Quand Kiab a eu 16 ans, son frère l'a emmenée "faire la fête" dans une ville touristique du nord du Vietnam. Là, il l'a vendue à un Chinois. Cette adolescente n'est que l'une des centaines de victimes collatérales de la politique de l'enfant unique en Chine, où les familles préfèrent avoir un garçon qu'une fille. Vietnamiennes, Laotiennes, Cambodgiennes, ou originaires d'autres pays d'Asie du sud-est, ces femmes sont vendues pour compenser l'un des pires déséquilibres démographiques au monde : en Chine, des millions d'hommes ne trouvent pas d'épouses. Certains sont prêts à faire appel aux trafiquants d'êtres humains, qui sèment la peur dans les communautés pauvres du nord du Vietnam. Kiab, dont le prénom a été changé, a passé près d'un mois dans sa "belle-famille" en Chine, avant de réussir à fuir. Les policiers chinois l'ont renvoyée vers le Vietnam, où elle vit désormais avec une dizaine d'autres femmes dans un foyer créé par l'Etat à Lao Cai, non loin de la frontière chinoise, pour accueillir les rescapées de trafics. "Mon frère n'est plus un être humain à mes yeux, parce qu'il m'a vendue, sa propre soeur, à la Chine, raconte l'adolescente. J'avais beaucoup entendu parler de trafics. Mais je ne pouvais pas imaginer que cela m'arriverait à moi. Que mon propre frère me tromperait", se lamente la jeune fille, comme de nombreuses victimes d'ethnies des montagnes isolées du nord du Vietnam. Les autorités font état de près de 1000 victimes de trafiquants en 2013, dont 70% à destination de la Chine. Mais nul ne connaît le nombre de Vietnamiennes retenues en Chine contre leur gré. Le même phénomène "systématique" est observé à travers l'Asie du Sud-Est par les défenseurs des droits de l'Homme. "Un problème largement passé sous silence par les autorités chinoises", accuse Phil Robertson, de l'ONG
Human Rights Watch (HRW).