Canada : le nouveau gouvernement Trudeau est paritaire, comme promis
Justin Trudeau, réélu le 21 octobre dernier, a présenté son nouveau gouvernement : il est paritaire, tel qu’il l’avait promis, et plusieurs femmes accèdent à des ministères importants dont Chrystia Freeland, ex-ministre des Affaires étrangères, nommée vice-Première ministre et ministre aux Affaires intergouvernementales.
Chrystia Freeland devient donc numéro deux de ce gouvernement. Celle qui a fait sa marque comme diplomate en renégociant le traité de libre-échange nord-américain avec une administration Trump aussi capricieuse qu’imprévisible a tout un défi devant elle, un autre : faire le lien entre le gouvernement fédéral et les provinces canadiennes, dans un pays divisé entre l’est et l’ouest – Justin Trudeau n’a fait élire aucun député dans les provinces de l’Alberta et la Saskatchewan. Chrystia Freeland est donc chargée de rétablir le dialogue entre les Canadiens et de préserver l’unité du pays. Et elle va devoir faire appel à tous ses talents de diplomate et sa légendaire main de fer dans un gant de velours pour mener à bien cette nouvelle mission.
Une vie abordable, des communautés sûres, la lutte pour le climat : les Canadiens méritent un Conseil des ministres qui travaille fort pour de vrais résultats. Aujourd’hui, nous avons annoncé la composition de notre équipe, qui fera un travail important : https://t.co/vvTa8j0USVpic.twitter.com/e6TY6sqFdT
La Québécoise Mélanie Joly bénéficie elle aussi d’une belle promotion en devenant ministre du Développement économique et des Langues officielles. Catherine McKenna, qui était ministre de l’Environnement sous le gouvernement précédent, prend en charge les infrastructures et les collectivités, un domaine dans lequel elle pourra également agir sur le plan environnemental. Catherine McKenna a subi énormément de pression et de harcèlement quand elle était ministre de l’Environnement, elle avait même reçu des menaces dans les réseaux sociaux qui n’avaient pas été prises à la légère, imposant des mesures pour assurer sa sécurité et celle de sa famille.
Les autres femmes ministres vont s’occuper des portefeuilles suivants : - de la Santé - du Travail - des relations avec les autochtones - du Développement international - de la Prospérité de la classe moyenne, de l’Emploi et du développement de la main d’œuvre - de la Petite Entreprise, promotion des exportations et Commerce international - du Revenu national - des Pêches et Océans - de l’Agriculture et agroalimentaire - des Services publics et approvisionnement, - de la Diversité, Inclusion et Jeunesse - du gouvernement numérique - et des Femmes et Égalité des Genre et Développement économique rural.
Une nouvelle équipe solide et compétente. Nous avons beaucoup de travail devant nous et nous sommes prêts à faire avancer le Canada. Pour en savoir plus sur les membres du Conseil des ministres : https://t.co/3VKSsMMMN7pic.twitter.com/X9Wor0v8eb
Sur les 157 députés libéraux élus le 21 octobre dernier, 51 sont des femmes : c’est dans ce bassin que Justin Trudeau est allée choisir ses 18 ministres femmes.
Le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, organisme qui veille sur la place des femmes en politique au Canada, se félicite de la parité de ce nouveau gouvernement et de la nomination de Chrystia Freeland au poste de vice-première ministre. L’organisme déplore par contre que le ministère Femmes et Égalité des genres dispose d’un budget limité à 114 millions de dollars sur un budget total de près de 300 milliards de dollars. L’organisme propose que le principe d’un gouvernement paritaire soit inscrit dans une loi pour qu’il soit respecté par les gouvernements suivants.
Légère augmentation du nombre de femmes élues à la Chambre des Communes Si la parité a été atteinte avec le nombre de femmes qui se sont présentées à ces élections du 21 octobre – cf chronique Terriennes-, on en est encore loin pour le nombre de femmes élues : sur les 338 sièges de la Chambre des Communes, 71,3% sont détenus par des hommes, 28,7% par des femmes. C’est une augmentation de 1,7% par rapport aux élections de 2015 et ça reste un record, mais on est bien loin de la parité.
Comment expliquer cette si faible augmentation du nombre de femmes élues ? Selon Esther Lapointe, directrice du Groupe Femmes, Politique et Démocratie, la réponse est simple : les deux partis qui ont présenté le plus de candidates ont connu une débâcle électorale à ce scrutin : le parti Néo-Démocrate n’a fait élire que 24 députés et le parti Vert du Canada, trois. « Les conservateurs et les libéraux ont fait de gros efforts pour s’approcher de la parité dans leurs candidatures – 39% de femmes candidates pour les libéraux et 31% pour les conservateurs - mais cela n’a pas suffi pour faire élire plus de femmes » ajoute Esther Lapointe, qui précise : « quand on parle de zone de parité, il faut en parler pour les élus et non pour les candidatures. Si on présente 40% de femmes, on n’aura jamais 40% de femmes élues ».
L’électorat n’est pas sexiste, la clé de la parité pour les élus se trouve dans la recrutement et la sélection. Esther Lapointe
Le groupe Femmes, Politique et Démocratie réclame des mesures législatives pour que les partis politiques canadiens soient obligés de présenter autant d’hommes que de femmes lors des élections. « L’électorat n’est pas sexiste, estime Esther Lapointe, la clé de la parité pour les élus se trouve dans la recrutement et la sélection. Il faut aller chercher les femmes dans les bons réseaux, il y en plein de compétentes qui veulent aller en politique, il faut que les partis les recrutent suffisamment tôt et qu'elles se retrouvent dans des circonscriptions qu’elles peuvent gagner ». L’organisme estime aussi que le phénomène du « député sortant » n’aide pas les femmes à se faire élire en plus grand nombre : la majorité de ces députés qui se représentent et qui sont facilement réélus sont en effet des hommes, qui restent ainsi bien en selle dans leurs circonscriptions.
« L’expérience mondiale nous démontre qu’il y a des solutions afin de pérenniser l’objectif de la parité et de faire en sorte qu’elle dure dans le temps. La voie législative demeure celle à privilégier pour atteindre la parité au Parlement du Canada », déclare Esther Lapointe dans le communiqué émis par l’organisme pour réagir à la présentation de ce nouveau gouvernement canadien.
Répartition hommes/femmes élu.e.s le 21 octobre par parti à la Chambre des Communes à Ottawa
Parti libéral du Canada : 157 élus, 67,5% hommes, 32,5% femmes Parti conservateur du Canada : 121 élus, 81,8% hommes, 18,2% femmes Nouveau Parti Démocratique : 24 élus, 62,5% hommes, 37,5% femmes Bloc Québécois : 32 élus, 62,5% hommes, 37,5% femmes Parti vert du Canada : 3 élus, 66,7% hommes, 33,3% femmes C’est au Québec que le plus de femmes ont été élues, 33,3%, puis l’Ontario, 31,4% et la Colombie-Britannique, 31%. Dans quatre autres provinces, Île-du-Prince-Édouard, Alberta, Nouveau-Brunswick et Nouvelle-Écosse, les femmes élues sont 20% et moins.