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La vague metoo n'en finit pas de déferler, et elle emporte aussi le monde du jeu vidéo en ligne. Depuis que la joueuse Maghla a fait part de son ras-le-bol dans un tweet, d'autres streameuses crient leur dégoût et dénoncent les menaces, les photos obscènes et le harcèlement auxquels elles font face depuis des années sur les réseaux.
Messages insultants, photomontages sur des corps d'actrices porno, scénarios sexuels autour de sa personne sur des forums... C'est dans un long témoignage publié sur le réseau social Twitter que Maghla, l'une des streameuses les plus suivies de France avec 700 000 abonnés sur la plateforme de diffusion Twitch, a mis en lumière l'enfer quotidien des créatrices de contenus en direct autour du jeu vidéo.
je suis fatiguée et il est temps que je vous explique.
— Maghlarnaque (@Maghla) October 24, 2022
Des années que je streame et j’ouvre ma gueule sur 10% max du problème, parce qu’apparemment faut ignorer pour que ça passe.
Maghla, connue comme toutes les streameuses par son pseudonyme, dénonce l'incessante sexualisation dont elle fait l'objet, s'obligeant même à surveiller son style vestimentaire pour ne pas s'exposer à des "commentaires".
j’ai pas attendu d’avoir des décolletés pour avoir une carrière, je suis h24 en oversize mais ça vous arracherait la gueule à certains de reconnaître que vous avez des soucis avec les meufs https://t.co/oEcEO7VNak
— Maghlarnaque (@Maghla) October 24, 2022
"Il y a des centaines de pages de gens qui se branlent sur mes photos et les postent. Littéralement. Également des montages encore et encore et les commentaires peuvent aller (à) du "je la viole" à "je vais la pénétrer cette chienne", etc... Le forum est alimenté tous les jours", révèle-t-elle encore.
je sors de live, je check de clips je vois ça
— Maghlarnaque (@Maghla) October 24, 2022
je vais vriller ??? pic.twitter.com/2zy61ppJSW
Son témoignage est fort, enrichi de nombreuses captures d'écran pour étayer son propos, et il a été partagé plus de 30 000 fois. C'est lui qui a libéré la parole, entraînant dans son sillage plusieurs autres streameuses et vidéastes françaises. Comme Shironamie et AvaMind, qui affirment avoir reçu des menaces de viol et de meurtre en live, extrait audio à l'appui.
Cette personne m’a contacté dans les mêmes circonstances aujourd’hui en live je l’ai également enregistré sur la fin de mon live au moment où il confirme me menacer de viol et chercher mon adresse. Un plainte va être déposé @Shironamie je t’invite à me contacter . https://t.co/TTb1RthR30
— AVA MIND || (@avamind_) October 24, 2022
Quant au témoignage de Trixy, il dénonce ouvertement le manque de soutien des forces de l'ordre : "Quand j'ai été voir la police pour porter plainte concrètement, malgré 300 screens (captures d'écran, ndlr) et des menaces de mort, c'était pas suffisant".
Début 2021, un pôle spécialisé pour lutter contre la haine en ligne a été créé au sein du parquet de Paris, tandis que le grand public peut signaler les comportements et contenus illicites sur la plateforme Pharos depuis 2009. Il faut dans tous les cas que la victime dépose plainte pour que les forces de l'ordre puissent agir. Ces moyens ont été renforcés régulièrement à mesure que le phénomène a pris de l’ampleur ces dernières années.
Sur YouTube comme sur Twitch et les autres plateformes, ce sujet n'est pas nouveau et beaucoup trop récurrent, déplorent les streameuses alors que la vague metoo a déjà cinq ans. "Ceux qui tombent des nues en apprenant ça alors que ça fait des années qu'on dénonce, vous (ne) mesurez vraiment pas l'ampleur des problèmes que nous causent les hommes (oui je l'ai dit) au quotidien", déplore Lixiviatio.
J'ai dû déménager à cause de harcèlement et de 'visites' à mon appartement ; j’ai développé des angoisses énormes et mes insomnies sont devenues redoutables.
BagheraJones, steameuse
"Et là, vous voyez que la pointe de l'iceberg, complète sa consoeur BagheraJones. Personnellement, j'ai dû déménager à cause de harcèlement et de 'visites' à mon appartement, j’ai développé des angoisses énormes et mes insomnies sont devenues redoutables".
Présents essentiellement sur Twitch, propriété du géant Amazon, les principaux streamers francophones sont des figures masculines comme Squeezie et ZeratoR, dont les chaînes ont connu des pics d'audience d'un million de spectateurs pour l'un et 700 000 spectateurs pour l'autre.
Signataire en juin du code de conduite de l'Union européenne contre la haine en ligne, Twitch avait annoncé, en décembre 2021, la mise en place d'un système pour détecter les utilisateurs malveillants, après une vague de harcèlement raciste et homophobe.
Le code de conduite de l'Union européennes contre la haine en ligne, lancé en 2016, compte une dizaine de signataires, dont Facebook, Microsoft, Twitter, YouTube, Instagram, Snapchat, Dailymotion, Jeuxvideo.com, TikTok, et LinkedIn, ou encore l'application de messagerie Viber.
Les signataires s'engagent à évaluer dans les 24 heures la majorité des contenus signalés par les utilisateurs comme des discours de haine en ligne, et à les supprimer si nécessaire, conformément à la législation nationale et européenne.
Le 1er novembre 2022, le ministre délégué à la transition numérique, Jean-Noël Barrot, inaugurait la Paris Games Week, le principal salon français du jeu vidéo.
La Paris Games Week 2022 est ouverte ! Le jeu vidéo est le 1er loisir des Français, c'est une industrie de pointe et une fierté nationale que le @gouvernementFR veut conforter : le crédit d'impôt sera prolongé et son barème modernisé. #PGW2022 pic.twitter.com/tpuwDmpuva
— Jean-Noël Barrot (@jnbarrot) November 1, 2022
A cette occasion, il a annoncé qu'il allait organiser "dans les prochains jours" une réunion entre les victimes de cyberharcèlement, responsables de l'industrie du jeu vidéo, plateformes de streaming et principaux réseaux sociaux. Avec la ministre déléguée à l'Égalité Femmes-Hommes, Isabelle Rome, "je souhaite que nous réunissions tous les acteurs concernés (...) dans les prochains jours" pour identifier "quelles peuvent être les bonnes solutions (afin de) faire cesser cette haine en ligne inacceptable", a-t-il promis.
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