En amont de la Journée internationale contre les violences faites aux femmes du 25 novembre, le collectif féministe Noustoutes mobilise à nouveau ses troupes. Alors que la barre des 100 féminicides depuis le début de l'année vient d'être franchie en France, une manifestation organisée samedi 20 novembre à Paris donne le coup d'envoi à une semaine d'actions dans tout le pays pour lutter contre toute forme de violences sexistes et sexuelles.
Lise May est morte le 6 novembre dernier à Saint-Joseph, à La Réunion, tuée à coups de couteau par son ex-conjoint. Victime de violences conjugales pendant trente-cinq ans, elle avait décidé de le quitter il y a deux mois. Depuis, elle vivait dans la peur et était harcelée au quotidien, selon ses proches. Cette mère de famille de 55 ans avait déposé plusieurs plaintes à la gendarmerie. Sa famille dénonce
"l'inaction des autorités". Une enquête pour homicide par conjoint a été ouverte. Lise May était en danger. Les forces de l’ordre ne l'ont pas prise au sérieux. Personne ne l'a protégée. Un 99ème féminicide. Un scénario qui se répète, la tragédie d'un féminicide "ordinaire".
A peine dix jours plus tard, la liste s'allonge avec un 101ème féminicide commis en France. Une étude réalisée sur 88 féminicides ou tentatives de féminicides publiée en novembre 2019 par les services du ministère de la Justice révèle que dans 65% des cas, la police ou la justice avait été saisie. Et quand la justice a été saisie, dans 80% des cas, les plaintes ont été classées sans suite.
Selon le ministère de l'Intérieur, 146 femmes ont été victimes de féminicides, c'est-à-dire tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, en 2019, et 102 en 2020.
"Ce nouveau féminicide montre une nouvelle fois la façon dont les femmes victimes sont prises en charge par les forces de l'ordre ou la justice", écrit le collectif NousToutes dans son communiqué. Une petite centaine de personnes se sont rassemblées mardi 16 novembre à Paris à l'appel du collectif. En silence et dans une ambiance recueillie, les participants, majoritairement des femmes, se sont réunis aux abords du Panthéon. Muni-e-s pour la plupart d'une bougie, ils et elles ont formé un cercle
"pour rendre hommage à toutes celles qui ont été assassinées et pour dénoncer le manque d'engagement du gouvernement pour lutter efficacement contre les violences masculines". Violences : les moyens de la lutte
Le Haut Conseil à l’égalité recommande de mobiliser 1 milliard d’euros pour mettre en place les mesures nécessaires, rappelle le collectif féministe. Il réclame notamment la création, à l'école, d’un brevet de la non-violence sur le modèle du brevet de la sécurité routière. Enseignant·e·s, magistrat·e·s, policier·e·s, gendarmes, professionnel·le·s de santé doivent recevoir une formation spécifique sur le sujet, demandent aussi les militantes. Celles-ci regrettent également le manque de places d'accueil pour les femmes victimes de violences et de moyens des plate-forme d'écoute et d'aide aux victimes.
Dernier point de l'appel à manifester de l'organisation féministe : les personnes trans ou les personnes LGBTQIA+, particulièrement visées par les violences sexuelles ; "les politiques publiques aujourd’hui les ignorent", épingle NousToutes.
Sexisme, racisme, islamophobie, antisémitisme : même combat
Le collectif centre aussi sa campagne contre les violences d'ordre raciste et discriminatoire. Une vidéo rassemblant des paroles trop souvent entendues a été réalisée pour être partagée sur les réseaux sociaux :
Se battre pour l'égalité dans les lycées
Noustoutes a mené une enquête dans un millier de lycées de France concernant la loi imposant la création d'un-e référent-e égalité, obligatoire depuis 2018. Constat : moins d’un lycée sur trois respecte aujourd’hui la loi. Son rôle est pourtant déterminant, notamment pour prévenir les violences sexistes et sexuelles, orienter les élèves et les sensibiliser à l’égalité.
Près de 60 manifestations sont prévues partout en France samedi 20 novembre 2021.
En 2019, une immense vague violette avait déferlé dans le coeur de la capitale, 100 000 personnes avaient défilé au cri de "Ras le viol".