Fil d'Ariane
Dans un article daté du 13 avril 2020, le magazine économique américain Forbes pose une question qui interpelle : "Qu'ont en commun les pays qui gère le mieux la crise du coronavirus ?" Réponse : "Ils sont dirigés par des femmes". Un titre sexiste et provocateur ? Voyons les faits. La Finlande, dirigée Sanna Marin à la tête d'une coalition de femmes ; l'Islande, sous la houlette de Katrín Jakobsdóttir ; la Nouvelle-Zélande, menée par Jacinda Ardern ; le Danemark dirigé par Mette Frederiksen, la Norvège avec Erna Solberg comme cheffe du gouvernement ; Taïwan présidé par Tsai Ing-wen ou l'Allemagne avec sa chancelière Angela Merkel. Comment ces pays ont-ils fait pour présenter un taux de mortalité particulièrement bas face à la pandémie de Covid-19 ?
Consultez les bilans par pays en temps réel sur le site de l'agence européenne ECDC
► Centre européen de prévention et de contrôle des maladies
COVID-19 : les leçons du dépistage à grande échelle de l'Islande
— Margaud Castadère (@MargaudC_RC) April 9, 2020
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A ce jour, un Islandais sur dix a été testé. Un record du monde du dépistage par habitant qui a permis de repérer les personnes infectées et contagieuses, même si elles n'avaient pas de symptômes (ce qui est le cas de 43 % des personnes testées positives). Les patients détectés devaient alors s'isoler chez eux jusqu'à dix jours après la fin de la fièvre ou jusqu'à un test négatif, et tous ceux avec qui ils avaient été en contact devaient se placer en quarantaine pendant deux semaines.
Ainsi l'Islande n’a-t-elle pas eu besoin de fermer les crèches ni les écoles primaires, même si les lycées, universités, piscines, salles de sport, cinémas, bars et restaurants, eux, devront garder porte close jusqu'au 4 mai
Dès le mois de janvier, soit bien avant que l'alerte ne soit lancée à l'échelle mondiale et que l'OMS reconnaisse la transmission humaine du virus, et 21 jours avant la détection du premier cas de personnes contaminées à Taiwan, la présidente Tsai Ing-wen avait imposé 124 mesures fortes pour bloquer l'épidémie. Des prises de température sont mises en place à l'atterrissage de tous les vols en provenance de Wuhan dès le 31 décembre 2019, par exemple. Bilan à ce jour, 6 décès et moins de 400 personnes contaminées pour près de 24 millions de Taiwanais, et ce sans confinement de la population.
Le 16 avril est la deuxième journée de la semaine sans nouveau cas détecté à Taiwan, comme s'enorgueillit la façade du grand hôtel de Taipei :
An impressive result in Taiwan - Zero case today again which is second time in the week #COVID19 #Taiwan #zerocase pic.twitter.com/zAVWEgsYip
— Henry Chin (@HenryChinPhD) April 16, 2020
Aujourd'hui, Taïwan envoie 10 millions de masques aux Européens et aux Américains et déplore que l’Organisation mondiale de la santé n'ait pas tenu compte des avertissements qu'elle lui avait adressés le 31 décembre 2019 sur le risque représentés par le nouveau coronavirus. Exclu de l'OMS, car considéré comme une province chinoise, Taïwan a su su tirer parti de la situation en s'inscrivant en faux vis-à-vis de la Chine pour reconnaître immédiatement la gravité de la crise et prendre des mesures fortes sur la base de sa propre évaluation.
La Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern a annoncé que les membres de son gouvernement et elle-même avaient décidé de baisser leur salaire de 20% sur 6 mois, par solidarité avec leurs compatriotes touchés par les répercussions économiques de l'épidémie de Covid-19 #AFP pic.twitter.com/uYpSC9awIM
— Gazette Haiti (@GazetteHaiti) April 15, 2020
Dans une vidéo diffusée début avril, elle prévenait en personne les plus jeunes de ses concitoyens que le lapin de Pâques pourrait ne pas passer cette année.
En décembre dernier, Sanna Marin devenait la plus jeune cheffe d'Etat du monde, à la tête d'une coalition exclusivement composée de femmes. Consciente que les médias traditionnels et les communiqués gouvernementaux ne sont pas les plus porteurs, surtout parmi les plus jeunes, elle a fait établir une liste d’influenceurs à suivre - bloggeurs, rappeurs, chroniqueurs, instagrameurs.... Sana Marin fait appel à ces "key workers" (acteurs essentiels) pour l’aider à partager l’information destinée à juguler la pandémie.
Les messages du gouvernement sont distribués au réseau de quelque 1500 influenceurs, qui restent libres de les relayer, ou non, à leur manière. La plupart ont eu à coeur de participer à cet effort national à leur échelle et se sont prêtés au jeu sans songer à demander de contrepartie, à l'instar d'Inari Fernández, une influenceuse professionnelle avec 34 000 followers sur Instagram.
Mi-avril, le bilan se limitait à 72 décès du Covid-19 en Finlande, et ce sans confinement, même si le gouvernement a interdit les rassemblements de plus de dix personnes.
Denmark: Prime Minister Mette Frederiksen speaks with a pupil as she participates in the reopening of Lykkebo School in Copenhagen, after the lockdown. Denmark began reopening schools, becoming the first country in Europe to do so.
— COVID-19 In Photos (@virusphotos) April 15, 2020
15/04/2020, ource: Philip Davali/AFP pic.twitter.com/pnRREIvd9S
Au Danemark, les enfants retournent à l'école demain.
— Karl Bélanger (@KarlBelanger) April 14, 2020
Situation actuelle au Danemark:
6 511 cas
3697 actifs
100 en état critique
193 nouveaux cas dans les dernières 24h
299 morts
14 morts dans les dernières 24h#covid19 pic.twitter.com/rCIFvsLYzx
Women's leadership in the #COVID-19 response ♀️ : #Norway’s PM, @erna_solberg, addressed the concerns of children around the COVID-19 pandemic by holding a 30-minute press conference for them.https://t.co/CRvT7jZzpt #womeninpolitics pic.twitter.com/jz6EQ6H3fN
— iKNOW Politics (@iKNOW_Politics) April 9, 2020
Est-ce qu'être une femme prédispose à la bonne gestion de crise ? Le syllogisme serait sexiste et, comme le souligne le quotidien britannique The Guardian, "une corrélation n'est pas un lien de cause à effet. Etre une femme ne donne pas automatiquement l'avantage dans la gestion d'une pandémie mondiale. Cela ne fait pas non plus de vous un meilleur chef d'Etat." D'autres facteurs entrent en compte, souligne le Guardian, comme les politiques de santé mises en place par les gouvernements précédents ou la situation géographique d'un pays - moins il a de frontières terrestres, plus il est épargné. Par ailleurs, des pays comme la Hongrie, l'Autriche qui, déjà, déconfine, ou le Canada se distinguent aussi par une gestion efficace de la crise sanitaine - le gouvernement de Justin Trudeau a limité le nombre de morts à 780 pour 37,6 millions d'habitants, contre près de 19 000 morts pour quelque 67 millions de Français.
Il n'en reste pas moins que la gestion de crise exemplaire de certaines dirigeantes politiques devrait s'inscrire dans les annales. Et puis les femmes, dans un milieu politique majoritairement dominé par les hommes, ne doivent-elles pas être meilleures pour y arriver... ?
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