Il y a 150 ans naissait Colette, l'immortelle

Colette a vu le jour un 28 janvier, il y a 150 ans de cela. La femme de lettres a laissé une œuvre luxuriante d'une rare qualité dont le temps n'a émoussé ni la force, ni l'audace, ni la modernité. Rencontre avec Frédéric Maget, président de la Société des amis de Colette.
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Colette une portrait
"Une seule timidité nous est commune : nous n'osons pas ouvertement avoir besoin les uns des autres" écrit Colette
photo : Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye
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"Aux grands artistes, la patrie ingrate", pourra-t-on lire peut-être un jour au frontispice d'un bâtiment. C'est que rien n'a été prévu en France pour saluer dignement la mémoire de Colette à l'occasion du 150ème anniversaire de sa naissance. Une amnésie cardiaque des plus désolantes. Seul l'Institut Français le 28 janvier dernier a ouvert ses portes, un après-midi durant, pour évoquer la grande experte des tourments humains et l'infatiguable défenseure de la nature.

 
affiche Colette Suisse
À l'étranger – aux Etats-Unis, au Japon, au Liban, en Italie, en Espagne – on a salué cette date-anniversaire. En Suisse, la Fondation Jan Michalski, honore jusqu'au 2 avril Colette à travers une exposition riche en documents inédits. Rien de tel en France.

Pourquoi donc cette myopie du coeur au pays de Victor Hugo et de Simone de Beauvoir ? La romancière dérangerait-elle encore ? 

Quelle ironie de l'histoire quand on sait que Colette a eu droit à des obsèques nationales en août 1954. Une première pour une femme !
Et aujourd'hui ? Rien du tout.

Mais la France populaire, elle, relève le gant. N'en déplaise aux mensualisés de la Culture et aux autres commissaires des Beaux-Arts,  elle honore cette artiste et montre l'exemple à Saint-Sauveur en Puysaye, où est née la romancière. Désormais, un bronze de l'écrivaine trone dans le joli jardin qui fait face à la maison natale. Si l'Etat français boude cette artiste d'exception, des libraires, eux, se mobilisent. Ils favorisent l'éclosion de rencontres et la lecture de ses romans.
Colette au travail
Colette au travail
portrait par Lipntzki-1948 / Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

150 ans, un anniversaire oublié ?

Frédéric Maget, président de la société des Amis de Colette,
Notre Colette de Frédéric Maget
est sur tous les fronts, passant d'une interview à l'autre et multipliant débats et conférences. Toujours en mouvement, en rendez-vous, il  dépense une énergie peu commune pour saluer la romancière et pour affirmer l'importance de son oeuvre. Colette est sa vie.
Elle l'accompagne depuis son adolescence. Un amour coup de foudre dont l'intensité n'est jamais retombée.

Frédéric Maget est d'abord un homme sensible. Quand on évoque la mémoire du regretté Gérard Bonnal, ami cher à son coeur et fameux biographe de Colette, ses yeux s'embuent. Il lui a dédié son nouvel ouvrage Notre Colette (Flammarion). Nul doute que cet essai aurait ravi l'ami disparu, parti rejoindre la romancière le 13 juin 2022.

Colette, la femme multiple

Après Les 7 vies de Colette (Flammarion), le directeur de la maison de Colette endosse cette fois la panoplie de l'enquêteur.

Il nous dévoile les femmes artistes qui furent des inconditionnelles de l'écrivaine : citons Audrey Hepburn, Marilyn Monroe, Françoise Sagan, Marguerite Yourcenar, Marguerite Duras, Simone de Beauvoir !
Colette et JP Sartre
JP Sartre chez Colette, dans son appartement du Palais-Royal.
Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Son livre est une plongée intimiste au coeur d'une époque minutieusement  reconstituée.  Rien ne manque. Ni les circonstances, ni les attentes des uns et des autres, ni le résultat.

Colette, impériale,  trône parmi les personnes qui se pressent à la porte de son logement du Palais-Royal. Elle n'a pas son pareil pour comprendre telle ou telle situation avec son oeil-scalpel et son verbe qui fait mouche.
On vient chez elle comme on porte l'eau d'une source à sa bouche. Pour se désaltérer d'intelligence.

Parfois, la rencontre physique ne s'est pas faite (Marilyn Monroe, Marguerite Duras...) mais cela importe peu. Elle est une étoile dans le ciel littéraire. Elle le sait. Sa lumière guide celles et ceux qui veulent épouser la carrière des Lettres. La pureté de sa langue désamorce toute  critique sérieuse. Elle agit comme un révélateur. Se dire écrivain et ne pas apprécier son style, c'est faire l'aveu d'une certaine médiocrité. Aragon et Montherlant, pourtant peu suspects de complaisance envers leurs collègues de plume,  reconnaissaient son génie. Maupassant écrivait dans la préface de Pierre et Jean : "La langue française, d'ailleurs, est une eau pure que les écrivains maniérés n'ont jamais pu et ne pourront jamais troubler…) La nature de cette langue est d'être claire, logique et nerveuse. Elle ne se laisse pas affaiblir, obscurcir ou corrompre. "
Colette l'avait bien compris. Pour notre plus grand plaisir.
 

Entretien avec Frédéric Maget, président de la société des Amis de Colette

Terriennes : Pourquoi lire Colette aujourd'hui ?
 
Frédéric Maget
Frédéric Maget, chez lui, dans son appartement parisien.
(Frantz Vaillant)

Frédéric Maget : Parce que lire Colette, cela fait du bien ! Il y a un effet salvateur, guérisseur, et réjouissant dans la lecture des œuvres de Colette. C'est une lecture qui vous soigne, je crois, de beaucoup de blessures, de beaucoup d'angoisses. Ce n'est pas du tout une œuvre qui nie les angoisses, loin de là. D'ailleurs, les histoires d'amour chez Colette finissent toujours mal. Il y a beaucoup de personnages inquiétants, beaucoup de monstres, beaucoup d'assassins dans son œuvre, mais elle arrive à nous faire sortir de l'emprise que peut exercer sur nous l'angoisse ou le désespoir pour nous ramener toujours du côté du vivant.
 

Colette est une des premières à avoir parlé du désir sexuel féminin, à avoir fait rentrer le thème de l'avortement dans ses œuvres, à avoir dénoncé les violences conjugales, à avoir remis en cause la question de l'instinct maternel, à dénoncer les politiques natalistes.
Frédéric Maget

On est frappé en lisant Colette de s'apercevoir combien sa modernité est intacte...

Colette est une des premières à avoir parlé du désir sexuel féminin, à avoir fait rentrer le thème de l'avortement dans ses œuvres, à avoir dénoncé les violences conjugales, à avoir remis en cause la question de l'instinct maternel, à dénoncer les politiques natalistes. Elle est l'une des premières femmes publiques d'importance à avoir pris position dans la presse de l'époque contre les violences exercées contre les animaux, dénonçant leur utilisation dans les zoos, dans les cirques, et les expérimentations animales.

Colette
"Il est bon de traiter l'amitié comme les vins et de se méfier des mélanges" affirmait Colette
photo : Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Elle est aussi une des pionnières de ce qu'on appelle aujourd'hui l'antispécisme. "Il n'y a qu'une bête" dit Colette dans ses textes. Cette capacité qu'ont les animaux à devenir des humains, les humains à devenir des animaux, les végétaux à devenir des humains, des animaux. Oui, c'est ce côté très mouvant des identités et cette grande humanité qui embrasse le tout. Ça, c'est aussi son caractère pionnier en matière de genre. Aujourd'hui, on est très préoccupé par les questions d'identité sexuelle de genre.

Colette est une des premières à explorer ces thématiques en inversant les stéréotypes masculins. On sait que les héros chez Colette sont toujours un peu faibles. Les femmes sont toujours solides, fortes, donnent des coups de poings quand elles ne sont pas contentes. Colette elle-même parlait de son "hermaphrodisme mental."

La force de Colette, c'est d'admettre dans ses textes toutes les contradictions de l'identité ou des identités féminines.
Frédéric Maget

Peut-on dire que lire Colette, c'est lire la vie entière d'une femme ?

En effet, dans les textes de Colette, on a toutes les femmes à la fois depuis la jeune adolescente jusqu'à la femme d'âge mûr et la femme vieillissante qui souffre, en passant par la femme de 40 ans qui s'interroge sur son désir, sa capacité à aimer, à éprouver encore du plaisir, la place que la société est prête à lui apporter. Et il y a chez Colette des femmes libres, émancipées, des femmes au contraire beaucoup plus conservatrices, qui ont des conceptions plus traditionnelles. Et je trouve que la force de Colette, c'est d'admettre dans ses textes toutes les contradictions de l'identité ou des identités féminines.

Colette
Colette dans "Rêve d'Egypte'
Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Elle exerçait une fascination qui la rendait très intimidante aussi...

Oui, il y a cette histoire célèbre de Jean-Louis Bory qui vient de recevoir le prix Goncourt, (pour son livre Mon village à l'heure allemande en 1945 ndlr). Son éditeur l'envoie chez elle, auprès de "madame Colette", qui alors préside le jury Goncourt, pour la remercier en quelque sorte. Et il raconte, très drôlement d'ailleurs, après, qu'il a eu très très peur pendant tout l'entretien, parce qu'il avait peur que Colette le dévore. Et je pense qu'il y a chez Colette quelque chose de cet ordre, de cette dévoreuse de sens, dévoreuse d'hommes et de femmes, dévoreuse de sensations, de nourritures et de mots, et qui réussit à en faire la matière et cette patte formidable dans son œuvre.

Et puis il y a cette phrase d'elle qui résume tout et que vous citez dans votre livre : "Je ne suis pas orgueilleuse, je suis vivante" et elle va le prouver durant toute sa vie. Et le payer aussi puisqu'elle n'est pas admise à l'Académie Française, parce qu'on lui reprochait, notamment, d'avoir été sur scène...

Tout lui était interdit, mais elle n'a pas écouté les interdictions. "Je veux faire ce que je veux" écrit-elle dans Les Vrilles de la vigne. Et la force de Colette, c'est non seulement de le dire, mais de le faire. Et on est assez étonné, même encore aujourd'hui, quand on regarde tous les épisodes de la vie de Colette, de voir cette extraordinaire liberté. Quand on pense à sa relation avec Mathilde de Morny, Missy, il faut s'imaginer une Colette qui est séparée de son premier mari, donc qui est une femme seule, bientôt divorcée.
 

À l'époque, une femme seule, sauf si elle est veuve, c'est une prostituée, globalement. Donc elle vit en marge de la société.
Frédéric Maget
Colette et Missy
Colette et Missy dans "Rêves d'Egypte" (1907)
Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

À l'époque, une femme seule, sauf si elle est veuve, c'est une prostituée, globalement. Donc elle vit en marge de la société. On a des lettres dans nos archives qui le montrent, des gens qui tournent le dos à Colette après sa séparation avec Willy (son premier mari, ndlr) et elle décide de vivre avec Mathilde de Morny en couple. Elle se produit sur scène avec elle. Elles sortent ensemble, se montrent ensemble et elles se présentent véritablement comme un couple. Et cette crânerie de Colette, c'est ce côté frondeur d'être capable de dire "Mais je ne vois pas où est le problème, ça ne dérange personne mon bonheur. Je ne vois pas ce que vous avez à y redire." C'est quand même une force extraordinaire. Et ça, c'est vrai que cette force, elle a su la conserver jusqu'au bout.

Elle a toujours fait des choix et assumé ses choix publiquement. Elle ne regrettait rien. D'ailleurs, elle le dit à la fin de sa vie, peu de temps avant de mourir. Et si vous rêviez à quelque chose à la fin de votre vie?  Elle dit : premièrement, recommencer. Deuxièmement, recommencer. Troisièmement, recommencer. Elle a absolument aucune forme de regret. C'est une force qui va et elle avance. Et elle réussit à imposer sa liberté dans un monde qui n'est pourtant pas tout à fait prêt à l'accorder aux femmes et à Colette.

Dans votre livre, on découvre qu'elle est à l'origine de la carrière d'Audrey Hepburn. C'est un scoop, ça !

(Rires) Disons que beaucoup de gens l'ignorent ! On le sait par Audrey Hepburn elle même, qui n'en a jamais fait mystère puisqu'elle raconte que dans sa loge, tout au long de sa carrière, elle a toujours une photo que Colette lui avait dédicacée. Colette l'a rencontrée dans le hall de l'hôtel de Paris à Monte-Carlo. Là où il y a quelques scoops, c'est que j'ai pu dater précisément cette  rencontre, les conditions exactes de celle-ci et  l'enchaînement des faits.

Audrey Hepburn
Audrey Hepburn, en octobre 1951, quelques jours avant la première de Gigi à Broadway
collection Les Amis de Colette

Colette, à ce moment là est une femme âgée qui est entravée par l'arthrose puisqu'elle ne se déplace plus qu'en fauteuil roulant. C'est une vieille dame, qui n'a absolument rien perdu de sa sagacité et de sa perspicacité. Quand elle arrive dans le hall de cet hôtel, il y a un tournage en cours et elle aperçoit parmi les différents comédiens une jeune comédienne que personne ne connaît, qui a un rôle assez secondaire dans l'intrigue. Et donc elle est fascinée par cette jeune femme.

On ne peut pas dire ce qui se passe dans sa tête, moi j'ai essayé de le retranscrire en me basant sur sur des textes et des confidences de Colette, mais en tout cas, elle la voit, elle a une certitude que cette jeune femme, c'est Gigi  (nouvelle écrite par Colette en 1944 ). Et c'est là où on va retrouver la force de Colette : "Je fais ce que je veux et maintenant que je suis Colette, on fait ce que je veux aussi". Donc le producteur américain, bien sûr, n'en veut pas parce qu'Audrey Hepburn est absolument inconnue. Anita Lewis, qui est chargée de l'adaptation aux Etats-Unis, l'autrice de Les Hommes préfèrent les blondes, n'en veut pas non plus et il va falloir l'imposer. Et Colette le fait avec beaucoup de prescience et de certitudes.

Audrey Hepburn elle-même n'y croit pas ; elle ne se voit pas du tout en comédienne de théâtre, elle ne se sent pas les capacités. Il va falloir que Colette se batte aussi contre Audrey Hepburn et elle va si bien faire que la création au théâtre, le 24 novembre 1951, est un triomphe. La presse de l'époque est absolument dithyrambique et cela va lancer la carrière d'Audrey Hepburn et confirmer dans son choix Billy Wilder pour Vacances romaines. Ce qui m'a paru intéressant, c'est qu'en dehors de l'anecdote, c'est-à-dire repérer Audrey Hepburn, c'est ce que Colette pouvait avoir deviné dans le personnage d'Audrey, dans ce qu'elle incarnait physiquement, dans sa gestuelle, peut-être dans sa voix ? Qu'incarnait-elle qui paraissait si porteur aux yeux de Colette ? Il me semble qu'elle sent qu'Audrey Hepburn est l'incarnation de ces héroïnes libres, indépendantes, qui ne rentrent pas dans un moule, qui refusent des diktats, des codes convenus et qui s'imposent avec une grande simplicité et une formidable sincérité. Elle s'est dit sans doute que cette jeune femme était l'incarnation même des personnages qu'elle avait cherché à inventer depuis Claudine jusqu'à Gigi. Gigi étant finalement une petite sœur de Claudine. 

Colette
"Le voyage n'est nécessaire qu'aux imaginations courtes."
Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Et concernant Marilyn Monroe ?

Je connaissais cette anecdote de Miller qui disait qu'il n'avait jamais vu Marilyn Monroe ne lire qu'un seul livre en entier et qui était Chéri. On voit déjà tout le fond de méchanceté et de misogynie qui est derrière ça. Maintenant, on sait que ce n'est pas vrai, puisque les carnets intimes de Marilyn Monroe ont été publiés et ces carnets contiennent de très nombreuses notes de lecture. Donc on voit qu'elle avait lu beaucoup de ces ouvrages.

Mais ce qui est fascinant, c'est que bien après sa mort, lorsque toutes les archives qu'elle avait léguées à Lee Strasberg ont été vendues par Sotheby’s , on a vu apparaître à la fin de la vente un peu plus de 400 ouvrages, essentiellement de littérature et, parmi eux, beaucoup de littérature européenne. Et ce qui était frappant, c'est que dans toute cette liste, il n'y a que deux auteurs qui sont présents en plusieurs exemplaires. Et parmi ces deux auteurs, il y a Colette. Et on sait aussi dans cet inventaire que non seulement elle avait donc ces deux volumes d'œuvres de Colette, mais qu'en plus elle était allée jusqu'à acheter le livre de témoignage de Maurice Gouteket (le mari de Colette ndlr) Près de Colette. Donc peut-être pour en apprendre plus sur Colette elle même, sur sa vie. Je me suis demandé comment est-ce que Colette est arrivée entre les mains de Marilyn Monroe ? Comment est-ce que c'est possible puisque elles ne se sont pas rencontrées ? Il n'y avait aucune raison objective pour que ça ait lieu.

Donc j'ai essayé de trouver à travers différentes personnalités quels circuits le livre avait pu suivre pour arriver dans les mains de Marilyn Monroe. Et ensuite je me suis dit : prenons au sérieux la remarque de Miller : et si effectivement c'était le seul livre qu'elle avait lu en entier ? Pourquoi ? Pourquoi il cite particulièrement ce livre ? Et pourquoi elle aurait lu particulièrement ce livre en entier ? En quoi est-ce que Chéri et sans doute la fin de Chéri pouvait trouver des échos en elle ? Ça aussi, j'ai essayé d'y répondre dans ce texte.

Colette
"Mon Dieu ! Que la vieillesse est donc un meuble inconfortable !"
Colette, chez elle, dans son appartement du Palais Royal en 1954
Photo J. Niepce / Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Et puis, ce qui a attisé encore plus ma curiosité, ma fascination, c'est que l'un des biographes de Marilyn Monroe raconte que quelques mois, quelques semaines avant de se suicider, après avoir été renvoyée du tournage, elle retourne auprès de Lee Strasberg pour répéter des textes. Et la biographe dit (et c'est là que moi, je suis fasciné) que c'est un texte de Colette qu'ils répètent ensemble.

Je n'ai pas pu identifier de quel texte il s'agissait, mais ça prouve bien qu'elle avait, avec l'œuvre de Colette, un lien singulier, ou qu'en tout cas elle y trouvait quelque chose qui lui parlait particulièrement. Et une des explications (et là, je me sers de cette remarque de Catulle Mendès à propos de Claudine), c'est que finalement, Marilyn Monroe, c'est une sorte de Claudine incarnée. C'est à dire que Marilyn Monroe a inventé un type et, comme le dit Catulle Mendès, c'est une chance, mais c'est aussi une malédiction. Et ça, je pense qu'elle l'a retrouvé dans beaucoup d'œuvres de Colette, dans beaucoup de textes, dans le parcours même de Colette, et sans doute dans le destin tragique de Chéri, comme dans le portrait de Léa, l'héroïne du livre. A mon avis, elle s'identifie aux deux personnages. 

Colette
"Quand on est aimé, on ne doute de rien. Quand on aime, on doute de tout."
Gilbert René / Association des Amis de Colette, Saint-Sauveur-en-Puisaye

Vous pensez que Colette est une autrice "bienfaisante" ?

Il faut lire Colette. Il faut rappeler la femme extraordinaire qu'elle a été, le grand écrivain qu'elle est. Que ça se sache, que ça se dise et que peut-être aussi, chacune et chacun s'empare de ces textes pour en faire autre chose. Lire un texte n'est jamais innocent. Le lecteur, la lectrice apporte aussi au texte, à l'auteur, une part de sa lecture, de son émotion, de ses sensations et tout ça forme et rend vivant. Un auteur et une œuvre, c'est comme un grand champ. Une œuvre, ça se cultive, ça fleurit, ça refleurit parfois se fane et puis de nouveaux bourgeons apparaissent. Il est grand temps de réparer cette injustice, de rendre à Colette la place qui est la sienne, c'est à dire une des premières.