Belgique : "se payer une femme délicieuse", la pub qui fâche

"Ça coûte cher une femme délicieuse, ça coûte cher une femme appétissante..." Voilà quelques-uns des slogans d'une publicité diffusée ces derniers jours sur des médias belges pour une chaîne de magasins bon marché. Plusieurs plaintes ont été déposées auprès du CSA, la haute autorité audiovisuelle belge, pour propos sexistes.
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©captured'écran/RTBF
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Lidl, la chaîne de distribution spécialisée dans les produits bon marché pourrait bien payer le prix fort pour cette campagne de publicité lancée il y a quelques jours en Belgique.

La publicité en cause a été diffusée en radio et télévision par plusieurs chaînes. Elle vante les prix des produits Lidl, si peu élevés que les hommes peuvent "se payer une femme délicieuse", étant entendu que "ça coûte cher les femmes délicieuses" car "elles veulent de belles sacoches, aller au restaurant (...), partir en week-end (...)".
 
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Plusieurs versions de ce spot ont été diffusées, et certaines reprennent la même trame avec un rôle inversé pour les hommes et les femmes. Ce sont les versions sexistes à l'égard des femmes qui ont fait réagir.

"Assez d'argent pour entretenir une femme appétissante"

"Hé vous, là, vous aimez le ketchup appétissant, qui rougit tout seul quand il vous donne du plaisir ? Et les femmes appétissantes, vous aimez ça aussi, hein ! Mais ça coûte cher les femmes appétissantes : chaque semaine, elles vont chez le coiffeur (…). Vous voulez toujours vous payer une femme appétissante ? Si oui, Lidl a pour vous du ketchup qui va vous laisser assez d’argent pour l’entretenir. "

Sur la page Facebook de Lidl Belgium, une vingtaine de citoyennes ont signifié à la chaîne de supermarchés leur indignation, s'étonnant qu'on puisse encore véhiculer des clichés aussi dégradants pour l'image de la femme. "Nos excuses mais c'était de l'humour et n'est certainement pas notre intention de choquer nos clients", a répondu l'entreprise. 

"Ce n'était évidemment pas notre intention de transmettre un message sexiste. Nous ne voulions certainement pas dégrader l'image de la femme. C'est la raison pour laquelle nous avions choisi d'utiliser à travers cette campagne des personnages particuliers (têtes élargies) et diffuser un spot caricaturant également les hommes", poursuit Lidl Belgium dans un communiqué. La chaîne s'est aussi excusée sur Twitter.
 


Le Conseil supérieur de l'audiovisuel belge (CSA) a reçu plusieurs plaintes contre cette campagne publicitaire qui véhicule des stéréotypes sexistes. Plusieurs personnes ont aussi porté plainte auprès du CSA, qui a décidé d'ouvrir une instruction. C’est la première fois que le CSA se saisit d’un tel cas.

A partir de quand franchit-on la ligne rouge ?
Mathilde Alet, secrétaire d'instruction au CSA

Interrogée par nos confrères de la RTBF, Mathilde Alet, secrétaire d'instruction au CSA, estime que "l'humour est souvent utilisé en publicité, mais c'est souvent derrière l'humour que se réfugient les personnes qui tiennent des propos sexistes. A partir de quand franchit-on la ligne rouge ?".

Le Jury d'éthique publicitaire (JEP), organe d'autorégulation du secteur de la publicité en Belgique, a lui aussi été saisi. A lui d'évaluer le respect des règles légales et éthiques, cette fois, par l'annonceur lui-même.
 
Alors coup de pub volontaire ou maladresse de l'enseigne Lidl ?  Pour certains consommateurs, et sans doute consommatrices, cet excès d'humour en solde pourrait se payer cher.
 
Depuis un décret du 2 juin 2016, le CSA belge est compétent pour vérifier que tant les programmes que les communications commerciales ne portent pas atteinte au "respect de l'égalité entre les femmes et les hommes". Auparavant, le CSA pouvait contrôler les contenus audiovisuels sur le plan de l'égalité femmes-hommes uniquement en cas d'incitation à la discrimination en raison du sexe, une porte d'entrée assez restrictive.