Plusieurs fois récompensée pour son action en faveur de l'environnement et des droits des femmes, Marie Christina Kolo n'en est pas à ses premiers faits d'armes. Impossible donc pour elle de manquer le rendez-vous de la COP 27 qui se tient en Egypte cette année.
L'an dernier, elle était venue porter la voix de ses soeurs malgaches lors du Gender Day, à Glasgow en Ecosse.
Terriennes : Selon vous, la question de l'accès à l'eau reste une question genrée, pourquoi ?
Marie Christina Kolo : Aujourd'hui, dans les sociétés, dans les pays en développement et notamment à Madagascar, c'est à la femme d'aller chercher de l'eau. C'est elle qui doit faire des kilomètres, même en période de famine.

Il y a aussi un autre effet : lorsque les femmes vont chercher de l'eau de plus en plus loin, elles reviennent épuisées chez elles. Elles n'ont même pas le temps de se reposer, elles sont en charge de s'occuper du ménage, de leur foyer, de la nourriture, des enfants. Et pourtant, on va dire que leur repos n'est pas un repos qui est mérité ! Tout ça, parce qu'on considère que c'est normal, c'est leur tâche, c'est leur boulot. Et bien souvent, alors qu'elle vient de faire des kilomètres pour aller chercher de l'eau, la femme va être l'une des dernières à l'utiliser. Il va falloir d'abord donner de l'eau à l'homme, au mari, parfois même aux animaux, avant qu'elle-même puisse disposer de cette eau.
#COP26 à Glasgow : l'écoféministe malgache Marie Christina Kolo explique comment l'accès à l'eau reste une question de genre.https://t.co/KbtnPkEoEe pic.twitter.com/MeOj9FnYXV
— TERRIENNES (@TERRIENNESTV5) November 10, 2021
MC K. :Pendant les menstruations, les femmes ont un minimum de besoins en terme d'hygiène. Et aujourd'hui, notamment en raison de la sécheresse qui sévit actuellement, elles sont obligées de faire avec les moyens du bord, c'est-à-dire avec de l'eau sale ou de l'eau de mer. Pourquoi ? Parce que, encore une fois dans une société, et pas seulement à Madagascar, où les règles restent considérées comme un tabou, les femmes ne peuvent pas s'exprimer et utiliser le peu d'eau qu'il leur reste. En discutant avec des communautés, encore récemment, une femme est venue me dire qu'en fait, c'était normal que ce soit à la femme d'aller chercher de l'eau parce que culturellement, un homme qui porte de l'eau est un homme "faible".
Marie Christina Kolo, activiste écologiste et féministe
Selon l'UNICEF, Madagascar est le troisième pays au monde où l'accès à l'eau potable est le plus difficile. On peut donc voir les aspects différenciés de l'impact du changement climatique, comme l'accès à l'eau, qui entâchent les droits de ces femmes aujourd'hui.
Terriennes : Si vous aviez un appel à lancer, quel serait-il ?
MC. K : mon association a été contactée deux semaines avant la COP 26 par son président, Alok Sharma, pour nous inviter à participer à une discussion avec des femmes malgaches à l'occasion du Gender Day. Je dois avouer que j'ai été émue de pouvoir partager la voix de ces femmes lors d'un échange avec lui. Elles ont pu raconter leur quotidien, leurs difficultés, comment parfois, pour cuisiner, elles doivent utiliser de l'eau de mer. Elles sont aujourd'hui désespérées. On parle ici d'une véritable urgence, d'une crise climatique et humanitaire dans mon pays. Aujourd'hui, cela a été rappelé devant des dirigeants du monde entier. C'est un pas qui permet de mettre en avant la voix des communautés locales pour trouver des solutions d'adaptation.
C'est ce qu'il faut changer aujourd'hui quand on s'adresse aux pays en développement, en première ligne, et aux femmes qui sont les premières victimes, car elles sont aussi actrices de changement et porteuses de solution. C'est ce que nous sommes venues montrer à cette COP. Une COP d'ailleurs, faut-il le souligner, majoritairement dominée par des délégués hommes... Oh oui, c'est très masculin par ici (rires), ça manque de diversité. On doit apporter cette diversité, on ne peut pas faire autrement si on veut vraiment lutter contre les impacts du changement climatique.
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— TERRIENNES (@TERRIENNESTV5) November 10, 2021
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