25e Journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes

En 1999, l'Organisation des Nations unies décide de proclamer le 25 novembre Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, à la suite de l'assassinat des soeurs Mirabal sous la dictature en République dominicaine. Etat des lieux, vingt-cinq ans après.

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plaque mirabal

Une plaque rend hommage aux trois soeurs dominicaines à Paris.

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Cyberharcèlement, sexisme, agressions sexuelles, mariages forcés, féminicides : partout dans le monde, les femmes et les filles sont victimes de violences sexistes et sexuelles ciblées. 
 
Selon les chiffres de l’ONU, 85 000 femmes ont été tuées de manière intentionnelle en 2023. Le foyer reste « l’endroit le plus dangereux » pour elles, puisque 60 % ont été tuées par « leur conjoint ou d’autres membres de leur famille ». Une femme est tuée par un proche toutes les dix minutes dans le monde. De nombreuses victimes de féminicides ont signalé avant leur mort des violences physiques, sexuelles ou psychologiques, d’après les données disponibles dans certains pays, dont la France. "Ce qui suggère que de nombreux meurtres pourraient été évités", souligne l’étude onusienne, par exemple par « des mesures d’injonction judiciaire".
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Selon le rapport de l’ONU, les Caraïbes, l’Amérique centrale et l’Afrique sont les régions où sont enregistrés le plus de ces crimes, devant l’Asie.
 
manif Canada femmes premières nations

Monie Ordonia, de la tribu Tulalip, joue du tambour pour un chant d'honneur après que le gouverneur de l'État de Washington, Jay Inslee, a signé un projet de loi créant un système d'alerte à l'échelle de l'État en cas de disparition de personnes autochtones, en particulier les femmes, le 31 mars 2022, dans le village de Quil Ceda, près de Marysville, au nord de Seattle. La loi crée un système similaire aux alertes Amber, déployées pour les disparitions d'enfants dans de nombreux États. 

 

©AP Photo/Ted S. Warren
 
À l’échelle mondiale, on estime que 736 millions de femmes – près d’une sur trois – ont été victimes de violence physique et/ou sexuelle de la part de leur partenaire intime, de violence sexuelle d’un autre partenaire, ou des deux, au moins une fois dans leur vie. Dans l'Union européenne, une femme sur cinq a déjà subi des violences physiques ou sexuelles de la part d’un de ses compagnons.
 
199 millions de femmes et de filles au moins ont déjà subi des mutilations génitales.
 
Malgré l’omniprésence de ces violences et les dénonciations incessantes des militant.es des droits des femmes et des minorités de genre, les réponses des décideurs politiques pour tenter de les réduire demeurent insuffisantes. À peine 5 % de l'aide gouvernementale est consacrée à la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles, et moins de 0,2 % à sa prévention. Certains pays se sont désengagés de la lutte contre les violences faites aux femmes, à l’instar de la Turquie, qui s’est retirée de la Convention d’Istanbul en juillet 2021.  
féminicides

Collectifs de familles et de proches de victimes de féminicides manifestent à Paris, à l'occasion du 25 novembre 2023.

©IM
 

Violence basée sur le genre, culture du viol, consentement : de quoi parle-t-on ?

 

Les violences fondées sur le genre se réfèrent à l’ensemble des actes nuisibles dirigés contre un individu ou un groupe d’individus en raison de son identité de genre. Elles englobent notamment les formes de violences physiques, sexuelles et psychologiques. Ces violences affectent les femmes et les filles de manière disproportionnée, mais aussi les minorités de genre, soit les personnes qui n’ont pas une identité ou une expression de genre "conforme" à ce qui est socialement, moralement et juridiquement attendu. L’expression de "violence fondée sur le genre" permet de reconnaitre explicitement les causes sociétales – et non individuelles – et les impacts de cette violence qui nécessitent des réponses globales. 

La culture du viol : ce sont tous les éléments, le langage, les idées, les images, les stéréotypes qui banalisent, voire justifient les violences sexuelles dans nos sociétés. Ce sont aussi les lois qui ne fondent pas leur définition du viol sur l’absence de consentement. Les stéréotypes de genre autour du consentement sexuel sont très répandus : par exemple l’idée reçue que les femmes disent non pour se faire désirer, ou encore pour ne pas passer pour des filles "faciles". 

culture du viol manif

Des manifestantes féministes lors du rassemblement du 25 novembre 2023 à Paris. 

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Le consentement sexuel signifie que chaque personne accepte librement de participer. Garder le silence ou ne pas dire non ne revient pas à consentir. L’absence de résistance ou de vêtements ne définit pas le consentement non plus. Cela ne veut pas dire qu’il faut signer un contrat. Le consentement ne doit pas nécessairement être exprimé par des mots, mais il doit être explicite et enthousiaste. Il est primordial de promouvoir une "culture du consentement" dans les lois et les comportements. (source Amnesty.international)
 

Tout acte de violence dirigé contre le sexe féminin

La Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en 1993, définit la violence à l'égard des femmes comme "tous les actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée".
 
La disponibilité des données sur la violence fondée sur le genre s'est considérablement améliorée et des informations sont désormais disponibles pour au moins 161 pays. Le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) et ONU-Femmes s'efforcent de tirer des enseignements de ces chiffres. Sur le site web multimédia de l'UNFPA, il est possible de consulter des données classées par pays, ainsi que les chiffres d'ONU-Femmes, obtenus grâce à sa base de données mondiale pour mettre fin à la violence fondée sur le genre.
 

#TousUnis

L'initiative Spotlight est un partenariat mondial pluriannuel entre l'Union européenne et les Nations unies visant à éliminer toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles. En 2020, dans les pays partenaires, le taux de poursuite a augmenté de 22 %, 84 lois et politiques ont été adoptées ou renforcées, et plus de 650 000 femmes et filles ont pu accéder à des services à la suite de violences fondées sur le genre, malgré les contraintes liées à la pandémie.
 
La Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes 2024 marquera le lancement de la campagne de l'ONU Tous UNiS (25 novembre - 10 décembre) - une initiative de 16 Jours d'activisme qui s'achèvera le jour de la commémoration de la Journée des droits de l'homme (10 décembre), avec pour thème : "Toutes les 11 minutes, une femme est tuée. #PasDExcuse. TOUS UNiS pour mettre fin à la violence contre les femmes". Cette campagne s’inscrit dans le cadre plus large des actions marquant le 30e anniversaire de la Déclaration et du Programme d'Action de Beijing.
 

Le meurtre des sœurs Mirabal, le 25 novembre 1960 

Assassinées par le dictateur Rafael Trujillo, les trois sœurs et opposantes politiques Patria, Minerva et María Tereza Mirabal l’avaient rencontré onze ans plus tôt lors d’une fête mondaine dans leur pays, la République dominicaine. Furieux que Minerva refuse ses avances, le dictateur avait emprisonné et torturé le père des sœurs Mirabal, Enrique Mirabal, en guise de représailles. Cet événement a précipité l’engagement politique des trois sœurs. Elles participent à l’organisation du mouvement clandestin de contestation du régime et forment, avec leurs maris, le "Mouvement du 14 juin" (en référence à la tentative d’insurrection du 14 juin 1959).  

soeurs mirabal archives

Patria, Minerva et María Teresa, furent héroïnes et martyres de la lutte contre le dictateur Rafael Trujillo, qui dirigea la République dominicaine de 1930 à 1961. On les surnommait aussi les sœurs "Mariposas" (Papillons).

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Leur nom de code  : " las Mariposas" (les Papillons, en espagnol).  

Elles sont arrêtées et torturées à plusieurs reprises pour leurs activités et deviennent rapidement des symboles de résistance à la dictature. Le 25 novembre 1960, les sœurs Mariposas tombent dans une embuscade tendue par des membres des services secrets et sont assassinées. Leur mort soulève l’indignation de tout le pays et conduira à l’assassinat du dictateur quelques mois plus tard.  

Le 8 mars 2021, dans le 17e arrondissement de Paris, a eu lieu l'inauguration de la plaque en hommage aux sœurs Mirabal dans le cadre de la Journée internationale des droits des femmes et de la commémoration du 60e anniversaire de leur assassinat en 1960.

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