Abus sexuels dans le sport : les athlètes en colère "donnent de la voix" dans une tribune

Dans une tribune publiée dans le quotidien Le Parisien, plusieurs athlètes, dont la skieuse Marie Martinod, l'ancienne patineuse Nathalie Péchalat et le judoka Teddy Riner, expriment leur colère face aux récentes révélations sur le milieu du patinage français. 

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Parce que "Briser le silence, c'est aussi servir le sport", plusieurs sportifs français de haut niveau appellent dans une tribune à "donner de la voix" à la suite des révélations sur les abus sexuels dans le milieu du patinage français.

"Les révélations récentes d'agressions sexuelles subies par plusieurs jeunes sportifs font trembler le système et réveillent notre colère", écrivent dans Le Parisien les membres de la Commission des athlètes de haut niveau du CNOSF (le Comité olympique français), parmi lesquels figurent la star du judo Teddy Riner, la danseuse sur glace Nathalie Péchalat ou la joueuse de tennis Tatiana Golovin. "Nous exprimons notre soutien et notre solidarité avec les victimes (...) Nous ne pouvons plus nous taire ! Il est temps d'agir collectivement et de prendre conscience que briser le silence, c'est aussi servir le sport", ont poursuivi la cinquantaine de signataires.
La tribune a été publiée sur le site du Parisien quelques heures après l'annonce de l'ouverture d'une enquête par le parquet de Paris, pour viols et agressions sur mineurs par personne ayant autorité sur la victime. Le scandale a éclaté avec la publication jeudi d'un livre témoignage de celle qui fut dix fois championne de France de patinage artistique en couple, multimédaillée européenne et mondiale en couple. Dans Un si long silence, Sarah Abitbol accuse son ancien entraîneur de l'avoir violée alors qu'elle était âgée de 15 à 17 ans, des faits qui se seraient produits entre 1990 et 1992, une période en principe couverte par la prescription.

Dysfonctionnement général

Ce 31 janvier, Gilles Beyer, 62 ans, a reconnu "des relations intimes" et "inappropriées" avec Sarah Abitbol, lui présentant des "excuses" que cette dernière a refusées.
D'autres anciennes patineuses ont émis des accusations contre Gilles Beyer et d'autres entraîneurs. 

Mis en cause pour sa passivité, le président de la Fédération des sports de glace Didier Gailhaguet a été appelé lundi à la démission par la ministre des Sports Roxana Maracineanu. Il contre-attaque en accusant la prédécesseure de Maracineanu à l'époque, Marie-George Buffet, d'avoir permis à Gilles Beyer de rester dans le circuit au début des années 2000, malgré une enquête administrative soulignant des attitudes inappropriées avec de jeunes patineuses : "Elle lui a retiré son statut et elle nous l'a renvoyé", affirme-t-il.

D'autres responsables de la Fédération, eux, ont choisi de se retirer :
L'enquête administrative en question, diligentée sur la base d'un signalement de parents, avait alors conduit le ministère des Sports à mettre fin à ses fonctions de cadre d'Etat, le 31 mars 2001. Malgré sa mise à l'écart, Gilles Beyer a poursuivi sa carrière dans son club d'origine, les Français volants, présidé par son frère Alain, jusqu'à son éviction ce 31 janvier. Il a aussi effectué plusieurs mandats au bureau exécutif de la FFSG jusqu'en 2018 et organisé, dans les années 2010, plusieurs tournées de gala de l'équipe de France de patinage artistique.

Le président de la Fédération sous pression

Dans le bras de fer engagé entre Roxana Maracineanu et Didier Gailhaguet, le dirigeant ne peut en tout cas pas dire qu'il ignorait les problèmes posés par Beyer au tournant des années 2000, puisqu'il était précisément le destinataire du courrier de parents qui a donné la première alerte, comme le montre le rapport issu de l'enquête administrative.
 Didier Gailhaguet doit s'exprimer ce mercredi lors d'une conférence de presse, mais il a déjà fait savoir que la question de sa démission ne serait pas tranchée avant la fin de l'inspection diligentée par le ministère. 
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Didier Gailhaguet après sa rencontre avec la ministre des Sports à Paris, lundi 3 février 2020. 

©AP Photo/Francois Mori

Sous pression, Didier Gailhaguet trouvera-t-il une nouvelle fois la parade ? Ce n'est pas la première fois qu'il est dans le collimateur. Eclaboussé par une affaire de tricherie aux JO de Salt Lake City en 2002, il avait été interdit de toute fonction dans le patinage international pendant trois ans. Il avait également dû démissionner en 2004 de la présidence de la FFSG, après un rapport de la Cour des comptes dénonçant des dérives de gestion, mais il avait retrouvé la tête de la fédération en 2007. 

Cellule d'écoute

Les signataires de la tribune plaident pour "la création d'une cellule d'écoute des victimes, indépendante des fédérations", ainsi qu'un contrôle systématique des casiers et antécédents judiciaires "des bénévoles, des entraîneurs et des dirigeants de clubs et de fédérations". Ils ont aussi appelé à mettre en place des "actions de formation, de sensibilisation et de prévention" et des "mesures législatives" pour les personnes impliquées dans des affaires de violences sexuelles.