Nommée à la tête de la Banque centrale américaine, JanetYellen, 67 ans, devient la première femme à devenir ce que Barack Obama considère comme "l'un des plus importants dirigeants politiques au monde". Si c'est une première aux Etats-Unis, l'Amérique n'est pourtant pas une pionnière en la matière.
Ce ne fut pourtant pas une candidature au chemin jonchée de pétales de fleurs : "Yellen est clairement la personne la mieux placée pour cette fonction face à tout autre candidat, homme ou femme", devait réaffirmer sur son site la grande association de défense des droits des femmes NOW (National Organization for Women), appelant ses membres à écrire à Barack Obama pour la soutenir. Parce que ce ne fut pas facile. Une ancienne responsable de l'autorité de régulation bancaire FDIC, Sheila Bair, avait même dénoncé sur la chaîne CNBC "une horrible campagne de chuchotements" contre Mme Yelen teintée "d'arguments sexistes". Comme trop conscient de marcher sur des oeufs, le président Barack Obama avait commis un lapsus en évoquant les candidats au poste devant la presse cet été: "Monsieur Summers et Monsieur Yellen... euh, Madame Yellen", s'était-il repris. Née à Brooklyn, fille de médecin, cette femme menue au visage encadré d'un casque de cheveux blancs, est friande de tout ce qui touche à l'économie: "si vous passez une soirée à la maison, vous entendrez parler d'économie à table (...). Vous serez plus gavé de discussions économiques que vous n'en avez l'appétit", promettait-elle dans un entretien à l'antenne de Minneapolis (nord) de la Banque centrale en 1995 Janet Yellen, que le président Obama a choisi de nommer à la présidence de la Banque centrale américaine, comme nous l'avions annoncé au début du mois d'août dernier, est une économiste respectée, proche de l'élite économique progressiste, qui a passé un tiers de sa carrière à la Fed. En choisissant Mme Yellen, 67 ans, déjà numéro deux de la Fed, le président Obama nomme la première femme à présider la Réserve fédérale américaine, une institution qui a tout juste un siècle d'existence. Une "colombe", davantage préoccupée par la question du chômage Considérée comme une démocrate, Mme Yellen a passé plus de 12 ans au coeur de la politique monétaire américaine. Elle est plutôt vue au sein du Comité de politique monétaire (FOMC) comme une "colombe", davantage préoccupée par la question du chômage que par l'inflation. Cette passionnée d'économie, qui a épousé un économiste et dont le fils a aussi embrassé la profession, a méthodiquement grimpé les échelons de la Fed.
Portrait, en images, d'une économiste confirmée et démocrate
JT RTS, 9 octobre 2012
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Après cinq ans de professorat à l'université de Harvard, elle est entrée à la Réserve fédérale par la petite porte en 1977 au sein des effectifs de chercheurs économistes qui fournissent analyses et statistiques au directoire de la Banque centrale. Elle y restera deux ans. C'est là qu'elle rencontre son mari, George Akerlof, futur prix Nobel d'économie. Cette titulaire d'un doctorat d'économie a eu pour mentor à l'université de Yale (est) en 1971 James Tobin, prix Nobel d'économie en 1981 et connu pour son idée de taxe sur les transactions internationales. En 1980, Mme Yellen retourne dans l'enseignement à l'Université de Californie (ouest) à Berkeley, jusqu'à ce que le président démocrate Bill Clinton la choisisse pour être un des gouverneurs de la Fed en 1994. Au sein du FOMC, elle votera parfois contre les décisions du tout puissant président de la Fed, Alan Greenspan. En 1997, le président Clinton lui demande de prendre la tête du Cercle des conseillers économiques de la Maison Blanche jusqu'en 1999. A ce poste, elle succède à Joseph Stiglitz, économiste critique du libéralisme à outrance, qui partagera en 2001 le prix Nobel de l'économie avec son mari. En 2004, Mme Yellen revient à la Réserve fédérale où elle préside jusqu'en 2010 l'antenne régionale de San Francisco (Californie). Un ton trop professoral pour certains Certains lui reprocheront de n'avoir pas su tirer à l'époque la sonnette d'alarme sur la bulle immobilière dans une région qui couvre la Californie, le Nevada et l'Arizona, Etats qui allaient être au coeur du désastre des prêts à risque (subprime). "Avions-nous une compréhension totale des défaillances du système de titrisation et de la façon dont cela allait affecter le système financier dans son entier ? Non", a-t-elle reconnu plus tard devant une commission créée par les autorités pour comprendre la crise financière de 2008. Pourtant dès fin 2007, elle est l'une des premières au sein du FOMC à diagnostiquer, avec ce ton professoral que lui attribuent certains, que "les possibilités d'un étranglement du crédit et que l'économie glisse dans la récession sont des plus réelles". A l'été 2009, son nom est cité une première fois pour remplacer Ben Bernanke, nommé à la tête de la Réserve fédérale en 2006 par George W. Bush et finalement reconduit en 2010 pour un deuxième mandat par le président Obama. La même année, Janet Yellen accède à la vice-présidence du directoire de la Banque centrale pour quatre ans. A ce poste, elle sera un des meilleurs alliés de Ben Bernanke, soutenant sa politique exceptionnelle d'assouplissement monétaire. "Réduire le chômage doit être au centre de l'action", répète-t-elle.
La presse salue la nomination de la Janet Yellen des deux côtés de l'Atlantique
La finance, un monde fermement tenu par les hommes
09.10.2013
Malgré les études qui montrent que plus il y a de femmes à des postes, mieux se portent l'entreprise et la société qui l'entoure, les femmes qui dirigent des banques centrales se comptent sur les doigts des mains : selon le site CentralBankNews.info, tenu par l'ancien journaliste économique Peter Nielsen, quelque 14 femmes figurent parmi les quelque 180 présidents de banques centrales dans le monde. L'Argentine, la Russie ont ainsi déjà innové en nommant des femmes à la tête de la principale institution monétaire de leur pays, de même que plusieurs pays d'Afrique (du Cameroun au Botswana) et d'Amérique latine (Honduras, Salvador). Depuis 1978, une douzaine de femmes ont rejoint la Fed, soit comme gouverneur (huit), soit comme présidente d'une des douze banques de réserve régionale (cinq). Mais il ne reste actuellement parmi les femmes au sein de la Fed qu'Esther George, présidente de la Banque de Kansas City.