Prostitution juvénile ou traite humaine, le fléau ne cesse de croître au Canada comme ailleurs. Nombreux sont les sites qui proposent les services tarifés de (très) jeunes filles, envers et contre la loi qui pourtant interdit toute publicité de commerce sexuel sur le web.
La prise de conscience n'est pas récente, mais rien ne semble pouvoir endiguer ce phénomène. Elles sont jeunes et provocantes, disponibles, jour et nuit mais qui sont-elles, quel âge ont-elles ? Certaines n’auraient que 13, 14 ou 15 ans.
Bienvenue dans l’absurde réalité de ce que les enquêteurs canadiens appellent l’esclavage moderne. Les petites annonces sur internet sont devenues le véhicule de choix des proxénètes qui exploitent les adolescentes et des clients qui les réclament.
Esclavage moderne 2.0
Parmi la multitude de sites d’annonces, voici celui qui arrive en tête, backpage.com, devenu le chef de file pour le commerce du sexe en Amérique du Nord. Partout, ce sont sur ces mêmes pages que les policiers recherchent les traces d’adolescentes portées disparues ou déclarées en fugue.
A Toronto, sur les 350 dossiers de jeunes filles disparues, toutes les victimes étaient vendues sur des petites annonces de ce site.
« Nous continuons de recevoir des signalements, quand vous comptez le nombre de petites annonces quotidiennes, ça s’élève à des dizaines de milliers. », déclare René Morin du Centre canadien de protection de l’enfance.
Aux Etats-Unis, cela fait deux ans que le site subit des pressions pour fermer sa section adulte qui lui rapporte des millions de dollars par mois. A Washington, le PDG Carl Ferrer a même été convoqué par un Comité du Sénat, il ne s’est jamais présenté. Deux fugueuses américaines qui déclarent avoir été vendues à 15 ans, ont intenté une poursuite, accusant le site d’avoir mis en place un système lucratif pour l’exploitation sexuelle de mineures.
Taina Bien-Aimée, directrice Coalition contre le trafic des femmes.
« Le public a l’impression en regardant les photos de ces fillettes en maillot de bain ou en culotte, que ce sont des actes volontaires! Ce que nous savons, c’est que très souvent, sinon toujours, il y a le trafiquant, le proxénète qui est là avec le révolver sur la tempe.», explique Taina Bien-Aimé, directrice Coalition contre le trafic des femmes.
La pression est si forte que récemment les compagnies de carte de crédit ont brisé leurs liens avec le site backpage.
Qu’en-est-il de la loi ?
« La loi dit très clairement que la publicité pour prostitution est interdite. et pour service sexuel est interdite au Canada. Mais il n’y a rien qui est fait actuellement. Alors on peut se questionner! Que font les autorités judiciaires pour traiter ce dossier? », précise Maria Mourani, criminologue.
Depuis l'automne 2014, le Canada, après s'être orienté vers la dépénalisation (sauf en matière de prostitution juvénile), a changé de cap en adoptant, à l'instar des pays du Nord de l'Europe, la poursuite judiciaire des clients de la prostitution mais pas des prostituées.