En Suisse, Lausanne chiffre le harcèlement sexuel de rue pour mieux le combattre

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Témoignage dans les rues de Lausanne : "Quand j'étais plus jeune, je pensais que je provoquais ça, que je devais modifier mon comportement pour que je sois plus acceptable.
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Interpellée en janvier 2016, la municipalité de Lausanne a lancé une enquête en juin, pour en livrer les résultats le 19 décembre 2016 : "72% des femmes âgées de 16 à 25 ans interrogées ont rapporté avoir été confrontées à au moins un épisode de harcèlement de rue à Lausanne lors des 12 derniers mois."

C'est un gros chiffre qu'annonce la municipalité de Lausanne, grande - et belle - ville de Suisse romande, sur les rives helvètes du Lac Léman : "72% des femmes âgées de 16 à 25 ans interrogées ont rapporté avoir été confrontées à au moins un épisode de harcèlement de rue à Lausanne lors des 12 derniers mois". Et pourtant, par rapport à 2015, les Lausannoises ont gagné 10% de tranquilité. En janvier 2016, le harcèlement de rue était évoqué par 82 % des femmes de Suisse romande comme l'une des plaies de leur vie quotidienne.

Hé mad’moiselle… il se passe quoi avec le harcèlement de rue à Lausanne ?

C'est d'ailleurs cette enquête d'opinion qui avait conduit Léonore Porchet, conseillère communale "Verts vaudois" de Lausanne, à passer à l'offensive, sur l'un des sujets qui lui tient particulièrement à coeur. Sur un ton ironique, elle avait interpellé ses collègues de la municipalité avec cette question : « Hé mad’moiselle… il se passe quoi avec le harcèlement de rue à Lausanne ? ». Son but était de choquer pour faire bouger les choses, et cela dans la foulée des événements de la Saint Sylvestre, le 31 janvier 2015, à Cologne - des milliers de plaintes avaient alors été déposées  dans cette ville allemande des bords du Rhin, contres des "des bandes de jeunes gens très violents, prenant pour cible des femmes, dans un mélange d'agressions sexuelles et de vols à l'arraché".

Opération réussie. "Parce qu’il existait peu de données sur le phénomène", Lausanne installait aussitôt un  Observatoire de la sécurité sur cette question et lançait une étude. Devenant ainsi la première ville suisse à s'emparer officiellement de ce problème quotidien de société.

Les conclusions de cette enquête menée à l'été 2016 ont été rendues publiques six mois plus tard, dans un rapport présenté à la presse le 19 décembre 2016, et disponible sur le site de la Mairie : "Deux cent dix personnes ont été interrogées au cours des mois de juin et juillet 2016, pour cette enquête principalement menée dans quatre zones de Lausanne (centre-ville, bord du lac, ouest, nord). L’application mobile Civique développée par l’institut de recherche Idiap permettait de géo-localiser les interviews menées par les enquêteurs à l’aide de leur Smartphone." Avec ces précisions supplémentaires : "La majorité des répondants étaient de sexe féminin (87%). Environ la moitié des répondants étaient âgés de 16-25 ans, et l'autre moitié de 25-50
ans. Le niveau d'éducation des répondants était varié. La majorité des répondants vivent à Lausanne.
"

Dans leur questionnaire, les sondeurs ont tenté de brasser diverses manifestations du harcèlement :
•    les regards insistants
•    les sifflements
•    les commentaires sur le physique ou la tenue vestimentaire
•    les poursuites
•    les frottements
•    les avances sexuelles
•    les attouchements

Le sifflement, moyen privilégié des harceleurs

L'ATS, agence télégraphique suisse, principale agence de presse de la Confédération helvétique suisse, analyse ainsi les résultats de cette investigation : "Les résultats du sondage non exhaustif, portant sur 210 personnes dont 90% de femmes plutôt jeunes et mené avec l'institut de recherche Idiap, confirment que le harcèlement de rue est bel et bien une réalité, bien qu'il ne soit que très rarement rapporté à la police. Seules dix plaintes en moyenne sont déposées chaque année, selon Yolande Gerber de l'observatoire de la sécurité. Comme dans les autres villes européennes, les jeunes femmes sont particulièrement touchées, puisque sept sur dix, 72%, ont été confrontées à au moins un épisode cette année. Et pour 50% des victimes, le phénomène s'est produit au moins une fois par mois. Le harcèlement de rue se manifeste le plus souvent par des sifflements. Toutefois, d'autres comportements constituant des infractions pénales ont été mentionnés, ce dans des proportions non négligeables : 63% des victimes ont dit avoir été insultées et 32% avoir subi des attouchements."

Les autorités de Lausanne pourront se consoler en constatant que le harcèlement de rue n'y est pas plus prégnant qu'ailleurs : la ville se situe dans la moyenne européenne, et même dans une moindre mesure qu'à Londres qui culmine avec 80% de femmes se disant victimes d'actes de harcèlement de rue.

Carte itws Lausanne harcèlement
Géolocalisation des interviews menées par les deux enquêteurs à Lausanne - Suisse
Idiap, octobre 2016

Vous pouvez suivre Sylvie Braibant sur twitter @braibant1 https://twitter.com/Braibant1