Mais malgré la routine, l'éloignement et l'absence de ses proches, Sabrina ne regrette pas un instant son choix : « Quand je suis retournée voir mes anciennes camarades de promotion, soit elles travaillaient dans des boutiques pour un petit salaire, soit elles restaient toute la journée chez elles, raconte-t-elle. Pour les femmes, la seule issue pour partir de la maison, c'est les études puis le travail. Et pour moi il était hors de question de ne pas sortir, je ne suis pas une vieille ! » Convaincre sa famille ne lui a pas été très difficile : sa sœur l'a précédé à Tamanrasset et son père est plutôt « ouvert ». Elle explique : « Pour les filles, tout dépend du milieu familial, mais aussi de leur volonté. La plupart essayent de trouver un bon mari pour changer de vie, sans trop se casser la tête. Les femmes célibataires qui partent de chez elles sont encore rares... »
"Le travail, c'est l'arme pour se détacher"
Le travail comme excuse pour vivre indépendante, c'est également le leitmotiv de Soraya Halfaoui. Originaire d'Ifri, un petit village des montages kabyles, la jeune femme diplômée en chimie industrielle à l'université de Bejaïa, convainc son père de la laisser partir à Tamanrasset une quinzaine de jours. Elle y rejoint une amie, ne rentre pas aussi tôt que prévue chez elle, et au bout d'un mois, passe un entretien pour travailler en tant que chimiste à la Sonelgaz (Société nationale gérant le gaz). Voilà maintenant quatre ans qu'elle réside ici et pour elle, il n'est plus question de repartir : « J'ai compris que je ne pourrais plus me réintégrer au Nord. Ici, j'ai découvert le vrai sens de la vie, les gens sont sages et ne sont pas stressés. » Sportive et aventureuse, la jeune femme profite dès qu'elle le peut des paysages désertiques somptueux des alentours de la ville. Pour autant, elle n'oublie pas les difficultés de son installation : « La première année était dure, surtout à propos des mentalités, on ne voit pas de femmes sans voiles ici ! Tout le monde a une image négative de toi... »