On ne doit pas s'ennuyer tous les jours avec la professeure Breanne Fahs, qui enseigne les études de genre, les 'abominables' "gender studies" tant détestées en France par les ultra conservateurs de toute obédience, mais aussi ailleurs dans la très catholique Europe. Et Mme Fahs fait beaucoup parler d'elle ces derniers temps. Pour une expérience in vivo avec ses étudiants et pour un livre sur une morte.
L'info a été postée le 3 juillet 2014 sur le site de l'Université d'Arizona et depuis, le moins qu'on puisse dire c'est que ça buzze… "Une professeure de notre Université encourage ses étudiants à défier les normes de la pilosité corporelle". Et Breanne Fahs les pousse à cela depuis quatre ans déjà. L'exercice n'est pas obligatoire et beaucoup évitent de s'y soumettre : "Durant 10 semaines (soit à peine plus de deux mois) les étudiantes arrêtent de s'épiler leurs jambes et leurs aisselles et tiennent un journal de bord. Pendant cette même période, les étudiants s'épilent entièrement, de la tête aux pieds". D'après leur professeure, "il n'y a pas de meilleur moyen pour comprendre le poids des normes sociales que de les 'violer' et de voir comment les gens réagissent. Il n'y a vraiment aucune raison de penser que le choix de se raser ou pas soit une si grande affaire. Et pourtant ça l'est, comme peuvent le constater rapidement les étudiants."
Le corps, lieu de contestation et de tous les possibles
Si l'on en croit leurs commentaires, les volontaires vivent là une expérience extrême. Ainsi Stephanie Robinson a-t-elle refusé deux fois d'abord de se livrer à l'exercice avant de le tenter. "C'est une expérience qui change la vie. Beaucoup de mes amis ne voulaient plus travailler avec moi ou entendre quoi que ce soit à propos de cette chose. Et ma mère était renversée à l'idée que je me marierai dans une robe blanche d'où ressortiraient mes aisselles poilues. J'ai aussi remarqué sur le campus les regards dégoutés par mes poils. Cela m'a fait définitivement réaliser que si vous n'adhérez pas strictement aux prescriptions sociales des rôles sexuels, votre corps se transforme en lieu de contestation et d'opinion publique."
L'info a été postée le 3 juillet 2014 sur le site de l'Université d'Arizona et depuis, le moins qu'on puisse dire c'est que ça buzze… "Une professeure de notre Université encourage ses étudiants à défier les normes de la pilosité corporelle". Et Breanne Fahs les pousse à cela depuis quatre ans déjà. L'exercice n'est pas obligatoire et beaucoup évitent de s'y soumettre : "Durant 10 semaines (soit à peine plus de deux mois) les étudiantes arrêtent de s'épiler leurs jambes et leurs aisselles et tiennent un journal de bord. Pendant cette même période, les étudiants s'épilent entièrement, de la tête aux pieds". D'après leur professeure, "il n'y a pas de meilleur moyen pour comprendre le poids des normes sociales que de les 'violer' et de voir comment les gens réagissent. Il n'y a vraiment aucune raison de penser que le choix de se raser ou pas soit une si grande affaire. Et pourtant ça l'est, comme peuvent le constater rapidement les étudiants."
Le corps, lieu de contestation et de tous les possibles
Si l'on en croit leurs commentaires, les volontaires vivent là une expérience extrême. Ainsi Stephanie Robinson a-t-elle refusé deux fois d'abord de se livrer à l'exercice avant de le tenter. "C'est une expérience qui change la vie. Beaucoup de mes amis ne voulaient plus travailler avec moi ou entendre quoi que ce soit à propos de cette chose. Et ma mère était renversée à l'idée que je me marierai dans une robe blanche d'où ressortiraient mes aisselles poilues. J'ai aussi remarqué sur le campus les regards dégoutés par mes poils. Cela m'a fait définitivement réaliser que si vous n'adhérez pas strictement aux prescriptions sociales des rôles sexuels, votre corps se transforme en lieu de contestation et d'opinion publique."

Au delà de mettre au jour la force destructrice des normes sociales, l'expérience elle-même s'avère très positive pour le groupe qui la met en oeuvre. Au fil des ans, Breanne Fahs a constater qu'il "est fort intéressant de voir que la pression des condisciples peut créer une nouvelle norme. Quand presque tous les étudiants de la classe participent à cette inversion des rôles, ils développent parallèlement un sens de la communauté et se réjouissent de participer ensemble à un acte de rébellion."
Même si cet acte ne revêt pas tout à fait le même engagement pour les garçons que pour les filles : de nouvelles modes poussent nombre d'hommes aux Etats Unis ou en France à s'épiler aujourd'hui, en dessous du cou, (à commencer par les coureurs du Tour de France qui se rasent les jambes, pour des raisons d'hygiène ou d'autres plus contestées de meilleure aérodynamique) tout en maintenant un caractère viril dans leur apparence. La seule chose qu'ils éprouvent vraiment dans cette pratique c'est le caractère physiquement très contraignant de l'abolition des poils pour les femmes. Une injonction de "beauté" au reste très variable selon les cultures et les continents, mais qui tend à s'étendre sous l'action des industriels de la cosmétique.
Dans le regard apeuré des autres
Kurt Keller, un ancien participant, se souvient : "Le rasage est une projection des uns sur les autres, en raison de nos goûts personnels. Cela dit, ce n'est pas parce que votre petit ami vous invite à vous raser que vous devez le faire, cela doit rester du ressort de votre propre décision. J'espère sincèrement que les gens, moi y compris, sont capables de traiter leur corps avec respect, hors des attentes relationnelles. Si votre partenaire vous demande de faire quelque chose qui semble non naturel, il faut ou bien discuter, ou bien se séparer."
C'est ce qui est arrivé à Grace Scale, lorsque son petit ami du moment lui a balancé tout ce qu'il détestait dans son corps, en particulier ses poils en des endroits divers et variés. "C'était la première fois que l'on attaquait ainsi mon corps, et il ne m'a pas fallu réfléchir longtemps pour rompre là." Grace Scale a été stupéfaite par certaines réactions de ses proches. L'un de ses amis les plus chers a comparé ses aisselles poilues à "de la boue au fond d'une poubelle". Ce qui l'a amenée à faire une corrélation entre pilosité et position dominante masculine dans la société…
Même si cet acte ne revêt pas tout à fait le même engagement pour les garçons que pour les filles : de nouvelles modes poussent nombre d'hommes aux Etats Unis ou en France à s'épiler aujourd'hui, en dessous du cou, (à commencer par les coureurs du Tour de France qui se rasent les jambes, pour des raisons d'hygiène ou d'autres plus contestées de meilleure aérodynamique) tout en maintenant un caractère viril dans leur apparence. La seule chose qu'ils éprouvent vraiment dans cette pratique c'est le caractère physiquement très contraignant de l'abolition des poils pour les femmes. Une injonction de "beauté" au reste très variable selon les cultures et les continents, mais qui tend à s'étendre sous l'action des industriels de la cosmétique.
Dans le regard apeuré des autres
Kurt Keller, un ancien participant, se souvient : "Le rasage est une projection des uns sur les autres, en raison de nos goûts personnels. Cela dit, ce n'est pas parce que votre petit ami vous invite à vous raser que vous devez le faire, cela doit rester du ressort de votre propre décision. J'espère sincèrement que les gens, moi y compris, sont capables de traiter leur corps avec respect, hors des attentes relationnelles. Si votre partenaire vous demande de faire quelque chose qui semble non naturel, il faut ou bien discuter, ou bien se séparer."
C'est ce qui est arrivé à Grace Scale, lorsque son petit ami du moment lui a balancé tout ce qu'il détestait dans son corps, en particulier ses poils en des endroits divers et variés. "C'était la première fois que l'on attaquait ainsi mon corps, et il ne m'a pas fallu réfléchir longtemps pour rompre là." Grace Scale a été stupéfaite par certaines réactions de ses proches. L'un de ses amis les plus chers a comparé ses aisselles poilues à "de la boue au fond d'une poubelle". Ce qui l'a amenée à faire une corrélation entre pilosité et position dominante masculine dans la société…

Ce passage quasi initiatique proposé par l'Université de l'Arizona en a conduit quelques un-e-s encore plus loin. Jaqueline Gonzalez est ainsi devenue une féministe radicale après ce bouleversement. "L'expérience m'a aidée à appréhender le degré d'omniprésence des rapports sociaux de sexe dans notre culture. De plus, en m'engageant dans ce type de projet activiste, j'ai dépassé le stade de théoricienne immobile dans une salle de classe. Et ce serait bien d'étendre ce genre de pédagogie."
Des poils au sang des femmes
Jaqueline Gonzalez s'est donc engagée dans des actions en apparence encore plus provocatrices, comme la rédaction d'un manifeste pour la "décolonisation de l'appréhension patriarcale des menstrues féminines" : "Are you menstruating today ? ", une initiative qui n'est pas sans rappeler le radicalisme féministe des années 1970, où l'on retrouve Valérie Solanas, un autre sujet d'élection de la chercheure Breanne Fahs qui a fait de la sexualité et des corps féminins le miel de ses études. Elle vient de publier une biographie remarquée de la mythique et malheureuse Valérie Solanas, avec ce sous-titre "la vie provocante de la femme qui écrivit SCUM (et tira sur Andy Warhol)".
Une morte bien vivante
SCUM fut interprété alternativement comme l'acronyme de Society for Cutting Up Men (« Association pour émasculer les hommes »), ou comme le mot argot pour définir la crasse et les excréments. Le New York Times a interrogé l'auteure sur son intérêt pour celle qui symbolise une violence extrême jusqu'à être rejetée par certaines féministes. "Valerie était et reste un tel bazar de contradictions et de questions ouvertes, mais aussi une cible surexposée pour les projections des gens sur la colère et les femmes. Quelqu'un qui peut encore déclencher un enfer et rendre tant de personnes en colère, si longtemps après sa mort, a forcément fait quelque chose de valable. (.../...) Son manifeste va à l'encontre de tout ce qu'on nous apprend. Elle a dit des choses sur les hommes, la complicité des femmes à leur propre aliénation que personne d'autre n'avait formulé, et avec un tel pouvoir, une telle colère… Je me suis aperçue que mes étudiant-e-s croyaient qu'elle était encore vivante".
Des élèves sans doute illusionné-e-s par cette magicienne de Mrs Breanne Fahs qui met la théorie de Valérie Solanas en pratique avec son expérience si enrichissante d'inversion des genres, sur la pilosité masculine et féminine...
Des poils au sang des femmes
Jaqueline Gonzalez s'est donc engagée dans des actions en apparence encore plus provocatrices, comme la rédaction d'un manifeste pour la "décolonisation de l'appréhension patriarcale des menstrues féminines" : "Are you menstruating today ? ", une initiative qui n'est pas sans rappeler le radicalisme féministe des années 1970, où l'on retrouve Valérie Solanas, un autre sujet d'élection de la chercheure Breanne Fahs qui a fait de la sexualité et des corps féminins le miel de ses études. Elle vient de publier une biographie remarquée de la mythique et malheureuse Valérie Solanas, avec ce sous-titre "la vie provocante de la femme qui écrivit SCUM (et tira sur Andy Warhol)".
Une morte bien vivante
SCUM fut interprété alternativement comme l'acronyme de Society for Cutting Up Men (« Association pour émasculer les hommes »), ou comme le mot argot pour définir la crasse et les excréments. Le New York Times a interrogé l'auteure sur son intérêt pour celle qui symbolise une violence extrême jusqu'à être rejetée par certaines féministes. "Valerie était et reste un tel bazar de contradictions et de questions ouvertes, mais aussi une cible surexposée pour les projections des gens sur la colère et les femmes. Quelqu'un qui peut encore déclencher un enfer et rendre tant de personnes en colère, si longtemps après sa mort, a forcément fait quelque chose de valable. (.../...) Son manifeste va à l'encontre de tout ce qu'on nous apprend. Elle a dit des choses sur les hommes, la complicité des femmes à leur propre aliénation que personne d'autre n'avait formulé, et avec un tel pouvoir, une telle colère… Je me suis aperçue que mes étudiant-e-s croyaient qu'elle était encore vivante".
Des élèves sans doute illusionné-e-s par cette magicienne de Mrs Breanne Fahs qui met la théorie de Valérie Solanas en pratique avec son expérience si enrichissante d'inversion des genres, sur la pilosité masculine et féminine...