Du bout des lèvres, Anne Hidalgo, première femme maire de la capitale, admet que "Oui, il y a beaucoup de travaux pas toujours bien coordonnés".
On ne lui passe rien.
Des rats dodus pullulent dans les rues de la capitale ? L'édile hérite aussitôt d'un doux surnom : "ratsponsable" !
Beaucoup lui reprochent également d'avoir la larme sélective.
Le 27 mars 2016, un attentat-suicide tuait 72 personnes (parmi lesquels 29 enfants et 6 femmes) à Lahore, au Pakistan. Immense émotion planétaire. Mais l'onde de choc n'atteindra pas l'Hôtel de ville. Certains espéraient que la Tour Eiffel s'illuminerait en vert, aux couleurs du drapeau pakistanais, en guise de soutien. Espoir déçu. A ce moment-là, le célèbre monument était encore habillé en noir-jaune-rouge, aux couleurs de la Belgique. Le pays voisin avait été frappé par un attentat cinq jours plus tôt.
Et Anne Hidalgo se contentera d'un sobre tweet :
#ConseildeParis Je n'oublie pas les villes plus lointaines mais non moins éprouvées ces derniers jours, #Lahore et la #cotedivoire
— Anne Hidalgo (@Anne_Hidalgo) 29 mars 2016
L'ex-première adjointe PS du maire de Paris Bertrand Delanoë semble blindée, même si parfois elle confesse "se sentir seule".
Cet "Hidalgobashing ", elle l'encaisse. Pas le choix.
Encaisser ! "Un verbe qui lui va bien" grincent ses administrés.
Beaucoup, en effet, en ont marre de passer à la caisse.

200% d'augmentation !
Depuis le 1er janvier 2018, ce n'est plus l'Etat mais les mairies qui décident des tarifs du stationnement et à Paris, c'est désormais une société privée qui distribue les "prunes" sur les pare-brises. Et la récolte est plutôt juteuse. Les amendes (pudiquement rebaptisées "forfaits post-stationnement") sont passées de 17 à 50 euros, soit... 200% d'augmentation !Anne Hidalgo
Sur l'ensemble de l'année 2018, les recettes de stationnement devraient atteindre 330 millions d'euros. Un montant record certes, mais insuffisant pour combler la dette de la capitale.
Au début du mandat d’Anne Hidalgo, en 2014, celle-ci était de 4,1 milliards d’euros. En 2019, la dette dépassera les 6 milliards. A titre d'exemple, cela équivaut à six fois le montant de l'investissement étranger en Wallonie.
Anne Hidalgo avait pourtant prévenu tout le monde : "Venir à Paris se garer n'est pas un acquis. L'occupation de l'espace public a une valeur rare. L'open bar pour tout le monde en matière de stationnement c'est fini les gars!".
Hélas, la Maire de Paris ne montre guère l'exemple concernant sa propre circulation dans les rues de la capitale.

Après deux mois d'observation quotidienne pour les besoins de cette enquête, il apparaissait que si ses trajets se faisaient presque toujours en voiture (électrique), lors de ses déplacements professionnels, elle piétinait sans gêne le code de la route (sens interdit, stationnement etc.)
Les auteurs du papier prirent la plume.
Et le ton était cinglant : " Vous demandez à vos administrés de faire ce que vous êtes incapable de faire (...) avec votre conscience écologique que personne ne nie, vous utilisez encore une voiture chaque jour, vous occupez la chaussée chaque jour, et vous faites rouler une moto, celles de vos gardes du corps. Pourquoi n'utilisez-vous pas les privilèges normalement dévolus à votre fonction pour trouver des solutions alternatives ? (...) Vous n’êtes pas « meilleure » que nous, ça nous déçoit terriblement. Si vous considérez que la fin justifie les moyens, pourquoi ne pas commencer par donner vous-même l'exemple, car tant que vous ne respecterez pas les mêmes règles que les automobilistes, l'incompréhension perdurera."

"Il y a urgence"
Mais les supporters de la Maire de Paris la soutiennent mordicus dans cette croisade pour un oxygène purifié. Si on ose l'écrire, (et on ose) ils roulent pour elle.Ils font savoir que le stationnement des véhicules électriques est gratuit dans Paris et qu'il suffit juste de demander une autorisation sur le site de la Ville. Ils rappellent que les véhicules électriques sont aussi autorisés à occuper sans frais les quelque 2200 anciens emplacements Autolib’ qui n’ont pas été réactivés.
Autolib ? Anne Hidalgo refuse

Pour asseoir son engagement, Anne Hidalgo publie en septembre dernier Respirer (Editions de l’Observatoire) où elle écrit : "On ne mourra pas demain de la pollution. On en meurt aujourd'hui. Elle est déjà la troisième cause de mortalité en France après l'alcool et le tabac. Il y a urgence. Il ne se passe pas une journée depuis mon élection sans que je me répète : "il y a urgence".
Les râleurs peuvent râler. Les voici presque contraints d'utiliser les transports en commun. Paris vaut bien une laisse.
Reste, malgré tout, des situations absurdes.
Les jours de pluie, il n'est pas rare de trouver des véhicules d'urgence (pompiers, police, SAMU etc.) bloqués en surface, englués dans des bouchons monstrueux alors qu'à quelques mètres à peine, en contrebas, les 3,3 km de voies sur berges rive droite sont vierges de tout joggeurs, du moindre promeneur avec parapluie ou d'un simple cycliste.
La Jeanne d'Arc des particules
Véritable Jeanne d'Arc qui veut bouter hors de Paris ces armées de particules fines, vicieuses et mortelles, Anne Hidalgo "assume" son impopularité.Dans son livre, elle écrit : " J'ai choisi de faire face. D'accepter cette culpabilité mais de refuser qu'elle m'aveugle ou me paralyse. J'ai choisi d'en faire le moteur de mon action. Si nous sommes coupables d'aujourd'hui, alors nous sommes responsables de demain. (...) Et le premier des grands défis de la ville de Paris, celui qui conditionne tous les autres, c'est le défi climatique. Nous avons perdu trop de temps en controverses. "

Ses détracteurs soulignent que posséder un véhicule n'est pas le fait d'égoïstes pollueurs, amateurs gourmands de particules fines. Il y a aussi les livreurs, médecins, infirmières, taxis qui se retrouvent otages de ces bouleversements.
Selon eux, malgré ces mesures de choc, la pollution n'aurait guère diminué. Et les enfants avalent ces nouveaux pics de pollution et souffrent de bronchiolites en série. Ses ennemis soutiennent, en brandissant de multiples rapports, qu'elle s'est tout simplement déplacée en surface.
Anne Hidalgo ne cille pas.
Elle a fait sienne la devise de Paris : "fluctuat nec mergitur " (" ballottée par les flots, mais ne sombre pas").
Elle assure que l'automobiliste n'est pas son ennemi sauf s'il roule en diesel, "l’amiante du XXIe siècle" dit-elle.
Elle s'est fixée un objectif "obtenir 15 % des déplacements à vélo en 2020 contre 6 % aujourd’hui."
Force est de lui reconnaître une formidable pugnacité et, c'est important, une réelle empathie concernant la détresse des femmes dans Paris.
Sous son impulsion, l'Hôtel de Ville de Paris offre une soixantaine de places d'hébergement pour accueillir des femmes sans domicile fixe.
Lors de l'inauguration de cet espace, le 11 décembre, Anne Hidalgo avait accueilli les vingt-cinq premières femmes avec ces mots : " Bienvenue, vous êtes chez vous. "
Cette fois, plus question de "Notre dame des barges" ou de "ratsponsable".
N'en déplaise à ses nombreux adversaires, aucun de ses prédécesseurs n'avaient pris une telle initiative avant elle.
> Anne Hidalgo entre dans le cercle restreint des femmes maires de capitale
> L'union fait la force, ou la politique selon Anne Hidalgo et Carolina Toha