Asiya Mohammed, première rameuse kenyane aux Jeux paralympiques

A deux ans, Asiya Mohammed était heurtée par un train. Elle perdait ses deux jambes et plusieurs doigts, avant de devenir orpheline sept ans plus tard. Elle aurait pu succomber à l'adversité ; elle est devenue para-athlète de haut niveau. Portrait de la première rameuse kenyane qualifiée pour les Jeux paralympiques qui débutent le 24 août 2021 à Tokyo.

Image
Asiya Mohammed
Image publiée sur Twitter le 28 juillet 2021.
Partager 4 minutes de lecture

Elevée par un cousin, professeure de formation, la pétillante jeune femme de 29 ans ne pensait pas au sport avant de se préoccuper, il y a cinq ans, de sa prise de poids : "En tant qu'handicapée, je pesais 70 kilos, ce qui inquiétait beaucoup ma famille. Ils m'ont encouragée à faire du sport pour perdre du poids et rester en forme", se rappelle-t-elle. 

Dans sa ville de Mombasa, sur la côte orientale du Kenya, elle avait alors le choix entre tennis, badminton ou aviron. Elle a choisi les trois et rafflé des médailles dans plusieurs compétitions et à l'issue d'épreuves de marathon en fauteuil.

Asiya Mohammed
Asiya Mohammed à l'entraînement de badmington.
©The Standard (courtesy)

L'aviron aux Jeux paralympiques

C'est l'aviron qui lui permet de se qualifier pour participer aux épreuves de skiff PR1 à Tokyo. "Je me suis rendue compte que je préférais l'aviron à cause de l'atmosphère amicale et j'ai décidé d'en faire jusqu'à ce que j'arrive à me qualifier pour les Jeux paralympiques, confie Asiya. J'ai décidé d'abandonner l'enseignement complètement et de m’investir totalement dans le sport, surtout l'aviron".

En mai 2019, la jeune femme se qualifiait pour sa première compétition internationale, la Gavirate Regatta, en Italie. "Elle a terminé avant-dernière, mais sa passion et son intérêt pour l'aviron ont impressionné les entraîneurs internationaux qui assistaient à l'épreuve. Ils ont estimé qu'il ne lui faudrait pas longtemps pour se qualifier pour les championnats du monde et les paralympiques", se remémore Joshua Kendagor, un officier de marine kényan qui officie comme entraineur d'Asiya et l'accompagne à Tokyo.

Elle s'est qualifiée lors des Jeux pré-paralympiques à Tunis en octobre 2019, en triomphant de sept autres concurrentes qui, comme elle, ne rament qu'à la force de leurs bras.

Femme et handicapée : une sportive délaissée par les fédérations

Mais le parcours n'a pas été facile pour Asiya. Elle a dû surmonter de nombreux obstacles et frustrations, à la fois comme handicapée et comme femme, venant à manquer de fonds et de soutien de la part des fédérations kényanes. Elle a dû emprunter un équipement auprès de ses partenaires de l'équipe masculine pour pouvoir concourir à Tunis, sa propre fédération n'étant pas en mesure de lui en fournir un.

Je ramerai jusqu'à ce que je gagne une médaille aux Jeux paralympiques.
Asiya Mohammed

"J'étais tellement découragée et frustrée quand la fédération kényane d'aviron et la fédération kényane paralympique m'ont dit qu'elles ne soutiendraient pas de rameuses aux qualifications pré-olympiques par manque de fonds. Alors que mes collègues masculins avaient reçu un soutien financier total du Comité olympique national kényan (NOCK)", regrette-t-elle.

Triomphante, mais réaliste

Sa famille et ses amis décident alors de financer le prix de son billet d'avion pour la Tunisie. Avec une belle récompense, puisqu'Asiya est la seule rameuse kényane qualifiée pour les Jeux paralympiques. "Après les championnats, la fédération internationale d'aviron m'a promis deux skiffs, l'un pour m'entraîner et l'autre pour les épreuves des Jeux paralympiques. Pour l'instant, je ne les ai pas reçus", constate l'athlète.

"Je ne veux pas finir dernière. Je suis très réaliste", conclut-elle. Son but ? Se classer dans le dernier groupe de six de la finale du simple PR1 et tenter de gagner une médaille. "Je ramerai jusqu'à ce que je gagne une médaille aux Jeux paralympiques", lance Asiya.