Fières, solennelles, détournant parfois le regard par pudeur. Plus d’une vingtaine de mères égyptiennes posent avec leurs fils, chez elles, dans le salon ou une chambre. Tout en sobriété. En fonction de la pose choisie par les sujets ou le photographe, on décèle le degré d’intimité qui lie la mère à son éternel enfant. Certains se tiennent par la main, d’autres se touchent à peine, voire pas du tout, assis côte à côte sur un lit ou un canapé, en une inversion remarquable de la tradition picturale occidentale, passée ou présente, qui expose des corps dénudés de femmes auprès d'hommes habillés.
Dans de nombreux clichés, la mère est placée « par respect », précise le photographe français, devant son grand garçon, alors en position protectrice, tous muscles dehors. L’imposante musculature des fils qui posent torses-nus près de leurs mères voilées ou qui arborent un niqab, n’est pas un hasard.
Tous sont culturistes et ont été choisis par
Denis Dailleux, séduit par « la beauté de leurs corps ». « Je choisissais des garçons et après je découvrais les mères. » Impossible autrement d’atteindre ces femmes qui vivent souvent dans l’ombre des hommes. « Je n’aurais pas pu dire à leur fils "je vais photographier ta mère". Ils m’auraient ri au nez car en Egypte, ce n’est pas respectueux de photographier la maman dans certains milieux. Ce n’est pas pour la cacher mais par respect. Selon moi, c’est plus de l’archaïsme qu’un fait religieux. »
Dans la haute société, la donne est différente et prendre les femmes en photos ne pose pas problème sauf qu’« on ne rentre pas chez les bourgeois parce qu’ils protègent leur intérieur. Les gens les plus généreux sont les gens du peuple. »