Six personnalités ont accepté de prendre part à cette opération de sensibilisation digitale pour parler des règles face caméra : la créatrice du compte Instagram “Je m’en bats le clito” Camille Aumont-Carnel, la blogueuse Emanouela, la handballeuse professionnelle et créatrice de The V Box Estelle Nze Minko, la chanteuse Pomme, l’activiste, autrice et fondatrice de la newsletter Les Glorieuses Rebecca Amsellem et l’illustrateur Thomas Gravereau.
"Je me suis rendu compte de la précarité menstruelle assez jeune, je suis partie de chez moi assez tôt donc j'ai dû aller acheter mes propres produits et tout naturellement en regardant les prix, je me suis vite rendu compte que dans les gammes de prix, on était pas toutes égales par rapport aux règles.", raconte la championne de handball. "J'ai toujours acheté des tampons au même titre que j'ai acheté du café même si j'en bois pas parce que j'aime pas ça et ça m'a toujours amusé de voir la réaction de mes ami.e.s qui me posaient la question 'Mais Thomas pourquoi t'as des tampons dans tes toilettes?' en mode c'est pas quelque chose de normal et pas habituel. Et j'ai toujours posé la question 'pourquoi est-ce que j'en aurais pas? Je reçois des amies qui ont leurs règles chez moi, pourquoi est-ce-que je ne pourrais pas avoir des tampons pour les dépanner? " explique Thomas Gravereau, le seul homme à témoigner dans cette vidéo.
Un "crédit menstruel" fictif et une "absente"
Depuis sa création il y a 5 ans, Règles Élémentaires a collecté et redistribué près de 5 millions de produits qui ont bénéficié à plus de 115 000 femmes, elle a développé six antennes en France qui lui permettent « de mener un certain nombre d’actions de sensibilisation au plus près des territoires ». L’association a créé une "plateforme de mobilisation citoyenne" mettant en relation les personnes souhaitant organiser des collectes (jeunes, retraités, chef·fe·s d’entreprises, collectivités, magasins…) avec sa centaine de partenaires assurant la redistribution des produits, comme la Croix-Rouge française ou Emmaüs.Malgré tout, il s'agit encore et toujours de lutter contre le tabou des règles, et d'informer concrètement sur les difficultés financières auxquelles doivent faire front toutes ces femmes. Alors pourquoi ne pas imaginer que les banques elles-aussi seraient de la partie ? C'est l'objectif de la campagne "Le Crédit Menstruel", lancée en 2020. "Ce produit bancaire fictif d’aide au financement des protections périodiques qui accompagne les femmes tout au long de leurs vies a été imaginé afin de sensibiliser le plus grand nombre de façon ludique et décalée à la précarité menstruelle et à son impact budgétaire, qui n’est pas anodin et relève d’une forme d’injustice", explique le site de l'association. Un message relayé depuis plusieurs mois dans les médias et dans les grandes gares de France.

La précarité menstruelle : un sujet qui concerne tout le monde, car 20% des femmes adultes y ont été confrontées, soit 1 Française sur 5,
- un sujet qui s'est imposé dans le débat public, car 76% des Français·es le considèrent comme un sujet de santé publique alors que le terme était inconnu en 2015,
- un sujet qui reste tabou dans la société - avec un manque d'enseignement persistant -, mais aussi particulièrement en entreprise car 44% des femmes ont elles-mêmes manqué le travail ou connaissent quelqu’un qui a déjà manqué le travail à cause de ses règles.
86% des Français·es sont favorables à l'accès gratuit à des protections de qualité pour toutes les personnes dans le besoin et dans toutes les structures publiques (auquel 76% des Françaises sont favorables).
73% des répondant·es souhaitent que le secteur privé crée des environnements de travail sans tabou et accueillants pour toutes les personnes qui ont leurs règles avec la mise à disposition de protections d’hygiène intime gratuites dans les entreprises
Prise de conscience politique et des avancées
Environ 1 500 distributeurs de protections périodiques gratuites devraient être installés sur les lieux de vie et d’étude des étudiant.e.s en France dès la rentrée prochaine, selon les annonces du gouvernement. "Nous travaillons notamment depuis plusieurs mois et années avec le ministère de la Justice, ce qui nous a permis d’obtenir la gratuité de cinq références de produits d’hygiène intime dans toutes les prisons et établissements pénitentiaires qui accueillent des femmes depuis la rentrée 2020. Ensuite, on a obtenu en février 2020 une expérimentation de gratuité de protections d’hygiène intime pour les plus démunies, qui a été reconduite pour 2021 avec un budget de 5 millions.", se réjouit Tara Heuzé-Sarmini, fondatrice et directrice générale de Règles Élémentaires, sur le site de carenews.com.Indre : des distributeurs de serviettes périodiques gratuites dans les lieux publics de Châteauroux https://t.co/jF95Hs2tnF pic.twitter.com/SntTef6yk9
— L’importante (@limportante_fr) May 1, 2021
"Aujourd’hui, ce que l’on demande, c’est vraiment la généralisation de la gratuité dans tous les lieux clés accueillant du public en situation de fragilité : les foyers d’hébergement, les hôpitaux, les établissements scolaires… Nous appelons également à une plus grande sensibilisation dès le plus jeune âge sur le sujet des règles et les risques d’une mauvaise hygiène menstruelle et de la précarité menstruelle. Enfin, nous souhaitons une massification de l’installation de distributeurs de protections périodiques dans les lieux privés (comme les bureaux, restaurants, aéroports...) et publics (dans la rue, le métro…), pour que les règles soient visibles et deviennent un non-sujet", ajoute encore la fondatrice de l'association.
(Re)lire notre article >Précarité menstruelle en France : des protections gratuites pour les étudiantes
Covid et précarité : les étudiant.e.s les plus impacté.e.s
Dès le début de la crise sanitaire en mars 2020, la communauté étudiante a été l’une des plus impactées par la pauvreté. Pour rappel 20% des étudiant.e.s vivent sous le seuil de pauvreté. Pour la moitié de cette population estudiantine, une autre charge existe: celle de la précarité menstruelle.Au vu du manque de données sur ce phénomène, par la FAGE (la Fédération des Associations Générales Etudiantes (FAGE)), l’Association nationale des étudiants sages-femmes (ANESF) et l’Association fédérative des étudiant·e·s picto-charentais·e·s (Afep) ont mené une enquête auprès de plus de 6 000 étudiant·e·s afin de visibiliser un sujet aux enjeux économiques, sociaux et politiques bien trop souvent passé sous silence. Les résultats publiés en février sont sans appel.
Le coût des règles peut aller jusqu’à 20 euros pour la moitié des sondé·e·s à cause des dépenses liées — protections, mais aussi anti-douleurs ou encore linge de rechange. Au terme de cette enquête, des chiffres et témoignages révélateurs d’une réelle détresse sont ressortis: 1 étudiant.e.s sur 10 déclare fabriquer ses propres protections faute de moyens financiers (bouts de tissus, coton, …), 13% des répondant.e.s déclarent avoir dû faire un choix entre des protections menstruelles et des produits de première nécessité (nourriture, gel douche), et 7 % se disent en précarité menstruelle.
Les conséquences de la précarité menstruelle sont nombreuses, comme le montre encore ce sondage. Tout d’abord il y a un fort impact sur la scolarité des personnes menstruées puisque. Comme le révèle l'enquête, 6 personnes sur 10 déclarent avoir déjà manqué les cours, leurs stages, de peur d’avoir des fuites ou de manquer de protections. Les conséquences sont aussi sanitaires : des étudiant.e.s portent leurs tampons, leurs serviettes plus longtemps que recommandé faute d’en avoir en assez grande quantité, s’exposant à des risques sanitaires comme le syndrome du choc toxique, des cystites, des infections, etc.
Fin janvier 2020, l'Ecosse est devenu le premier pays au monde à voter la gratuité des protections périodiques. Début mai 2021, l'antenne irlandaise d'une grande enseigne de grande distribution décidait de distribuer gratuitement à l'aide de coupons, une boite de serviettes gratuites à ses clientes.
#PrécaritéMenstruelle Lidl Irlande va proposer des protections périodiques gratuites à ses clientes
— Marlène Thomas (@MarleneTD8) April 23, 2021
Dès le 3 mai, un coupon permettra d'obtenir chaque mois une boîte de serviettes ou tampons. Une première pour la grande distribution. Et en France ? https://t.co/cKZDpp4bEm
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