Fil d'Ariane
Il y a onze ans, les femmes n’étaient pas reconnues comme co-responsables au sein de la famille. Et la répudiation, le fait de rompre le mariage par la décision unilatérale d’un époux, le plus souvent le renvoi de la femme par son mari, était légale. « En cela, le Code de la famille, la Moudawana promulguée en 2004, est une avancée », souligne Hicham Houdaïfa. Mais il dénonce par ailleurs le manque de travail de sensibilisation à ces nouvelles dispositions, notamment dans les villages enclavés, où la répudiation est encore de mise. « Et les rares démarches ont été proposées en langue arabe, alors que les populations locales sont berbérophones ou amazighophones. » La Moudawana devait aussi permettre la diminution des mariages de mineurs. C’est loin d’être le cas. En 2013, ce n’est pas moins de 33 000 mariages qui ont été prononcés par un juge. « Cela représente 11 à 12% des mariages légaux, le double d’avant le Code de la famille ».
Son modèle, Albert Londres, qui arpentait le monde au début du XXème siècle. À la manière de grand reporter français, auteur du célèbre « Au bagne », Hicham Houdaïfa a souhaité « décrire la réalité avec une certaine froideur ». Mais reconnaît que son livre est aussi un plaidoyer pour lutter contre toutes ces violences faîtes aux femmes, en devenant « volontairement ou involontairement » porte-parole de la société civile, avec laquelle il partage la même volonté de réformer le code pénal. « Lorsque une femme se fait violer, elle doit obligatoirement en fournir la preuve, sous peine d’être elle-même condamnée par la justice. Idem pour le harcèlement ».
Quelques dispositions économiques voient le jour, comme des aides financières pour les veuves. Bien trop insuffisant pour Hicham Houdaïfa qui préconise même de mettre en place un « plan Marshall » pour aider les mères seules à s'en sortir financièrement.
Et les « femmes mules », qui par milliers traversent chaque jour la frontière entre le Maroc et les enclaves espagnoles, transportant des dizaines de kilos de marchandises exonérées de taxe ? Elles sont absentes, malgré un titre évocateur. Un sujet abondamment traité ces derniers temps selon l’auteur, qui précise ne pas être exhaustif en introduction. « Il fallait faire des choix pour sortir ce livre. C’est un début, les situations de précarité ne manquent pas au Maroc ». Il continue d’ailleurs ses investigations par le biais de la presse écrite. Et appelle d’autres journalistes à poursuivre le travail, « avec l’idée de dénoncer ces injustices. » C’est l’objectif qu’il veut donner à sa nouvelle collection Enquêtes.
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