"Les institutions internationales disent qu'il y a 75% d'hommes parmi ces #migrants." #BourdinDirect
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 24 Septembre 2015
Les cris ont redoublé alors que l'Aquarius errait en mer Méditerranée en ce mois de juin 2018. Les quelque 640 rescapés d'un naufrage au large des côtes italiennes, accueillis finalement en Espagne, auraient tous été des hommes.
.@nadine__morano : La majorité de ceux qui arrivent sont des #migrants économiques, ce sont des Soudanais, ce sont des jeunes hommes seuls en grande majorité ! Les ports les plus proches étaient ceux de l'Algérie et de la Tunisie ! " #Aquarius #8h30politique
— F.Guiot (@FrkGuiot) 18 juin 2018
Des affirmations mensongères, qui s'expliquent aussi par le "tri" opéré à la descente du bâteau à Valence, le 17 juin 2018 par la Croix rouge, comme le raconte Le Monde.
Queremos recordar el proceso que siguen las personas que llegan en las embarcaciones del #Aquarius.
— Cruz Roja CV (@CruzRojaCV) 17 juin 2018
Operativo #EsperanzaDelMediterraneo: triaje, revisión (en el muelle) y directos al alojamiento temporal y posterior alojamiento final. pic.twitter.com/swSnc4f7v1
Les réfugié.es sont aujourd'hui, et partout dans le monde, des femmes, des hommes, des enfants des deux sexes. Une communauté de malheurs que tient à rappeler la Secrétaire générale de la Francophonie, Michaëlle Jean.
Émotions profondes pour ces 630 femmes, hommes et enfants migrants rescapés par
— Michaëlle Jean (@MichaelleJeanF) 17 juin 2018
l’#Aquarius enfin accueillis solidairement à #Valence après une semaine d’errance et l’angoisse des jours d’avant, à la dérive sur une embarcation d’infortune.
A la veille de la Journée mondiale des réfugié.es 2018, érigée par les Nations Unies en février 2001 et marquée depuis chaque 20 juin, en France, le Haut Conseil à l'égalité Femmes/Hommes (HECfh) a renouvelé ses demandes spécifiques concernant les demandeuses d'asile :
Sans oublier que la jurispridence française exclut aussi les mères de filles destinées à subir des mutilations sexuelles. En France, l’asile est accordé seulement aux victimes potentielles… pas aux parents qui les accompagnent, même si elles sont très jeunes.
Les chemins de l'exil, qui ne partent pas tous de Syrie, sont aujourd'hui empruntés par une majorité de femmes, à l'occasion de déplacements sud/nord ou sud/sud, selon les données du Haut Commissariat aux réfugiés, le HCR.
Aujourd’hui, les femmes représentent plus de la moitié (51%) des flux migratoires de la planète. Et si les images récentes, tournées aux portes de l'Europe, donnent un aperçu plus masculin de ces mouvements migratoires, ce n'est que situation provisoire. Selon l'Unicef, la tendance pourrait bientôt s'inverser : si 65% de ceux qui franchissent les frontières européennes sont des hommes, dans les camps de réfugiés des pays limitrophes de la Syrie (Liban, Jordanie, Turquie), les femmes sont légèrement plus nombreuses (50,5 %), dans une tranche d’âge majoritaire constituée par les 18-59 ans, où les femmes sont également en nombre supérieur (23,9 % des femmes, 21,8 % des hommes).
Moins visibles dans l'histoire des déplacements de population, comme dans l'Histoire en générale, les femmes étaient déjà en nombre quasi égal aux hommes dans les migrations des 19ème et 20ème siècles. Elles étaient 47% en 1911, 40% en 1930, 44% en 1954 et 48% en 1998. Mais à l'époque, elles prenaient rarement le chemin seules. Les départs étaient familiaux. Ou bien, elles arrivaient plus tard pour rejoindre leurs époux qui avaient fait souche dans leur nouveau pays. En 1927, Sarah et Moïse Gielman, leur deux enfants Yehuda et Michla (7 et 5 ans), décidèrent de quitter le ghetto de Varsovie. Ils voulaient gagner l'Amérique. Ils s'arrêtèrent en France. Ils fuyaient les pogroms et les prémices ravageurs de la crise économique. Mes grands-parents et leurs enfants espéraient un monde meilleur en un éternel recommencement.
La nouveauté pour les migrantes, ce sont ces départs solitaires, rarement décidés dans la joie, le plus souvent dans l'urgence, parfois avec un ou plusieurs enfants.
> Relire notre article : Migrants, toujours plus de femmes et d’enfants
La sociologue franco-britannique Jane Freedman connaît bien ces audacieuses qui n'ont souvent pas d'autre choix. Elle en a fait le thème majeur de ses recherches et de ses ouvrages. Des connaissances qu'elle a mises, aussi, durant plusieurs années au service de l'Unesco. Elle a rencontré beaucoup de ces voyageuses sans retour qui arrivent seules, d'Asie centrale (Afghanistan, Arménie ou Tchétchénie entre autres), ou d'Afrique - en particulier de là où elles risquent les mutilations génitales traditionnelles, comme le Soudan, l'Erythrée, ou encore le Mali, et de régions en guerre où le viol est utilisé comme arme de destruction massive, RDC mais aussi zones dominées par l'Etat islamique au Moyen Orient, par exemple.
D'autres viennent pour travailler et assurer une meilleur éducation à leurs enfants. Si elles quittent des territoires en guerre, c'est aussi parce qu'elles y ont perdu leurs maris. Veuves, en grande précarité, elles se lancent sur les chemins.
Des persécutions liées au genre qui ne sont pas prises au sérieux
Beaucoup demandent l'asile, pour des raisons liées à leur genre : crainte des mariages forcés, violences domestiques, viols de guerre, excision, homosexualité. Autant de raisons validées par le HCR et l'Union européenne. Malheureusement, constate Jane Freedman, ces persécutions ne sont pas toujours prises au sérieux, comme elle a pu le voir en France, avec l'OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) par exemple. Ces persécutions sont par ailleurs difficiles à prouver, surtout lorsqu'on a voyagé pendant des semaines, voire des mois, avant d'arriver dans les pays d'accueil.
Ce qui caractérise la "fuite" de ces femmes, c'est aussi le risque accru qu'elles encourent au long du chemin censé les mener vers plus de sécurité : outre les dangers de la traversée maritime qu'elles doivent surmonter comme les hommes, elles affrontent de nouvelles violences masculines, celles de proxénètes, même lorsqu'elles sont arrivées en Europe, d'où la nécessité de leur assurer un accueil plus sûr. Une nécessité loin d'être mise en pratique.
Retrouver les portraits de femmes, réfugiées en France :
> Migrantes en France, jusqu'à quand ?
> En France de plus en plus de jeunes mères en demande d’asile
(source AFP)
Installé au cœur du théâtre Ovalhouse, au sud de Londres, "Mazi Mas" (qui signifie "Venez manger avec nous" en grec) est un restaurant qui se veut féministe : en cuisine, sept femmes-cheffes immigrées y mitonnent l'authentique cuisine de leur pays, trouvant ainsi un emploi autrement inaccessible et leur place dans la société britannique.
"Nous voulons donner du pouvoir aux femmes invisibles partout dans le monde", résume Roberta Siao, les mains plongées dans des fruits de la passion. Cette Brésilienne de 43 ans, qui gère les cuisines du restaurant, explique comment, "sans contact, ni réseau ou expérience", elle ne trouvait aucun emploi au Royaume-Uni malgré des diplômes et des années d'expériences en tant qu'employée de banque au Brésil. Après plusieurs années à la maison à élever son fils, sa rencontre avec la créatrice de "Mazi Mas" a été déterminante.