Fil d'Ariane
"Les femmes et les filles sont parmi ceux qui profitent le moins du système économique actuel", estime Amitabh Behar, responsable d'Oxfam en Inde, au jour de la publication du rapport annuel de l'ONG sur l'état des richesses dans le monde.
Les 1% les + riches possèdent PLUS DU DOUBLE de la richesse de 90% de la pop° mondiale, soit 6,9 milliards de personnes ! Ces inégalités sont le résultat d'une économie injuste et sexiste. #Davos2020
— Oxfam France (@oxfamfrance) January 20, 2020
Ensemble, mobilisons-nous ! Parce que #NousComptons https://t.co/BKgre21M9A pic.twitter.com/TuvSUK4lUa
"Le fossé entre riches et pauvres ne peut être résolu sans des politiques délibérées de lutte contre les inégalités. Les gouvernements doivent s'assurer que les entreprises et les riches paient leur juste part d'impôts", ajoute la responsable d'Oxfam en Inde, qui représentera l'ONG cette année au Forum de Davos.
Comme elle le fait traditionnellement, c'est à la veille de l'ouverture du sommet économique de Davos (World Economic Forum) que l'ONG publie son rapport annuel sur les inégalités mondiales. Ce 50ème rendez-vous de l'élite économique et politique du globe intervient après une année 2019 marquée par de grands mouvements de contestation sociale du Chili au Moyen-Orient, en passant par la France.
Selon Bloomberg, au moins 119 milliardaires - dont la fortune globale est estimée à environ 500 milliards de dollars (451 milliards d'euros) - y sont attendus.
"Tout au sommet de la pyramide, des milliards de dollars se retrouvent entre les mains d'un très petit groupe de personnes, principalement des hommes", déplore Oxfam dans son rapport baptisé cette année, "Celles qui comptent".
Selon les calculs d'Oxfam, 42% des femmes dans le monde ne peuvent avoir un travail rémunéré "en raison d'une charge trop importante du travail de soin qu'on leur fait porter dans le cadre privé/familial", contre seulement 6% des hommes.
Or, entre ménage, cuisine et collecte de bois et d'eau dans les pays du Sud, "la valeur monétaire du travail de soin non rémunéré assuré par les femmes âgées de 15 ans ou plus représente au moins 10.800 milliards de dollars chaque année, soit trois fois la valeur du secteur du numérique à l'échelle mondiale", estime l'ONG.
Parmi les mères de famille monoparentale qui travaillent, plus d’une sur quatre est pauvre.
"Les femmes sont en première ligne des inégalités à cause d'un système économique qui les discrimine et les cantonne dans les métiers les plus précaires et les moins rémunérés, à commencer par le secteur du soin", insiste Pauline Leclère.
"Les inégalités économiques s’appuient aussi sur des inégalités de genre", estime Pauline Leclère sur le site 20 minutes. "Partout dans le monde, dans les pays en voie de développement aussi bien qu’en France, ce travail de soin, peu ou non rémunéré, est assuré de façon disproportionnée par des filles et des femmes. C’est du temps qu’elles ont en moins pour s’éduquer, participer à des activités politiques et sociales, prospérer économiquement", précise-t-elle.
L'ONG milite pour des systèmes de fiscalité plus progressistes ainsi que pour une lutte efficace contre l'évasion fiscale, "ou encore, en particulier en France, par la suppression des niches fiscales qui bénéficient disproportionnellement aux grandes entreprises sans bénéfice pour l’économie", ajoute Pauline Leclère dans cet entretien. Pour elle, il faudrait réinvestir l'argent ainsi récupéré dans les services publics, ce qui permettrait de "rééquilibrer la responsabilité du travail de soin qui incombe le plus souvent aux filles et aux femmes". La lutte contre les inégalités femmes-hommes dans le monde du travail est une des priorités mise en avant de ce rapport 2020, comme le précise la responsable France d'Oxfam, qui prône notamment une "augmentation significative du congé paternité afin de limiter le 'risque maternité' discriminant les femmes sur le marché du travail".
"Notre modèle économique défaillant a mis un pouvoir et une richesse considérable entre les mains d’une élite fortunée, notamment en exploitant le travail des plus pauvres, en première ligne desquels les femmes et les filles, et en violant leurs droits de façon systématique", lit-on encore sur le site d'Oxfam France.
L'ONG pointe particulièrement la situation en France : "les femmes occupent 78 % des emplois à temps partiel et 70 % des CDD et des intérims. Les femmes occupent 95 % des emplois d’assistant-e-s maternelles, d’employé-e-s de maisons, d’aides à domicile, d’aides-ménagères et de secrétaires. Lorsque des politiques d’austérité viennent affaiblir les services publics, les femmes sont les premières à en payer le prix".
En France, Oxfam demande à Emmanuel Macron de prendre des mesures pour enrayer la précarité des femmes, notamment "en valorisant les rémunérations dans les métiers à prédominance féminine notamment dans les métiers du soin". Un débat au coeur du mouvement de contestion actuel contre la réforme des retraites : l'ONG milite pour la suppression "des systèmes de décote pour les carrières incomplètes" et le retour à "un calcul de la pension basé sur les meilleures années pour prendre en compte la réalité de l’emploi des femmes, notamment les carrières hachées".