A l'occasion du match de quart de finale de la Coupe du monde de football, qui opposait la France aux Etats-Unis, les supporters, encore remplis d'espoir, s'étaient rassemblés dans des fan zones un peu partout dans l'Hexagone. Boissons fraiches, cris d'encouragement, mais aussi réflexion autour du foot féminin, étaient au rendez-vous. A Paris, Terriennes était de la partie. Ambiance.
Ce soir du 28 juin, ils sont nombreux à défier la canicule pour ne pas manquer une miette du match de quart de finale France - États-Unis en bonne compagnie. Devant la fan zone des Halles, espace aménagé par la Ville de Paris pour la Coupe du monde féminine, la file d'attente est encore longue. Visages maquillés des couleurs du drapeau français, maillots ressortis pour l'occasion, ils s'impatientent. Les derniers arrivés peuvent enfin rentrer : il est 21 heures. Coup d'envoi !
À l'intérieur de la
fan zone, le parvis du jardin Nelson Mandela est noir de monde. D'ores et déjà, des
"Allez les Bleues !" criés à tue-tête fusent de toutes parts. Dans la foule, quelques supporters américains, minoritaires, sont venus pour soutenir leur
"girls".
Cinquième minute, à peine le match commencé, l'attaquante Megan Rapinoe marque un premier but. Les supporters des Etats-Unis jubilent ; côté français, un immense
"bouuuuh !!!" s'élève de la foule.
La tension monte d'un cran. Comme si l'engouement reflété par les audiences s'était téléporté aux Halles. Alexandra, 24 ans, vêtue de bleu, blanc et rouge pour l'occasion, avoue sa surprise :
"C'est chouette, il y a de l'engouement. Je ne pensais pas qu'il y allait avoir autant de monde", dit-elle en lançant un
"Allez les filles !" pour la route. C'est la mi-temps, il est encore temps pour l'équipe française de remonter au score.
Surprenant qu'autant de personnes suivent le foot féminin ? Paul, 24 ans, drapeau français maquillé sur la joue, tente une analyse :
"Il y a une mise en avant de l'égalité des genres dans tous les domaines : la politique, le cinéma...
C'est bien de mettre en lumière le sport féminin, car il y a encore quelques années, ce n'était pas le cas. Aujourd'hui on a quelques figures comme Amandine Henry et Eugénie Le Sommer qui commencent à se faire connaître." Et d'ajouter que le foot féminin a ses spécificités :
"Derrière, il n'y a pas les mêmes sponsors et tout cet argent qui inonde le monde du foot masculin, dit-il.
C'est un peu plus 'pur', disons. Mais les matchs sont tout aussi intéressants et on commence à se rapprocher d'une certaine équité."Daisy Rosario, elle, a fait tout le chemin depuis les États-Unis pour suivre les matchs en France. À 38 ans, le ton assuré, elle lance :
"Nos hommes sont - évidemment - horribles au foot, alors que nos filles sont formidables !". Elle ne cache pas sa joie face à l'engouement populaire que suscite cette Coupe du monde féminine.
"J'ai vu tellement d'hommes dans des bars qui ne venaient voir le match mais qui, après avoir vu quelques minutes seulement, sont restés scotchés à l'écran, dit-elle. Ils se disent "A
h ouais quand même, ce sont des dures ! C'est un sport assez égalitaire finalement, ce n'est pas la taille qui compte mais plutôt la vitesse et l'habileté sur le terrain." Et d'ajouter en riant :
"Elles ne sont pas aussi dramatiques que les hommes... Elles ne font pas semblant d'avoir mal ou de tomber pour rien".
Le match reprend alors que la nuit commence à tomber. Le suspense s'accentue, la tension aussi.
"Allez là, ce n'est pas la ligue 1 quoi !", crie un jeune homme. Les Bleues n'attaquent pas assez à son goût.
"Elle est où l'envie là ?!", s'impatiente un autre. À la 65e minute, c'est la sidération : deuxième but de Megan Rapinoe. La foule s'agite, les supporters américains hurlent de joie. La frustration gagne la foule. Tous les yeux restent rivés sur les deux écrans. C'est alors que Wendie Renard débarque... Et un but pour la France !
L'espoir revient. Les Françaises peuvent-elles retourner le jeu ? A mesure que la fin approche, les supporters se rendent à l'évidence : les Bleues ne disputeront pas de finale.
Dès que retentit le coup de sifflet final, la foule déçue se précipite hors de la fan zone. Sophie Monteagudo, 24 ans, reste positive :
"Elles se sont bien défendues jusqu'au bout, elles ont mis leur but donc on est quand même contents." Côme Laroze, lui, est quand même un peu amer :
"On y a cru vers la fin... Mais elles n'ont pas réussi à retourner le match. Ce n'est pas grave, on est fiers d'elles quand même !"Si les Bleues n'ont pas remporté le match contre les Américaines, elles ont réussi un autre exploit.
"J'ai des amies qui ne regardent pas le foot d'habitude, et qui s'y sont mises pour la Coupe du monde féminine", sourit Helène, 22 ans.
"J'y connais rien au foot, mais ce soir j'ai regardé le match et j'ai tout de suite vachement accroché", raconte Juliette Lenrouilly, convertie au foot depuis ce vendredi soir.
"Je pense qu'il y a une identification qui s'opère. Le fait que je sois une fille et que ce soit des filles qui jouent m'a beaucoup plus intéressée que lorsque des hommes sont sur le terrain..."