Les auteur de Les féministes blanches et l'Empire, pamphlet de 110 pages publié par la Fabrique à la fin de l'année 2012, affichent une conviction : le féminisme occidental, en particulier français, n'échappe pas à l'islamophobie ambiante depuis les attentats contre les Etats-Unis du 11 septembre 2001, comme en témoignent les débats véhéments autour du port du foulard islamique dans l'espace public, ou la méfiance épidermique vis à vis de tout mouvement culturel ou polotique relié au monde musulman. Ils datent ce "racisme féministe" de la loi sur les signes religieux à l'école, qui n'aurait visé que l'islam, et relie cette tendance à l'époque du colonialisme français, quand les "suffragettes vantaient l'oeuvre civilisatrice des femmes blanches". Première accusée de leur démonstration, l'association "
Ni putes, ni soumises" aurait contribuer à ne stigmatiser que les hommes noirs ou arabes.
Un récit partiel et partial du dévoilement
Ce néo-colonialisme renvoie ainsi aux suffragettes de l'Empire français qui luttaient contre la polygamie et imposaient des cérémonies du dévoilement obligatoire en Algérie française. Sauf que le récit ainsi publié de ce dévoilement est partiel. S'il est exact qu'en pleine guerre d'Algérie, sous l'impulsion entre autres de Mmes Salan et Massu, épouses de généraux ultra Algérie française, de jeunes femmes furent amenées à se dévoiler en public,
comme Monique Améziane à Constantine en échange de la vie de son frère, que l'armée française arracha les voiles des montagnardes au nom de la lutte contre le FLN, et qu'en signe d'indignation de nombreuses Algériennes se revoilèrent, il faut aussi raconter qu'au lendemain de l'indépendance, elles se dévoilèrent lors d'une grande manifestation, cette fois pour protester contre une révolution en train de leur confisquer leurs droits…
Ainsi la colonisation deviendrait la mesure de toute chose, au risque d'une histoire européenne indifférenciée, mettant dans un même sac pays colonisateurs ou pas, et il faudrait alors choisir : lutter contre l'impérialisme et la suprématie blanche ou lutter contre le sexisme, puisque les hommes ou les garçons des cités, mis en cause par exemple par "Ni putes, ni soumises" sont les descendants de peuples colonisés, victimes à leur tour du racisme. De la même façon, il conviendrait de ne pas dénoncer le sexisme en Iran, puisque la révolution des mollahs de 1979 était avant tout anti impérialiste.