Au Pakistan, les femmes refusent d'être exclues des élections

Le Pakistan n'est pas un monolithe : dans certaines régions du pays, les femmes ont joué et jouent encore un rôle politique, économique ou sociétale non négligeable. Benazir Bhutto fut une cheffe de gouvernement à poigne et combattue, et assassinée en décembre 2007, non parce qu'elle était femme mais pour ses idées et parce qu'elle appartenait à un clan dominant de Karachi, capitale économique de cet Etat. Mais dans certains endroits reculés gagnés aux idées des talibans, les femmes doivent se battre pour voter ou se présenter aux élections législatives du 11 mai 2013.
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Au Pakistan, les femmes refusent d'être exclues des élections
Badam Zari, à droite, unique candidate et pour la première fois dans la région tribale de Khyber Pakhtunkhwa - AFP
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La Constitution impose un quota de femmes au Parlement pakistanais, modeste 1/5ème des députés, mais réel. Depuis 2008 c'est une femme, Fahmida Mirza, qui président aux destinées de l'Assemblée nationale pakistanaise. Elles composent actuellement 22,5% de la Chambre basse, à peine moins qu'en France…

Cependant, depuis que les Talibans ont investi l'Afghanistan voisin, les provinces pachtounes acquises à leurs émules frontaliers cherchent à empêcher les femmes de s'investir en politique, par leur candidature et même par leur vote.

Les menaces des insurgés talibans et des tabous culturels coriaces risquent de priver des millions de femmes de leur droit lors des élections générales pakistanaises du 11 mai 2013, pourtant jugées cruciales pour la transition démocratique dans ce pays musulman.  Plus de 85 millions d'électeurs, 48 millions d'hommes et 37 millions de femmes, sont officiellement inscrits à ce scrutin dans un pays coutumier des coups d'Etat.
 
Au Pakistan, les femmes refusent d'être exclues des élections
Fahmida Mirza, présidente de l'actuelle Assemblée nationale pakistanaise - Wikicommons
Mais dans des régions conservatrices du Pakistan, des femmes resteront spectatrices et non actrices de ce changement. Lors des élections de 2008, aucune femme n'avait voté dans 564 des 28.000 bureaux du pays spécifiquement prévus pour elles. Et plus de la moitié de ces bureaux de vote étaient situés dans le Khyber Pakhtunkhwa, province du nord-ouest à la lisière de l'Afghanistan et de zones tribales considérées comme un repaire des talibans et d'autres groupes liés à Al-Qaïda.

"Nous avions attendu toute la journée mais pas une seule femme ne s'était présentée en raison d'une interdiction décrétée par les chefs de village", se souvient Badama Begum, une institutrice qui travaillait à l'époque dans un bureau de scrutin local. Dans ces régions, le taux de participation des femmes avait oscillé entre 10 et 15% selon des estimations de responsables locaux. "Notre société ne nous autorise pas à laisser sortir nos femmes", tranche Sharif Khan, un vendeur de Miranshah, chef-lieu de la zone tribale du Waziristan du Nord.

Dans ces régions hyper-conservatrices, des femmes vivent en purdah, une ségrégation incarnée par le port de la burqa, mais aussi par le confinement à des pièces particulières de la maison. Les femmes ne peuvent ni travailler à l'extérieur de la maison ni aller faire les courses seules.

Pour la première fois de l'histoire pakistanaise, Badam Zari, femme au foyer, est toutefois candidate aux élections dans ces régions, signe d'une modeste avancée. Au Pakistan, 60 sièges des 342 de l'Assemblée nationale sont réservés aux femmes et attribués de façon proportionnelle. Plus un parti remporte de sièges, plus il peut choisir de femmes députés. Hors cette proportionnelle, quelques dizaines de femmes seulement figurent parmi les 4671 candidats aux élections. Les femmes peuvent donc rarement voter directement pour l'une des leurs.

Tenter d'appliquer la loi

Outre les pressions des insurgés et les tabous, des millions de femmes ne peuvent voter faute de papiers d'identité, soulignela militante pour le droit des femmes, Farzana Bari. Dans les zones rurales, des femmes ne peuvent voyager sans être accompagnée par un homme de la famille. Sans "accompagnateur", elles ne peuvent donc voter. Pour tenter de mettre fin à ces différentes pressions visant à décourager, voire empêcher, les femmes de voter, la Commission électorale avait proposé qu'il soit obligatoire qu'au moins 10% des femmes aient voté dans une circonscription pour valider un résultat local. Mais cette réforme a été rejetée par les parlementaires.

La Commission électorale va donc tenter d'appliquer à la lettre une loi qui autorise jusqu'à trois ans de prison et/ou une amende de 50 dollars pour quiconque empêche une personne de voter.
 

A la rencontre de Badam Zari

Une pionnière qui se bat pour l'éducation et la santé de ses concitoyennes

10.05.2013Reportage de nos partenaires de France Télévision, par Pierre Monégier correspondant au Pakistan
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