Fil d'Ariane
Au Canada, la future mère peut connaître le sexe de son enfant à venir en passant une échographie au troisième mois de la grossesse. Et elle peut aussi, si elle le demande, demander à se faire avorter par la suite, jusqu'à 24 semaines en Ontario par exemple (presque six mois). Il semble donc que les Indiennes recourent à l’avortement si elles attendent des filles, surtout dans le cas d’une troisième ou quatrième grossesse.
Cette pratique d’avortement sélectif est courante en Inde, mais aussi dans toute l'Asie du Sud Est, pour des raisons diverses (la politique de l'enfant unique en Chine par exemple). Et le débat y est aussi vif qu'au Canada. Récemment, la proposition par la ministre indienne des Femmes et du développement de l'enfant d'un test prénatal obligatoire, qui permettrait de suivre dans l'ensemble du pays les mères putatives de filles afin de les convaincre de ne pas avorter, a déclenché une vive polémique dans les médias.
Dans le sous-continent indien, on préfère les garçons aux filles, en particulier parce que le garçon va travailler, rapporter de l’argent à la famille, alors que la fille est au contraire synonyme de charge financière et de dot que ses parents devront débourser pour son mariage. Il semble donc que les Indiennes qui vivent en Ontario transplantent ces pratiques culturelles dans leur terre d’adoption car elles subiraient ici aussi beaucoup de pression sociales, voire de mauvais traitements de la part des membres de leurs familles si elles ont des filles.
Ce n'est pas juste une question d'avortement sélectif, dit-il, mais aussi d'inégalité entre les sexes.
Dr Marcelo Urquia, Toronto
Le Dr Marcelo Urquia de l'Hôpital St. Michael's de Toronto est l'un des auteurs de l'étude qui a été publiée dans le Journal de l'Association médicale canadienne et il ne pense pas que l'imposition du silence sur le sexe de l'enfant durant les 24 premières semaines de grossesse ait un effet dissuasif, parce que les femmes choisiront d'autres juridictions comme les USA pour y subir un avortement au-delà de la limite permise au pays. "Ce n'est pas juste une question d'avortement sélectif, dit-il, mais aussi d'inégalité entre les sexes.", dit-il
Interpellé sur ce délicat dossier, le Premier ministre Trudeau a réitéré que les Canadiennes ont le doit d’avoir un avortement si elles le souhaitent et qu’il faisait confiance aux professionnels de la santé si jamais ils étaient confrontés à cette problématique d’avortement sélectif.
L'accent doit être mis sur l'éducation dans les communautés concernées
Eric Hoskins, ministre de la Santé de l'Ontario
Le ministre de la Santé ontarien, Eric Hoskins, se dit, lui, perturbé par les résultats de l'étude, d'autant qu'en Ontario, le ratio chez les mères indiennes est encore plus élevé, soit 196 garçons pour 100 filles : "Il existe des directives qui empêchent les médecins d'être les complices d'une pratique qui n'a pas sa place au Canada. L'accent doit être mis sur l'éducation dans les communautés concernées" explique-t-il.
M. Hoskins condamne les avortements sélectifs, mais, lui aussi membre du Parti libéral comme Justin Trudeau, il reconnaît que le sujet est glissant, parce qu'il ne veut pas limiter l'accès de toutes femmes à l'avortement. "Le ministre de la santé de l'Ontario est profondément perturbé par le rapport sur les avortements sélectifs" a constaté le média "Métro".
Ontario health minister 'deeply disturbed' by sex-selective abortion report https://t.co/x03TlEv04d pic.twitter.com/goWsQjOGe6
— Metro Toronto (@metrotoronto) 12 avril 2016