Israël : quand les immigrantes éthiopiennes étaient soumises à la contraception obligatoire

En décembre 2012, les Israéliens apprenaient, à l'occasion de la diffusion d'un reportage télévisé, que des femmes venues d'Ethiopie et appartenant à la communauté juive des Falashas, avaient été obligées de se soumettre à une contraception obligatoire et durable, pour avoir l'autorisation d'immigrer en terre promise. Un mois plus tard, en une sorte d'aveu sous-jacent, le ministère de la santé israélien demandait qu'aucune femme ne soit contrainte à la contraception.
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Israël : quand les immigrantes éthiopiennes étaient soumises à la contraception obligatoire
Immigrantes éthiopiennes arrivant en Israël - AFP
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Le quotidien Haaretz a qualifié l'affaire de crime inconcevable. Le scandale avait éclaté en décembre 2012, lorsque une chaîne de télévision israélienne avait diffusé un reportage sur la contraception obligatoire auxquelles étaient soumises les candidates à l'immigration en provenance d'Ethiopie. Depuis les années 80, et après de terribles famines dans ce pays africain, les membres de l'une des plus anciennes communautés juives ont été autorisées à immigrer en terre promise, mais sans jamais s'intégrer réellement, en raison d'une xénophobie tenace à l'égard de ces juifs noirs.

Des migrantes ont témoigné et ont affirmé qu'elles avaient été menacées de ne pas obtenir le droit d'émigrer en Israël si elles refusaient de se voir injecter des contraceptifs avant leur départ.
 
Témoignage, extrait du reportage diffusé dans l'émission Vacuum 
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L'Association pour les droits civiques en Israël ( ACRI) avait immédiatement exigé des explications au ministère de la Santé. La réaction officielle est venue le 28 janvier 2013 par une  lettre précisant que des contraceptifs ne devaient pas être prescrits sans le consentement explicite des patientes. Le ministère souligne que cette consigne "ne constitue pas une prise de position ni un constat des faits" à propos des cette contraception forcée. Le même ministère demande aux médecins "de ne pas renouveler les prescriptions pour les femmes d'origine éthiopienne ou d'autres femmes qui, pour toutes sortes de raisons, ne comprennent pas les implications de ce traitement. Il faut que tout cela soit évidemment fait de manière appropriée d'un point de vue culturel, par des intermédiaires éthiopiens ou des services de traduction médicaux".

Le porte-parole de l'ACRI, Marc Grey,estime que cette lettre constitue "l'aveu implicite que ce phénomène a bien existé. L'essentiel est désormais de s'assurer que les recommandations et les procédures prévues par la lettre soient appliquées afin que ce genre de pratiques cessent immédiatement". Selon des médias israéliens, le taux de natalité parmi les immigrants d'origine éthiopienne a baissé de 20% en une décennie.

Un racisme qui ne dit pas son nom

Pendant des siècles, les Falashas, juifs d'Ethiopie ont été pratiquement coupés des autres communautés juives. Les autorités religieuses juives en Israël ont longtemps hésité avant de les reconnaître comme juifs. Plus de 120.000 Juifs éthiopiens vivent aujourd'hui en Israël, dont 80.000 nés en Afrique. Dans les années 1980 et 1990, l'Etat hébreu a organisé deux opérations de rapatriement, permettant à 35.000 d'entre eux menacés par la famine de s'installer en Israël. Mais ces nouveaux venus ont dû affronter d'énormes différences culturelles et des discriminations au sein de la société israélienne, ainsi que le montre un très beau film, Va, vis et deviens de Radu Mihaileanu, en 2005.

Cet ostracisme contre certaines populations n'est pas nouveau : au début des années 50, des juifs venus du Kurdistan, doublement persécutés dans leurs régions d'origine comme juifs et comme kurdes, avaient décidé d'immigrer en Israël. Ils firent le voyage vêtus de leurs plus beaux atours. A leur atterrissage, on les conduisis dans des hangars, où ils furent passés au désinfectant. Cela ne les incita pas à s'intégrer immédiatement...
 
Bande annonce de Vas, vis et deviens