Tuées parce que femmes

En France, le nombre de féminicides a baissé, selon le gouvernement

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Manif famille féminicides

Le collectif des familles des victimes de féminicides défile à Paris lors de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre 2023.

©IM/Terriennes
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En France, 94 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2023, soit une baisse de 20% après les 118 féminicides recensés l'année précédente, selon le gouvernement. Une méthodologie de décompte remise en cause par plusieurs collectifs féministes qui recensent déjà les meurtres de deux femmes les deux premiers jours de l'année.

Depuis lundi 1er janvier, chacun des 164 tribunaux français et des 36 cours d'appel est doté d'un pôle spécialisé dans les violences intrafamiliales. Sous la responsabilité de "magistrats coordonnateurs" spécialement formés, ces pôles visent à favoriser une action coordonnée et un meilleur partage d'informations entre tous les magistrats et acteurs concernés par une même situation familiale, précise l'AFP.

Ces nouvelles dispositions interviennent alors que le gouvernement français vient de rendre public son bilan des féminicides pour 2023. Selon les chiffres des autorités, 94 femmes sont mortes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, un chiffre en baisse de 20% par rapport 2022, selon le gouvernement. 

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Cette évolution est "très loin d'être satisfaisante", a commenté le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, cité par le quotidien Le Figaro. "Nous savons que lutter contre ce fléau prend du temps (...) mais l'engagement de la justice française pour endiguer les féminicides porte tout de même ses premiers fruits", a-t-il ajouté. "On peut espérer que notre lutte sera encore plus efficace" avec le déploiement de "téléphones grave danger" et de "bracelets antirapprochement" supplémentaires, souligne aussi le ministre.

Une "meilleure" réactivité des institutions ?

En novembre, le ministère de la Justice avait publié une série d'indicateurs soulignant selon lui une meilleure "réactivité" des institutions face au fléau des violences conjugales. Ainsi le nombre de condamnations pour violences ou harcèlement au sein du couple a plus que doublé entre 2017 et 2022, passant de 22 206 à 49 616.

Près de 3600 ordonnances de protection, qui imposent l'éviction du conjoint violent ou lui interdisent d'entrer en contact avec sa victime, ont été délivrées en 2022, contre moins de 1400 cinq ans plus tôt.

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Une parole "plus écoutée" ...

Quelque 244 300 victimes de violences conjugales, en grande majorité des femmes, ont été recensées par les forces de l'ordre en 2022, une hausse de 15% en un an interprétée par les associations comme le signe d'une meilleure prise en compte de leur parole.

Dans 72 % des cas, il s’agit d’un féminicide conjugal. Dans 74 % des cas, il a eu lieu au domicile. Collectif NousToutes sur X

Mais face au bilan officiel du nombre de féminicides enregistrés en France, nombre de militantes réagissent sur les réseaux sociaux. Certains collectifs contestent la méthodologie du décompte des autorités, comme le collectif Nous toutes qui de son côté recense  134 féminicides commis en France au 31 décembre 2023. "Dans 72 % des cas, il s’agit d’un féminicide conjugal. Dans 74 % des cas il a eu lieu au domicile", écrit le collectif sur X.

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L'organisation féministe elle-même recense depuis plusieurs années le nombre de féminicides en France. Selon elle, deux femmes en ont déjà été victimes depuis le 1er janvier 2024.

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Le collectif Féminicides par Compagnons ou ex, qui a été le premier à mener ce recensement, publie le même bilan ce 2 janvier. Un chiffre qui fait réagir l'avocate engagée contre les violences faites aux femmes, Isabelle Steyer, sur son compte X.

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Suicides forcés, "la face cachée des féminicides"

Le quotidien Le Monde a publié en décembre une enquête sur le nombre de suicides forcés liés à des violences conjugales. Selon cette enquête, 759 femmes ont mis fin à leurs jours ou ont tenté de le faire en 2022 en raison du harcèlement de leur conjoint ou ex-conjoint.

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La "France est le premier pays en Europe et le deuxième dans le monde à reconnaître et condamner le suicide forcé", rappelle Le Monde. "Le harcèlement par conjoint ou ex-conjoint ayant conduit la victime à se suicider ou à tenter de le faire est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende", précise le quotidien. "Si on ajoute les suicides forcés aux féminicides, la photographie du taux de mortalité lié aux violences conjugales n’est plus du tout la même", analyse Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis, interrogée par le quotidien, "un constat que la société et les pouvoirs publics ne sont pas prêts à accepter".

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