Le poil, heurts et malheurs
Le pubis vu par Cécile Hug est empreint de poésie. Il porte haut sa beauté. Loin de la toison que le conditionnement esthétique, les religions, la mode nous conduisent à considérer avec dégoût.
Ce poil, que dis-je le moindre duvet, a-t-il toujours été traqué sans répit ? On aurait retrouvé les premières pinces à épiler rudimentaires dans des sépultures datant de la préhistoire. C’est dire si cette obsession est profondément ancrée. Si l’Antiquité n’aime que les corps glabres, poils et cheveux deviennent au Moyen-Age symboles de sagesse et de pouvoir. Pour preuve, cette pratique des Mérovingiens coupant les cheveux de ceux qu’ils voulaient écarter du trône.
Au VIIIe siècle, la religion et ses diktats entrent en scène. Symboles de paganisme, barbes et cheveux longs sont à proscrire. Charlemagne adhère et importe dans son empire les coutumes romaines. Les cheveux raccourcissent. Sur le visage, la pilosité se fait plus discrète. Fin des barbes. La tendance est à la moustache.
Pendant ce temps, que font les femmes avec leur pilosité ? Pas grand chose jusqu’aux croisades. Car en Orient conquis par les chevaliers francs, le poil n’a pas la cote. Les princesses orientales s’épilent : front, aisselles et pubis. La cire chaude, ennemie jurée du poil, se répand en Occident.
Ce que cette brève histoire du poil tente d’introduire, c’est la double dimension sociale et politique de cet attribut du corps humain. Deux historiens, Marie-France Auzepy et Joël Cornette, lui ont même consacré une somme :
HISTOIRE DU POIL aux Editions Belin. Car il en a connu des hauts et des bas, ce poil, en particulier le poil féminin. Toison maudite symbole de bestialité et de sexualité débridée, disqualifiée au début du 20ème par la mode des bains de mer, interdite de représentation publique jusqu’aux années Giscard, elle revient dans les années hippies comme l’étendard des luttes féministes contre la suprématie mâle. Le poil ne cessera plus d’être cet instrument de revendication. Même si les militantes sont un peu les seules en France à laisser ses luxuriances envahir aisselles, mollets et pubis. On peut être suffragette et avoir les jambes lisses... Tandis qu'en Suède ou en Allemagne, royaumes de la nature reine et du naturisme, rares sont celles qui songent à se raser.