Retard dans la machine législativeFin janvier 2014. Le ministre de la Justice, porteur du texte controversé, le remet à trois institutions publiques : le Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ), le Conseil fiscal et le Conseil des États. Leur travail ? Rédiger chacun un rapport sur ce projet de loi. Il est ensuite débattu au sein même du ministère qui publie, enfin, sa position officielle. Un avis uniquement consultatif auprès du Conseil des ministres. Si le gouvernement estime que les recommandations de ces rapports sont pertinentes, il décidera alors d'entreprendre (ou non) des modifications au projet de loi, avant de le soumettre au vote des Parlementaires. C'est le processus habituel en Espagne quand un projet de loi est susceptible d'affecter le fonctionnement de la Justice ou encore de la fiscalité.
Pour le moment, un seul rapport a été remis. Fin avril 2014. Il s'agit de l'un des deux rapports du CGPJ. Rédigé par Pilar Sepulveda, qualifiée de progressiste par la presse espagnole, le
texte (lien en espagnol) est sans appel. L'auteure demande le retrait immédiat du projet de loi. Elle le qualifie de
"régressif", "d'anachronique", "ne prenant pas en compte l'évolution de la société espagnole". Bien que la loi prétende vouloir réduire le nombre d'avortements, l'auteur explique que
"la seule réponse qu'elle donne est la criminalisation des comportements et l'élimination du choix de la femme". Pire encore. Pour Pilar Sepulveda, la réforme voulue par le gouvernement ne répond pas au problème de manière plus large, comme l'accompagnement social et économique des femmes, en situation précaire, et contraintes, à cause de cette loi, de garder leur enfant. Pour le seul rapport fini, le bilan rendu est cinglant. Son homologue de la CGPJ, Carmen Llamart, conservatrice, plus discrète sur son rapport, n'a pas encore remis son texte.
Même comportement, même silence chez les rapporteurs des autres institutions. Leurs textes se font attendre. En principe, le Conseil fiscal ne prévoit pas de discussions jusqu'à fin mai. Un cas inhabituel dans la machine législative et il n'a pas échappé à la presse espagnole. En moyenne, les rapports sont remis au Conseil des ministres sous 15 à 30 jours. Le quotidien espagnol
El Pais ironise (lien en espagnol) : ces institutions publiques vont discuter fin juin d'un rapport sur un autre projet de loi plus complexe (600 articles sur l'
organisation de l'administration judiciaire...), approuvé début avril par le gouvernement qui souhaite une adoption du texte avant l'été. Visiblement, ça sera chose faite ... en l'espace de deux mois seulement. En comparaison, le texte sur l'avortement, constitué de 10 articles, traîne maintenant depuis quatre mois. Aucunes dates sur la remise des rapports n'ont été fixées. Et donc aucune position officielle ne s'est manifestée.