Etat des lieux du sexisme en France : agir en entreprise, dans les médias et en politique

Conformément à la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et la citoyenneté, le Haut Conseil à l’Egalité publie son deuxième état des lieux du sexisme en France. Constat à quelques jours du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes : en 2019, les plaintes pour harcèlement sexuel ont augmenté de 46%.
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sexisme pas notre genre
29 octobre 2017, manifestation #MeToo à Marseille.
© AP/Claude Paris
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"Le sexisme fait système et est présent dans le quotidien des femmes. Il y a urgence à rendre visible et à forger des outils dans tous les domaines, afin de le faire reculer", estime Brigitte Grésy, présidente du Haut Conseil à l’Egalité.

Quelques chiffres : 87 % des victimes d’actes sexistes enregistrés par les forces de l’ordre sont des femmes et 91 % des mis en cause sont des hommes.
60 % des Européennes déclarent, en 2019, avoir déjà été victimes d’au moins une forme de violence sexiste ou sexuelle au cours de leur carrière.

L'outrage sexiste, nouvelle infraction

En France, l'outrage sexiste a été introduit dans le Code pénal par la loi n°2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexistes et sexuelles : "Constitue un outrage sexiste le fait, hors les cas prévus aux articles 222-13, 222-32, 222-33, et 222-33-2-2, d’imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui, soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante." (Article 621-1 du Code pénal). L’outrage sexiste est puni d’une contravention de 4ème classe d’un montant de 750 € d’amende. Selon les circonstances, il peut être puni d’une contravention de 5ème classe d’un montant de 1500 € d’amende.
comportements sexistes
@Le Parisien
Au 31 décembre 2019, 1 124 infractions pour outrage sexiste ont été enregistrées par les forces de police sur l’ensemble du territoire français, depuis l’entrée en vigueur de la loi.

Sexisme et médias font bon ménage

La part des femmes à la télévision est de 42 % en 2019 et n’est plus que de 29 % aux heures de grande écoute. Dans les émissions de divertissement, notamment de téléréalité, les traits de caractère et les assignations à des tâches et rôles sociaux de sexe sont stéréotypés ; le dénigrement et la disqualification des femmes sont toujours présents, de même qu’une hyper sexualisation sans lien avec le sujet traité.

L’analyse du HCE s’est portée sur le sexisme dans les émissions de divertissement, et plus particulièrement dans celles de téléréalité. Le constat est sans appel : la téléréalité est une grande pourvoyeuse de sexisme.

marseillais sexkstes
"Les Marseillais", diffusé sur W9 
©W9
Le projet de loi sur l’audiovisuel est particulièrement silencieux sur la question des femmes, pointe également le rapport du HCE, qui invite les autorités à "renforcer le rôle du CSA pour imposer à chaque chaîne de progresser annuellement, à la fois sur la présence des femmes à l’antenne par type de vecteur et heure d’audience, mais aussi sur la diminution des stéréotypes dans leurs programmes. Ce projet de loi doit, de plus, inclure une disposition permettant une régulation des contenus sur les plateformes numériques".

Le HCE émet plusieurs recommandations pour lutter contre le sexisme dans les médias, comme par exemple celle d'inscrire dans le cahier des charges du Service public un objectif de femmes réalisatrices et de femmes dans les métiers techniques de l’audiovisuel de l’ordre de 30 % en 2022 puis 40 % d’ici 5 ans.

La politique, bastion sexiste

Quant au milieu politique, il demeure un bastion majeur du sexisme et fonctionne comme une chasse gardée des hommes. Malgré les lois de parité, le pouvoir reste très majoritairement masculin : 84% des maires et 92% des président.e.s d’intercommunalité sont des hommes.

Parmi ses 32 recommandations, nous retiendrons aussi celle-ci : le HCE souhaite qu'en période électorale soit publié un décompte spécifique du temps de parole accordé aux femmes et aux hommes par semaine.

femmes à barbe manifestant

11 mai 2016, des femmes portant de fausses barbes manifestent près de l'Assemblée nationale pour dénoncer la conduite sexiste de certains députés.

©AP Photo/Christophe Ena

Sexisme, devenu un mot commun

"Jamais le mot sexisme et, plus largement, l’expression 'violences sexistes et sexuelles', n’ont été utilisés autant qu’en 2019. Les causes en sont multiples. C’est d’abord l’ampleur du mouvement #MeToo, le décompte macabre des 149 féminicides — meurtres de femmes parce qu’elles sont des femmes — par conjoints ou ex-conjoints recensés tout au long de l’année, les révélations de violences sexuelles dans de nombreux domaines comme les arts et la culture ou plus récemment le sport", lit-on dans cette deuxième étude réalisée par le HCE. 

Selon cette enquête, la nouvelle génération se déclare d’ailleurs moins tolérante face au sexisme et également plus combattive face à lui : 92 % des jeunes considèrent que le sexisme est un problème dans notre société. Ce qui n'était pas forcément le cas au moment où la regrettée Claire Bretecher signait cette planche. 
 
planche claire bretecher
Hommage à Claire Bretecher, disparue le 11 février 2020 à l'âge de 79 ans. Extrait d’une illustration de l’album Les Frustrés.
 
©Dargaud, 2020.
Depuis novembre 2019, le Centre Hubertine Auclert mène une campagne "Sexisme, parlons-en" à destination des lycéens et lycéennes et des personnels de l’Éducation nationale. Cette campagne a pour objectif d’inciter les filles et garçons de 15 à 18 ans à réfléchir et débattre à travers des outils grand public.

Un hashtag #STOPSEXISME a été lancé, des informations sont à retrouver sur le site www.sexismeparlonsen.fr, et une vidéo intitulée Le pantalon (créée par la chaîne Youtube Rose Carpet) a été largement diffusée dans les établissements scolaires et sur les réseaux sociaux .