Après avoir échappé à la peine de mort, Asia Bibi quitte le Pakistan pour le Canada

Asia Bibi aurait quitté le Pakistan pour le Canada. Une information non confirmée pour l'instant par les autorités canadiennes. Condamnée à mort pour blasphème en 2010, cette chrétienne du Pendjab avait été acquittée en 2018 sur décision de la Cour suprême d'Islamabad. Son crime ? Avoir bu de l'eau d'un puits supposé réservé à la communauté musulmane.
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Capture d'écran
La Pakistanaise Asia Bibi a pu quitter le Pakistan après des mois passés cachée, car elle était menacée de mort par les islamistes. Elle a rejoint le Canada, où ses filles ont déjà trouvé refuge.
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©APphoto
Asia Bibi, chrétienne du Pendjab, ici lors de sa condamnation à mort pour blasphème à Lahore, au Pakistan, en novembre 2010.
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©PascaleAchard
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Après la liberté, l'exil. 

Selon son avocat, Saif Ul Malook, Asia Bibi a quitté le Pakistan pour le Canada, où ses filles ont déjà obtenu l’asile politique. Epilogue d'une longue saga judiciaire, à l'origine de violents affrontements interreligieux et suscitant une immense vague de solidarité internationale.
 

(Elle a enfin quitté le #Pakistan, le pouce en l'air en signe de victoire face à toute la haine et aux intégristes religieux du #Pakistan, #AsiaBibi, cette chrétienne qui avait passé 8 précieuses années dans le couloir de la mort, a atterri au #Canada aujourd'hui, traduction)

Le quotidien pakistanais Dawn News titre qu’Asia Bibi avait « quitté le pays », en citant une source anonyme au ministère des Affaires étrangères pakistanais. Geo News, une des plus grandes chaînes de télévision du pays, a également fait état de son départ, citant des sources "proches d’Asia Bibi".
 

(Asia Bibi a vécu en prison pendant 9 ans, la Cour suprême l'avait acquitté l’année dernière dans un procès pour blasphème, traduction)

Les autorités pakistanaises ne se sont pas encore prononcées sur sa destination ni les conditions de son départ, si celui-ci est confirmé. Ses filles ont fui il y a plusieurs mois au Canada.

De son côté, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, invoquant des "raisons de sécurité", n'a pas confirmé.

Les dérives d’une loi sur le blasphème

Asia Bibi avait été condamnée à mort pour blasphème en 2010, après avoir été accusée par deux villageoises musulmanes avec qui elle travaillait d’avoir "insulté le prophète" lors d’une querelle autour d’un verre d’eau.

Son cas était devenu emblématique des dérives de la loi sur le blasphème au Pakistan, souvent instrumentalisée, selon ses détracteurs, pour régler des conflits personnels, via la diffusion de fausses accusations.

Cette quinquagénaire avait fini par être acquittée en octobre 2018 par la Cour suprême pakistanaise, la plus haute instance judiciaire du pays, après avoir passé plus de huit ans dans les couloirs de la mort.
 

"Justice a été rendue, c'est une victoire pour Asia Bibi. Le verdict montre que les pauvres, les minorités et la fraction la plus modeste de la société peuvent obtenir justice dans ce pays en dépit de ses défauts", s'était félicité son avocat, "Je suis très heureux. Ceci est le jour le plus important et le plus heureux de ma vie".

"Elle a été acquittée de toutes les accusations", déclarait le juge Saqib Nisar lors de l'énoncé du verdict mercredi 31 octobre 2018. "Justice vient d'être rendue" se félicitaient alors les chrétiens du Pakistan. Mais c'était sans compter sur les réactions des intégristes musulmans. Des milliers d'entre eux avaient manifesté leur colère, bloquant trois jours durant le pays, jusqu'à ce qu'un accord soit conclu avec le gouvernement.

En novembre 2018, la Cour suprême du Pakistan s'était opposée à une procédure en appel contre l'acquittement d'Asia Bibi : "Ce recours est rejeté", avait alors déclaré le juge Asif Saeed Khosa devant la plus haute instance judiciaire pakistanaise.

Pour les intégristes musulmans, "cette décision envers une blasphématrice n'est pas de bon augure pour le pays", selon Maulana Abdul Aziz, imam de la Mosquée rouge, haut lieu de l'islam radical à Islamabad, "c'est une décision extrêmement injuste, cruelle, totalement détestable contre la charia".

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Des partisans du parti radical pakistanais Tehreek-e-Labbaik protestent contre la chrétienne Asia Bibi, à Lahore, au Pakistan, le vendredi 19 octobre 2018.
 
©AP Photo / K.M. Chaudary

Un ancien gouverneur du Pendjab, Salman Taseer, qui avait pris la défense d'Asia Bibi, avait été abattu en plein coeur d'Islamabad en 2011 par son propre garde du corps. Son assassin, Mumtaz Qadri, a été exécuté par pendaison début 2016.

Le Premier ministre pakistanais Imran Khan, durant la dernière campagne électorale, avait déclaré soutenir inconditionnellement la loi.

Soutien international

Le sort d’Asia Bibi a eu un retentissement international, attirant successivement l’attention des papes Benoît XVI et François. Une de ses filles a rencontré ce dernier à deux reprises.
 

Je serai heureuse le jour où ma mère sera libérée, je vais l'embrasser et je vais pleurer en la retrouvant.

Eisham Ashig, fille d'Asia Bibi 

Sur les réseaux sociaux, outre les messages saluant l'annulation de la condamnation à mort d'Asia Bibi, puis sa libération, beaucoup s'inquiétaient de possibles représailles de la part des extrêmistes musulmans à l'encontre de la communauté chrétienne.

Réfugiée dans un "endroit sûr" depuis sa sortie de prison, elle a manifesté à plusieurs reprises, par le biais de son avocat, le désir de rejoindre sa famille au Canada. Le Premier ministre Justin Trudeau avait d’ailleurs indiqué en novembre 2018 que le Canada était en discussion avec les autorités pakistanaises. Ce mardi 8 mai 2019, la nouvelle fait la Une de plusieurs médias pakistanais. Après des mois passés recluse car menacée par les intégristes, Asia Bibi a enfin réussi à quitter le Pakistan, son pays, où elle se sentait en danger.
Elle n'aurait jamais dû être emprisonnée, et encore moins subir les menaces constantes qui pèsent sur sa vie.
Omar Waraich, d’Amnesty international
"C'est un grand soulagement que cette épreuve honteuse soit enfin arrivée à son terme et que Asia Bibi et sa famille soient en sécurité", a déclaré Omar Waraich, directeur adjoint du programme Asie du Sud d’Amnesty international.