Mardi 30 août, 80 députés français issus de la majorité parlementaire ont envoyé
une lettre au ministre de l’Education, Luc Chatel. Ils exigent que ce dernier retire au plus vite de la circulation les manuels de Science de la Vie et de la Terre (SVT) destinés aux élèves de première littéraires et économiques et sociales. Sont mis en cause quelques paragraphes consacrés à la dimension culturelle de l'identité sexuelle, idée issue de la théorie du genre sexuel.
Concrètement, si "
le sexe biologique nous identifie comme mâle ou femelle, ce n’est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou de féminin." Ainsi, la sexualité ne serait pas déterminée génétiquement, mais bien culturellement et socialement. Impensable pour ces politiques. Parmi les indignés, on compte des députés issus de la Droite populaire (collectif parlementaire très ancré à droite), mais aussi des députés UMP et centristes.
Des réactions de tous bordsBien évidemment, à moins d’un an du scrutin présidentiel, les polémiques et petites phrases fusent en tous sens dans le microcosme politique français, d'autant plus que l'éducation sera au cœur des débats. Philippe Meirieu d’Europe Ecologie Les Verts estime que "
l’Assemblée Nationale n’a pas à délibérer sur les programmes". La Parti Socialiste suit cette tendance en déclarant dans un communiqué que "
sur la forme, il n’appartient pas au pouvoir politique de déterminer le contenu des manuels, mais aux autorités scientifiques qui en sont chargées." De son côté, le secrétaire général de l’UMP
Jean-François Copé soutient les signataires de la lettre : "
ce qui est profondément choquant dans cette affaire, c’est que la théorie du genre, qui est une théorie défendue par des personnes mais combattue par d’autres, soit présentée comme une vérité scientifique alors que ça ne l’est pas", taclant au passage Yves Jégo, du Parti Radical, qui considérait que la lettre véhiculait un "
discours haineux."
L’affaire est donc strictement française, et a pris de l’ampleur alors que la rentrée politique hexagonale est bouillonnante, évidemment très focalisée sur les questions scolaires. D’ailleurs, il ne s’agit ici que du ravivement d’une polémique qui avait débuté en mai, quand
Christine Boutin demandait au ministre de l’Education de retirer les manuels (
le texte de loi date de juillet 2010). Quoi qu’il en soit,
Luc Chatel a répété mercredi 31 août que les livres incriminés ne seraient pas retirés de la circulation, rappelant que "
ce n’est pas le ministre de l’Education qui exerce droit de vie ou de mort sur un manuel."
Comment enseigner la sexualité ?Si en définitive la portée politique de la mesure est assez faible, on reconnaîtra que la question de l’enseignement sexuel et de la sexualité reste posée. Doit-on y aborder la question de la sexualité, qui relève de la sphère privée ? L’enseignement de la reproduction, puis, par extension, de la sexualité, s’est généralisé en Occident aux alentours des années 1960-1970, suite à la révolution sexuelle. Cependant, une critique a émergé dans les années 1990 – avec l’essor des études du genre – , reprochant à l’éducation sexuelle d’être hétérocentrée, et de délaisser de facto les questions de l’homosexualité, de la bisexualité et de la transsexualité (LGBT).