issues de la diversité, les autres personnes queer. C'est une attaque quotidienne".

Vivre et agir

Concilier le lycée, les visites d'universités et l'activisme n'est pas toujours évident. "Parfois, ce sont mes parents qui me disent : 'Non, tu dois faire tes devoirs !' Je dois aller en cours, étudier, je suis encore jeune. Mais je dois aussi porter le poids d'une vie de jeune transgenre dans l'Amérique d'aujourd'hui", dit Lorelei.

Canaliser ses sentiments, non pas en baissant les bras, mais en agissant, est une bonne chose. Nathan Newman

Pour son père, Nathan Newman, 57 ans, avoir pu ainsi "canaliser ses sentiments, non pas en baissant les bras, mais en agissant, est une bonne chose".

Et après ?

Le choix de l'université est devenu plus compliqué, alors que les droits des transgenres varient beaucoup entre Etats progressistes et conservateurs aux Etats-Unis. D'après l'organisation Human Rights Campaign, 26 Etats interdisaient déjà les thérapies hormonales de transition pour les mineurs quand Donald Trump est revenu au pouvoir.

"Il y a tellement d'universités situées dans des Etats qui ne me permettront pas d'accéder à des soins de santé, ou dans lesquels je ne pourrai pas utiliser des toilettes qui correspondent à mon identité dès que je sortirai du campus, explique Lorelei, en résumant : selon l'État où je vais, je n'aurai pas de droits". 

we will always exist

Lorelei Crean lors d'une manifestation pour les droits des personnes transgenres, le 7 avril 2025 à New York, à l'occasion de la journée pour la visibilité trans.

www.instagram.com/p/DIKTyeiOgEb/

Même dans l'État très démocrate de New York, au moins un réseau hospitalier a suspendu l'accès aux traitements de transition pour les jeunes après que Donald Trump a pris des mesures pour les interdire pour les moins de 19 ans. "Une capitulation, pour Lorelei, selon qui c'était l'un des premiers signes que l'administration Trump allait être différente de tout ce qui s'était passé auparavant". 

Lorelei Crean ne se laisse pas abattre et veut continuer l'action, qui lui donne de l'optimisme. "Les gens descendent dans la rue alors qu'ils ne le feraient pas d'habitude... Il y aura probablement une manifestation le 30 avril", pour les 100 jours depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, "à laquelle je participerai, mais pour l'instant, on se concentre sur les problèmes de la semaine".

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