#CheikhJarrah : "Nous ne partirons pas", l'appel de la militante palestinienne Mona el-Kurd

"Nous ne partirons pas, nous n'avons pas peur", a lancé Mona el-Kurd après avoir été interpellée durant plusieurs heures par la police israélienne "pour troubles à l'ordre public", à Jérusalem-Est. A 23 ans, cette militante palestinienne est, avec son frère jumeau, au coeur de la campagne #CheikhJarrah pour défendre les familles palestiniennes menacées d'expulsion.
Image
mona
Mona el-Kurd, 23 ans, milite avec son frère sur les réseaux sociaux pour défendre les habitants palestiniens du quartier Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est. 
©capture Twitter
Partager 5 minutes de lecture

Sur les images de son interpellation, diffusées par sa famille sur internet, on voit Mona el-Kurd arrêtée et menottée chez elle, à Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est, par plusieurs membres des unités des "garde-frontières" israéliens. Ces images ont aussitôt suscité une vague de protestations dans les milieux palestiniens et sur les réseaux sociaux, où le nom de ce quartier est devenu viral.

Son frère jumeau, Mohammed el-Kurd, militant de 23 ans, star de la cause palestinienne avec plus de 550 000 abonnés sur Instagram et 180 000 autres sur Twitter, était absent au moment de l'interpellation, mais il a reçu une convocation et s'est présenté dans l'après-midi à un commissariat de Jérusalem-Est.

"Ils ne me font pas peur. Je suis chez moi, tu ne nous feras pas peur, tu ne peux pas me dire quoi faire et personne au monde n'accepterait d'être dans sa maison et d'en être expulsé. Tout ce que nous faisons, c'est rester chez nous et nous ne partirons pas", a déclaré la jeune militante à des journalistes peu après sa libération. 

"Troubles à l'ordre public"

Nasser Odeh, l'avocat de la famille el-Kurd, a confirmé que la police avait arrêté Mona el-Kurd puis l'avait libérée en fin de journée pour "troubles à l'ordre public", incluant la participation à des "émeutes". Il a indiqué que son frère était toujours sous enquête, sans plus de détails. Contactée par l'AFP, la police israélienne a confirmé que Mona el-Kurd avait fait l'objet d'une décision de justice et qu'elle était "soupçonnée d'avoir participé à des émeutes et d'autres incidents récents à Cheikh Jarrah".

Selon le père des deux militants, cette arrestation "fait partie d'une opération qui vise à terroriser les parents et faire taire les voix des jeunes qui se sont élevées dans le quartier (...) Notre arme est la parole et la caméra (...) Mohammed et Mona ont permis au monde entier de s'intéresser à notre cause", a-t-il lancé devant un commissariat de police où des accrochages avec la police ont fait six blessés - quatre par des balles de caoutchouc, deux par des grenades assourdissantes - selon le Croissant-Rouge palestinien.

[La militante palestinienne Mona el-Kurd, 23 ans, s'entretient avec des journalistes chez elle, dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est, après avoir été libérée d'un poste de police israélien, le 6 juin 2021. 

#SheikhJarrah

Mona et Mohammed el-Kurd mènent quotidiennement en anglais et en arabe une intense campagne avec le mot-clé #SheikhJarrah afin d'attirer l'attention du monde sur le sort de familles palestiniennes menacées d'expulsion ou déjà expulsées de leur maison au profit de colons israéliens.

Selon la loi israélienne, si des juifs peuvent prouver que leur famille vivait à Jérusalem-Est avant la guerre israélo-arabe de 1948, déclenchée à la création de l'Etat d'Israël, ils peuvent demander à ce que leur soit rendu leur "droit de propriété". Une telle loi n'existe toutefois pas pour les Palestiniens ayant perdu leurs biens pendant la guerre ou ayant dû fuir, rappelle l'AFP.

En mai 2021, un conflit de 11 jours avait éclaté entre le Hamas et Israël après le tir par le mouvement palestinien de salves de roquettes vers Israël, en solidarité avec les centaines de manifestants blessés lors de heurts avec la police israélienne à Jérusalem-Est, alors qu'ils protestaient contre la possible expulsion de familles palestiniennes à Cheikh Jarrah.

Des journalistes ciblés

La correspondante arabophone d'Al-Jazeera, Givara Budeiri, a également été interpellée et retenue plusieurs heures par la police israélienne alors qu'elle couvrait des manifestations dans ce quartier, a indiqué la chaine qatarie dans un communiqué. "Le ciblage systématique de nos journalistes est en violation complète des conventions internationales", a réagi le directeur de la chaîne.

Au cours des dernières semaines, plusieurs journalistes, dont un photographe de l'AFP, ont fait état de violences contre la presse à Jérusalem-Est. Le 15 mai dernier, l'immeuble qui abritait notamment les équipes de la chaîne d'information qatarie Al-Jazeera et l'agence de presse américaine Associated Press (AP) à Gaza a été littéralement pulvérisé par les frappes de l'armée israélienne, qui avait demandé préalablement l'évacuation de l'immeuble.