“Le véritable problème vient de ces groupes d’extrémistes manipulés par la police politique. Notre ennemi c'est la police de Ben Ali qui a travaillé sur l’image de la femme comme 'faire valoir' démocratique et moderniste auprès de l'Occident. Tandis que mon intégrité a été violée” – dit encore Sihem - “ et cela, je l'ai subi de la part d'une dictature qui a proclamé avoir aimé les femmes”. Le deuxième volet de ces Printemps Arabes est celui de réseaux sociaux et des femmes qui, comme en Italie, ont énormément animé le débat sur le Web.
LA HUITIÈME PLAIE D’ÉGYPTE Nermeen Edrees,
jeune bloggeuse Egyptienne a été très engagée avec son blog lors de la révolution du Caire du 25 Janvier qui - souligne-t-elle : “a commencé lors des premières grèves et mouvements dans les années '90 et a fleuri ces derniers mois”. Nermeen grâce à son blog s'occupe énormément de cas de harcèlement sexuel: “Une véritable plaie, en Egypte” explique – t – elle “ qui atteint toutes les classes sociales de femmes, et qui est due à la frustration et à la pauvreté que le régime de Moubarak a toujours voulu nier. Ce qui importe maintenant c’est de convaincre les
Egyptiennes de reconnaître d'abord que cela leur arrive et ensuite de dénoncer ces cas de violences. Et grâce aux portables et au Web on leur a donné la chance de dénoncer”. Cela a, d'autre part, énormément à voir avec les droits humains qu'on ne pourrait jamais instaurer si cela continuait”. Mais en mettant en rapport ces Printemps Arabes et les réseaux sociaux il ne faut surtout pas croire que tout soit né grâce à l’Internet. Ce n'est pas du virtuel qui devient réalité, un passage qui semblerait appartenir à la propagande des vieux médias, mais il s'agit du contraire : c’est le réel qui devient aussi virtuel pour pouvoir continuer à partager des valeurs communes, à savoir la lutte contre la dictature. La vérité c'est que ces outils comme Twitter et Facebook ont permis de dire au monde ce qui se passait avec les mots des acteurs eux mêmes.
AU SUD, BEAUCOUP DE NOUVEAU Carolina Popolani réalisatrice italo – syrienne qui en 2009 a tourné un documentaire au Caire intitulé Cairo down town. Elle a filmé l'usage des blogs par de jeunes Egyptiens bien avant la “place Tahrir”. Certains d'entre eux étaient prêts à perdre leur vie quitte à continuer à dénoncer les tortures, les censures, et les abus de pouvoir de Moubarak. Aucune nouvelle Constitution ne pourra être écrite sans les femmes et hommes de la place Tharir. “Les militants en ligne qui étaient à la fois manifestants et militants dans la vie réelle, ont dû affronter une myriade de défis, ils ont été traqués, menacés, et arrêtés. Ces révolutions ont été des révolutions du peuple, de gens qui voulaient faire entendre leurs voix en documentant leur lutte comme témoignage pour l'humanité” dit Amira Al Houssaini journaliste originaire du Bahreïn. Elle qui rappelle que “dans ces révolutions les femmes sont en train d'occuper une place, une “agora”, qui est une déclaration symbolique et politique à la fois. Femmes et hommes sont tous égaux dans cette lutte. Tous sont en train de demander des droits humains, démocratie et liberté de parole. Et la soumission des femmes aux hommes n'est pas liée à la religion mais à la faiblesse des hommes et à leurs problèmes psychologiques.” Photo amira de la vidéo Amira est la rédactrice en chef de
Global Voices Online pour le Moyen Orient. Elle a commencé sa carrière de journaliste dans son pays natal, dans un milieu qui n'était pas vraiment amical pour les femmes indépendantes. Elle décrit le fonctionnement de ces réseaux et le défi qu’ils lancent à l'hégémonie des médias classiques : “À Global Voices Online, environ 500 personnes travaillent à partir de leurs ordinateurs portables. Je peux travailler n'importe où il y a une connexion avec Internet. Nous faisons des synthèses des échanges que nous trouvons sur la toile. On les traduit de l'arabe vers l'anglais puis en 20 langues, français, allemand, hindi, bengalais, malgache, etc... Ainsi nous sommes en train de construire des ponts autour du monde. Avec Global Voices, je peux savoir ce qui se passe dans un village de Madagascar. Nous avons besoin d'écouter des voix différentes et de comprendre, nous devons être capables de respecter les autres même si nous ne sommes pas d'accord”. À la lumière de ces printemps, la modernité semble désormais venir du Sud. Comme s’il y avait eu une inversion des tendances.