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Les braises couvaient depuis longtemps déjà, en Algérie. Et puis le meurtre de Chaïma, début octobre, par un homme qui la poursuivait depuis plusieurs années a mis le feu aux poudres. Depuis, les réactions fusent. Ce sont maintenant des actrices qui lancent une campagne de sensibilisation contre les violences faites aux femmes. Une initiative qui démarre sur fond de polémique.
"Nous, actrices algériennes, sommes aujourd'hui unies pour dire stop aux violences faites aux femmes et aux féminicides, ont-elles dénoncé dans un message publié sur les réseaux lors du lancement de leur action le 15 octobre. Nous appelons à la prise de conscience et à la mobilisation générale pour que cesse cette violence !", ajoutent-elles.
Pour le coup d'envoi de leur campagne, les actrices ont posé toutes ensemble pour une photo symbolique, largement diffusée sur internet. Elles sont plus d'une vingtaine de comédiennes de renom, toutes générations confondues, rassemblées pour défendre la même cause.
Parmi elles, l'icône de la TV algérienne Bahia Rachedi, ou de jeunes talents comme Nardjes Asli, Souhila Mallem, Leila Touchi ou encore Adila Bendimerad. Vêtues de noir et les mains entrelacées face à la caméra, elles portent le deuil des 41 féminicides recensés depuis le début de l'année dans le pays par Algérie Féminicides.
En 2019, 75 féminicides avaient été comptabilisés. Un nombre bien en dessous de la réalité, selon les deux initiatrices du projet de veille, Narimene Mouaci Bahi et Wiame Awres. En l'absence de réponse des autorités et face à l'urgence, les actrices profitent de leur notoriété pour attirer l'attention publique.
Il y a un débat, de la colère, un ras-le-bol, c'est déjà ça de gagné !
Salima Abada, actrice algérienne
"Cette campagne s'adresse à tout le monde, hommes et femmes. Ce n'est pas pour incriminer les hommes algériens mais pour responsabiliser tout le monde", explique l'actrice Salima Abada. Même si la campagne a suscité quelques "incompréhensions", elle reste positive. "Il y a un débat, de la colère, un ras-le-bol, c'est déjà ça de gagné !", assure-t-elle . Le groupe prévoit dans un second temps la diffusion d'une vidéo de sensibilisation.
Parallèlement, la vidéo d'une autre actrice prenant part à la campagne, Mounia Benfeghoul, devenue virale sur les réseaux sociaux, a déclenché une vive polémique. La comédienne et présentatrice TV a publié cette vidéo le 5 octobre sur Instagram en réaction au meurtre sordide de Chaïma, 19 ans, battue, violée et brûlée vive près d'Alger.
Dans cette vidéo, Mounia Benfeghoul s'en prend à ceux qui ont avancé des justifications à son meurtrier : "On ne trouve pas d'excuses à des violeurs. C'était un viol! Elle n'était pas consentante !" Tout en se prononçant contre la peine de mort, l'actrice se dit favorable à des châtiments corporels contre les personnes reconnues coupables de crimes sexuels. Utilisant des mots crus (en arabe), elle dénonce le harcèlement dans la rue et plaide pour l'éducation des enfants. Afin de briser le silence, ils "ne doivent pas être élevés dans le tabou (...) On est censé donner aux jeunes le bon exemple" en parlant de ces sujets".
Ces propos ont valu à Mounia Benfeghoul un torrent d'insultes sur les réseaux sociaux, suivi d'un flot de réactions de défense, comme celle, sur Facebook, du présentateur de la station web Radio Corona Internationale (RCI), Abdallah Benadouda :
Début octobre, la mort de Chaïma, suivie depuis de la découverte de trois autres corps de femmes, a mobilisé l'opinion publique sur internet et dans la rue. La polémique "prouve combien notre société est malade", estime la chanteuse Amel Zen, qui affiche sur les réseaux sociaux son soutien "à Mounia en ces moments de rudes vérités". Comme sur cette video datant du 8 octobre, jour prévu pour un sit-in à la mémoire de Chaïma, finalement empêché :
Voir cette publication sur InstagramUne publication partagée par Amel Zen (@amel.zen) le 21 Oct. 2020 à 7 :47 PDT
S'il n'existe pas de statistiques officielles concernant les violences faites aux femmes en Algérie, le nombre de plaintes enregistrées en 2019 s'élève à plus de 7000, selon les chiffres de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN).
Mêmes échos du Maroc et de Tunisie, où les campagnes #Masaktach (Prenez la parole) et #EnaZeda (Moi aussi), depuis quelques mois, libèrent la parole, dévoilant des milliers de témoignages anonymes sur les réseaux sociaux. Un premier pas vers la prise en charge juridique, selon les associations.
"Les mouvements #MeToo et #TimesUp ont montré la
— ONU Femmes Maroc (@ONUFemmesMaroc) July 30, 2019
détermination de briser le silence et ont inspiré
la naissance d’initiatives similaires dans
notre région: #Kayna #ZankaDialna #Masaktach" Leila Rhiwi, Représentante @ONUFemmes Plus dans #Rapport2017_2018 https://t.co/kZL0pxhDdL pic.twitter.com/72reAVmPOR
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