Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan avait tout juste 12 ans, quand le régime de Nicolae Ceausescu avait promulgué le décret 770 en Roumanie. Et il serait bien étonné aujourd’hui de constater combien ses convictions sur l’avortement et sa volonté de l’interdire en Turquie, sont en osmose avec les élucubrations finalement meurtrières de feu un tyran communiste et son oukaz daté du 1er octobre 1966.
L’homme fort de La Turquie dont plus personne n’ose contester le pouvoir hégémonique, a déclaré récemment : « J’ai parlé à mon ministre (de la santé), nous rédigerons cette loi et nous la passerons ! »
Aussi bien les Turcs de son camp que ses adversaires, savent à quoi s’en tenir avec ces proclamations : aussitôt dit aussitôt fait, ses voeux sont des ordres et ses décisions irréversibles. Son parti lui obéit au doigt et à l’oeil, l’opposition bat du vent. La condition féminine étant celle qu’elle est sous un pouvoir islamiste, malgré la levée de boucliers du camp laïc et des associations féministes, l’ordre du Sultan, comme on appelle dorénavant Mr Erdogan, sera exécuté promptement. D’ici fin juin, la Turquie sera dotée d’une loi qui restreint non seulement l’interruption de grossesse volontaire, mais aussi la césarienne.
Justement, les clés de la logique de Mr. Erdogan sur le sujet et ses similitudes avec le décret 770 de Ceausescu, on les découvre dans son positionnement par rapport à la césarienne, plus que sur l’avortement qu’il qualifie de « crime » et de « massacre », des propos somme toute banals chez les extrémistes de tout bord.
« La césarienne est un phénomène qui vise à freiner la population d’une nation. Une femme qui subit la césarienne ne peut enfanter que deux fois. Pourquoi ne pas faire plus d’enfants ? » interroge le Premier ministre. Ajoutez à cela ses prêches sur « La Turquie sera d’autant plus grande que son taux de natalité sera élevé», ou encore « Chaque couple se doit de faire plus de 3 enfants »… et vous comprenez que les préoccupations du premier ministre turc sont claires : la loi turque qui restreindra l’interruption volontaire de grossesse comme la césarienne part du même principe et porte les mêmes intentions que le décret roumain des années soixante.
Un nouvel eugénisme caché ?Le décret 770 était motivé par la politique de « l’homme nouveau » voulu par Ceausescu : l’objectif était de fabriquer une nouvelle génération, élevée dans l’orthodoxie communiste et capable de prendre en main le pays. Pour y parvenir, il décida donc, entre autres, d’interdire tout avortement et toute césarienne aux femmes de moins de 45 ans qui n’avaient pas encore conçu au moins 4 enfant.
Est-ce un hasard ? Mr Erdogan a annoncé une autre bonne nouvelle le 4 février 2012, au Congres de La Jeunesse de l’AKP : « Je veux une jeunesse musulmane, pieuse, moderne et vindicative ! »
Aussitôt dit, aussitôt fait encore une fois :
la loi sur l’éducation nationale est changée. Le nouveau texte promulgué le 30 mars, sera appliqué dès la rentrée 2012 : 5000 établissement primaires et secondaires relevant d’un enseignement dit laïc seront transformés en écoles religieuses où l’étude du coran sera obligatoire au même titre que les autres matières. Les diplômés, encore jeunes, qui en sortiront seront honorés du titre d’imam, hafiz (chanteur de prière) et hatip (prêcheur) et ils pourront continuer leur études à l’université, d’ou sortiront alors des médecins-imams, des ingénieurs-imams, etc.
Quant aux femmes qui par de telles écoles non mixtes, elles ne peuvent être imam ; elles se contenteront de prêcher ou chanter dans les cercles féminins, d’être femme voilée au foyer, infirmière ou médecin pieuses, refusant de soigner les hommes…
Mais elles se feront une joie d’enfanter au moins 3 bons musulmans.