Anne Hidalgo entre dans le cercle restreint des femmes maires de capitale

Après une campagne acharnée, la socialiste Anne Hidalgo remporte la capitale française contre la candidate UMP Nathalie Kosciusko-Morizet. À 54 ans, celle qui était la première adjointe du maire sortant Bertrand Delanoë depuis 2001, devient la première femme maire de Paris et entre dans le petit cercle des femmes maires de capitales politiques ou économiques. 
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Anne Hidalgo entre dans le cercle restreint des femmes maires de capitale
Le maire PS sortant Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo, qui lui succède à Paris, le 30 mars 2014 ( AFP / Matthieu Alexandre).
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Celle que beaucoup décrivaient comme discrète, effacée, timide, a réussi son pari, parvenant d'abord à s'imposer parmi les siens, puis à vaincre l'ancienne ministre de l'Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet, dans un contexte pourtant peu favorable à la gauche. Elle a remporté, au second tour dimanche, 54,5% des voix. 
 
La candidate PS s'est exprimée depuis son QG de campagne avant de rejoindre l’hôtel de ville où elle avait donné rendez-vous aux militants socialistes. « Ce soir, Paris a gagné. C'est la victoire d'une gauche fidèle à son idéal. Ce soir, je ressens une joie immense », a d'abord déclaré Anne Hidalgo. « J'ai une pensée attentive pour ceux qui n'ont pas voté pour moi », a t-elle ajouté. « Je suis la première femme maire de Paris et j'ai conscience du défi que cela représente », a-t-elle enfin confié.
Anne Hidalgo entre dans le cercle restreint des femmes maires de capitale
Résultat du 2e tour des élections municipales à Paris par arrondissements ( AFP / L. Saubadu/P. Defosseux).
 
La ténacité d'une coureuse de fond

Anne Hidalgo, devenue à 54 ans la première femme maire de Paris, a fait ses armes dans l'ombre du maire PS sortant Bertrand Delanoë, dont elle est la première adjointe depuis 2001. Celle que beaucoup décrivaient comme discrète, effacée, timide, a réussi son pari, parvenant d'abord à s'imposer parmi les siens, puis à vaincre l'ancienne ministre de l'Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet, dans un contexte pourtant peu favorable à la gauche.

Rien de commun entre ces deux femmes dont les ambitions se sont croisées: si l'ancienne ministre est une solitaire volontiers transgressive, toujours sabre au clair, la dauphine de Bertrand Delanoë est un pur produit du PS, qui cultive sous des airs de bonne élève et une apparente rondeur une autorité sans faille.

Mère de trois enfants, "elle est douce, chaleureuse, séduisante et en même temps tenace et très déterminée", dit d'elle son mentor Bertrand Delanoë (L'Express, septembre 2013). Ses détracteurs véhiculent plutôt l'image d'une "apparatchik" au caractère "sectaire".

Née le 19 juin 1959 à San Fernando (Espagne), l'Andalouse a le parfait CV d'une personnalité de gauche : fille d'immigrés espagnols qui ont fui en 1961 la misère et le franquisme parce qu'ils croyaient à l'école républicaine, elle a grandi dans la cité lyonnaise de La Duchère. Naturalisée française à l'âge de 14 ans, Anne Hidalgo devient inspectrice du travail en 1982, et est nommée en région parisienne en 1984. D'abord plutôt engagée dans les luttes syndicales, elle prend sa carte du PS en 1994, et entre au cabinet de la ministre de l'Emploi Martine Aubry en 1997. Elle y rencontre son second mari Jean-Marc Germain, bras droit de la maire de Lille et député PS depuis 2012.

Devenue conseillère de la secrétaire d'Etat aux Droits des femmes Nicole Péry, elle rencontre le chef de file des socialistes parisiens Bertrand Delanoë. Elle deviendra en 2001 la tête de liste du PS dans le XVe, après l'avoir emporté dans une primaire face à la fabiusienne Pervenche Bérès. Elu maire de Paris, Bertrand Delanoë fait de cette quasi inconnue sa numéro deux, en charge du "bureau des temps" et de l'égalité hommes/femmes.

En parallèle, Anne Hidalgo est nommée secrétaire nationale du PS à la formation professionnelle (2000) puis à la culture (2003). Elle devient conseillère régionale d'Ile-de-France en 2004, mandat qu'elle détient toujours.

En 2008, Bertrand Delanoë lui confie une délégation de premier plan, celle de l'urbanisme. A ce poste, elle supervise la mise en chantier de 10% du territoire de la capitale, des Batignolles à Bercy-Charenton en passant par l'emblématique chantier des Halles. En mai 2012, Anne Hidalgo se voit proposer un ministère, mais elle refuse. Elle qui a affirmé dès 2009 se préparer à succéder à Bertrand Delanoë veut rester concentrée sur Paris.

Consciente de sa faible notoriété, elle lance sa campagne pour les élections municipales le 4 septembre 2012, sur les quais de la Seine. Cette campagne, sans doute une des plus longues de l'histoire (19 mois), se déroule pas à pas, sans anicroche ni éclat particulier, loin des soubresauts de celle de sa rivale UMP aux prises avec l'indiscipline chronique de la droite parisienne.

Après avoir imposé le renouvellement des têtes de liste aux grognards du PS, elle a fait l'union avec le PCF et le PRG, et présenté son programme patiemment élaboré en décembre 2013. Elle a signé entre les deux tours de l'élection un accord avec les écologistes d'EELV.

Féministe depuis toujours, chantre comme Bertrand Delanoë de nouvelles pratiques politiques, Mme Hidalgo a fait de la parité des têtes de liste et du non-cumul des mandats dès 2014 des points non négociables. Adepte comme le maire de Paris d'un socialisme mâtiné de pragmatisme, elle a promis au soir de sa victoire "une ville plus juste et solidaire", mettant la créativité et l'innovation "au service du mieux-vivre ensemble". Une manière de reprendre le leitmotiv de sa campagne sur la ville "bienveillante"
Anne Hidalgo entre dans le cercle restreint des femmes maires de capitale
La victoire d'Anne Hidalgo fait la Une en Espagne, sa terre natale, mais aussi en Italie, aclipsant presque la défaite socialiste à ces municipales 2014...
 
Le club des femmes maires
 
En Europe, seulement quatre capitales sont dirigées par une femme. Madrid, en Espagne, est tenue depuis 2011 par Ana Botella, 59 ans, épouse de Maria Aznar, l'ancien président du gouvernement espagnol José. Varsovie, en Pologne, est dirigée depuis 2006 par Hanna Gronkiewicz-Waltz, Sofia en Bulgarie par Jordanka Fandakova  depuis 2009, et Kiev en Ukraine par Halyna Hereha, à Kiev depuis 2012.
 
Sur le continent américain, elles sont plus nombreuses.Depuis 2011, la capitale du Pérou est entre les mains de Susana Villaran.En Uruguay, Ana Olivera est maire de Montevideo depuis 2010. Au Chili, Carolina Toha, fille d'un ancien ministre de Salvador Allende, est la maire de Santiago  depuis 2012. La capitale de Cuba, La Havane, est également dirigée depuis 2011 par une femme, Marta Hernandez Romero. Aux Etats-Unis, Annise Parker, lesbienne revendiquée, est maire démocrate de Houston (Texas, 2,2 millions d'habitants) depuis 2009.
 
En Afrique, cinq capitales économiques ou politiques sont tenues par des femmes.  Agnes Kafula dirige la capitale namibienne, Windhoek, depuis 2012. L'ex-ministre Maty Mint Hamady a été élue en février dernier maire de Nouakchott en Mauritanie. Au Maroc, l’unique femme maire, Fatima Zahra Mansouri, est à la tête  de Marakech. En Afrique du Sud, Patricia de Lille est maire du Cap depuis 2011. 
 
En Asie, Fumiko Hayashi est depuis 2009 maire de Yokohama, ville japonaise de plus de 3,6 millions d'habitants, et en Océanie, Celia Wade-Brown dirige la capitale néo-zélandaise, Wellington, depuis 2010.