Clit-moi : une application pour connaître le clitoris sur le bout des doigts
Effleurer de son doigt l'écran d'un portable, un geste devenu routinier, alors pourquoi ne pas l'utiliser pour en apprendre plus sur le clitoris et sur la meilleure façon de le stimuler ? Voilà l'idée de ces jeunes étudiant.e.s québécois.e.s à l'origine d'une application sur mobile baptisée "Clitmoi". Une manière ludique et hautement tactile d'amener le plus grand nombre à démystifier ce petit bouton de l'anatomie féminine, censé amener les femmes jusqu'au Graal, l'orgasme.
« Clit-moi » est une application très simple uniquement disponible sur téléphones portables via le site internet clitmoi.onf.ca.
L’utilisateur ou utilisatrice visionne en premier lieu une vidéo dans laquelle l’anatomie du clitoris est présentée. Puis il (ou elle ) se crée un « clitoris-avatar » en le grandissant, rapetissant, lui mettant des poils ou un petit chapeau. On apprend ensuite à le stimuler pendant cinq minutes avec ses doigts sur l’écran du téléphone afin de l’amener à l’orgasme. Bien sûr, le jeu peut se répéter autant de fois que vous voulez !
Un organe inconnu et des statistiques qui parlent
Huit étudiant.e.s, sept femmes et un homme, de l’Université du Québec à Montréal, ont mis au point cette application dans le cadre d’un programme de stage au sein de l’Office national du Film du Canada. Ils ont été interpellés par des statistiques plutôt révélatrices sur le plaisir féminin issues d’une étude parue en 2014 dans The Journal of Sexual Medicine : lorsqu’un homme et une femme se rencontrent et font l’amour pour la première fois, seulement 62% des femmes atteignent l’orgasme, contre 85% des hommes, alors que d'après la même étude, 75% des lesbiennes montent au 7ème ciel lors d’une première relation avec leur partenaire. Un phénomène défini comme étant le « fossé orgasmique ».
C’est dans l’objectif de combler ce fossé que ces étudiant.e.s se sont lancé.e.s dans ce projet. L’idée : démystifier le fonctionnement du clitoris afin que chacun(e) apprenne ou améliore les caresses qu’il faut lui prodiguer pour le faire exploser de plaisir.
Catherine Sabourin fait partie de cette équipe : « Le clitoris a été découvert seulement au 16ème siècle et il fallut attendre 2015 pour le modéliser pour la première fois ! On a réalisé qu’il y a vraiment une méconnaissance incroyable du clitoris. Quand on demande aux gens de dessiner un clitoris, il n'en sont pas capables parce qu'ils ne savent pas à quoi ça ressemble ! On veut faire tomber les tabous qui entourent la satisfaction sexuelle chez les femmes : il n’y a pas de recettes miracles, chaque clitoris est différent, et la satisfaction, ça s’apprend, c’est un apprentissage, le plaisir, ce n’est pas juste l’orgasme que l’on a tendance à trop glorifier, il y a tout le chemin pour s’y rendre qui est aussi plaisant qu’important. Ce sont les messages que l’on veut faire passer via notre application ».
En tant qu’étudiante en design graphique, Catherine a été étonnée de voir qu’il y avait si peu de représentations du clitoris et elle a trouvé passionnant de faire ces recherches pour l’illustrer.
Vincent Paradis, étudiant en médias interactifs, était le seul homme de l’équipe. « Ce fut une belle expérience. On vient d’horizons différents et ça a été une belle rencontre entre plusieurs disciplines. J’ai aussi appris des choses, je ne savais pas que la première modélisation d’un clitoris s’était faite seulement en 2015 et je ne connaissais pas ce phénomène de fossé organisme. En tant que seul garçon, j’ai amené un point de vue masculin, et l’application s’adresse plus aux hommes qu’aux filles ».
Sur le plateau de TV5monde, le fossé orgasmique vu et interprété dans l'humeur de notre consoeur Linda Giguère.
Ouvrir un dialogue entre les sexes
Depuis la mise en ligne début mars, plus de 150 000 personnes sont allées visiter « Clit-moi », un beau succès populaire qui ravit ses concepteurs. « Quand l’application a été mise en ligne, beaucoup de gens me demandaient : est-ce que c’est une blague ? Mais non, ce n’est pas une blague, c’est très sérieux ! » se souvient Catherine Sabourin.
Peu importe si cela a choqué certaines personnes, nous, on voulait que les gens en parlent et c’est ça, l’important, ça ouvre un dialogue. Vincent Paradis, un des concepteurs de l'appli Clitmoi
« L’objectif de l’application, ajoute Vincent Paradis, c’était de montrer un problème et de trouver des solutions, alors dans cette perspective, c’est un beau succès. On voulait démystifier le mythe du clitoris et remédier à ce fossé orgasmique. Finalement, peu importe comment les gens interprètent ce qu’on a fait, peu importe si cela a choqué certaines personnes, nous, on voulait que les gens en parlent et c’est ça, l’important, ça ouvre un dialogue ».