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La crise de la Covid n'a fait qu'accentuer les inégalités. Ce sont les revenus les plus modestes qui paieront (ou paient déjà) la note la plus lourde, et en première ligne les femmes. Plus que jamais, le combat pour l'égalité salariale doit se poursuivre.
A l'origine de cette nouvelle mobilisation, nos consoeurs de la Newsletter féministe Les Glorieuses. Avec le mot dièse #4novembre16h16, elles ne lâchent rien. Chiffres à l'appui. En étant payées 15,5% de moins que les hommes (Eurostat, 2020), les femmes travaillent "gratuitement" pendant 39,2 jours ouvrés.
Comment la date du #4Novembre16h16 a-t-elle été calculée ? Pour déterminer cette bascule, les militantes ont rapporté l’écart de salaire entre les femmes et les hommes en France (Eurostat 2020) au nombre de jours ouvrés en 2020, soit 253. Ainsi nous avons pu obtenir la date du 4 novembre à 16h16 et 48 secondes, moment où les femmes pourraient toutes s’arrêter de travailler en France du fait des inégalités de salaire.
À partir du 4 novembre 2020 16h16 les femmes travailleront gratuitement #4novembre16h16 #piouxpiouxmarker pic.twitter.com/t7CkK6VZo4
— Lucie Dangoise (@LDangoise) October 30, 2020
L’égalité salariale à "travail égal" masque d’autres inégalités plus profondes : celles qui sont à l’origine du "travail inégal". Si l’on fait la moyenne des salaires nets que touchent les femmes et les hommes à la fin du mois, l’écart est encore plus dramatique : il serait de 28,7%, selon la dernière enquête de l’Insee. Les raisons sont documentées : temps partiel, métiers à prédominance féminine moins bien rémunérés, explique le collectif.
Et la crise sanitaire de la Covid semble bel et bien avoir creusé ces inégalités. "Si nous n’avons pas les statistiques pour la France, nous savons qu’aux Etats-Unis, 865 000 femmes sont sorties de la population active contre 216 000 hommes (Etude National Women’s Law Center, septembre 2020). Au Canada, la situation est tout aussi catastrophique", écrit le communiqué des Glorieuses.
Le plan de relance économique de 100 milliards d’euros, présenté par le gouvernement à l’époque où il pensait en avoir fini avec le gros de l’épidémie (une pensée pour les personnels soignants, et notamment les femmes nombreuses en première ligne, qui se battent actuellement pour sauver des vies), est une opportunité de corriger des centaines d’années de discriminations économiques envers les femmes. "Or le plan actuel ne prend absolument pas en compte les femmes. En omettant les disparités économiques existantes - dont les inégalités salariales - ce plan va les intensifier", écrivent Les Glorieuses, qui ont lancé une pétition, pour appeller à un plan de relance économique féministe.
Et de citer l'exemple du secteur aéronautique : 15 milliards d’euros sont alloués au secteur aéronautique pour privilégier des projets écologiques, compétitifs. Or le secteur aéronautique compte seulement 23 % de femmes (enquête du Groupement des industries françaises, 2017).
"Nous pouvons éviter d’attendre 2234 avant d’atteindre l’égalité salariale et éviter des dizaines d’années d’inégalités grâce à un plan économique adapté. Oui, l’égalité coûte de l’argent. De même que sauver l’industrie aéronautique. Et c’est un choix que le gouvernement est en mesure de faire", écrit encore la Newsletter qui propose cinq pistes de solutions pour un plan de relance féministe .
La première consiste à "conditionner l’accès aux marchés publics, l’obtention des subventions publiques et celui des prêts garantis par l’Etat au respect de l’égalité salariale au sein de sa structure".
La seconde propose de créer un certificat d'égalité obligatoire des entreprises, plus contraignant que l'Index de l'égalité déjà existant mais insuffisant et inefficace selon Rachel Silvera, économiste, maîtresse de conférences université Paris-Nanterre et codirectrice du réseau de recherche MAGE (Marché du travail et Genre). "Actuellement, l’Index mis en place par le Gouvernement demande aux entreprises d’évaluer les inégalités entre les hommes et les femmes à partir de cinq critères, le tout noté sur 100. Si la note est inférieure à 75, l’entreprise doit mettre en place un plan d’action. Cet index présente des lacunes du fait de biais statistiques importants, de manipulations possibles et du fait que les entreprises se notent elles-mêmes : il n’est pas un outil efficace. Il est indispensable qu’un standard sur le respect de l’égalité salariale soit appliqué par un organisme extérieur formé à cet effet et non par un comité interne, qu’il repose de façon empirique sur la politique menée par l’entreprise, et qu’il y ait une obligation d’exécution si cette politique est insuffisante.", explique la chercheuse.
Une autre proposition souhaite mettre en avant les métiers où les femmes sont les plus nombreuses, et valoriser leurs salaires. Il s'agit notamment des métiers du soin, dont les femmes occupent 47,7% des emplois. Il s'agit là d'une moyenne à regarder de plus près. Car dans certains secteurs, comme les aides à domicile, aides ménagères et assistantes maternelle, ce chiffre atteint quasiment 100%. Dans la santé également, on recense 90,4 % d'aides-soignantes et 87,7 % d'infirmières ou sage-femmes.
Et qui pour réaliser un plan de relance plus juste pour les femmes ? Des femmes ! Le mouvement du #4novembre16H16 milite pour qu'un groupe de travail composé d’expertes soit chargé de déterminer l’ensemble des critères pour surveiller la juste répartition du plan de relance économique et les investissements nécessaires "pour améliorer la vie des femmes dans la 'France de demain'".