Fil d'Ariane
Pour célébrer les premiers JO paritaires de l'histoire, rendons hommage à ces championnes, célèbres ou non, dont les noms méritent de s'écrire en lettres d'or dans la longue marche des femmes pour visibiliser le sport féminin dans l'olympisme.
L'athlète paralympique française Nantenin Keïta, au centre, tient la flamme olympique aux côtés du nageur français Florent Manaudou, à gauche, et du rappeur français Jul à Marseille, dans le sud de la France, le mercredi 8 mai 2024. L'odyssée se termine le 27 juillet à Paris. Les premiers jeux olympiques paritaires de l'histoire se dérouleront du 26 juillet au 11 août 2024.
Parce que les femmes se sont battues pour avoir une place dans le monde du sport, leurs victoires n’en sont que plus belles. En plus d’un siècle, elles ont bousculé le monde et nous entrainent jusqu'en 2024, dernier pas vers une parité historique aux Jeux Olympiques. Voici quelques-unes de ces héroïnes.
Relire JO et parité : un si long marathon
Impossible d'entamer cette galerie de portraits sans mentionner l'illustre et désormais connue Alice Milliat. Née en 1884, fille de commerçants nantais, Alice épouse Joseph Milliat en 1904 à Londres. Leur union ne dure que quatre ans, jusqu’à la mort de Joseph. C’est en Angleterre, où elle vécut jusqu'en 1908, qu’elle aurait découvert le foot et l’aviron.
Histoire de mesurer le chemin parcouru, réécoutez ici le discours d'un certain Pierre de Coubertin ...
À découvrir la série "Virago sportives" sur TV5MONDEplus. La série aux 2,5 millions de vues sur Youtube, présentée par Aude Gogny-Goubert, retrace le parcours de femmes oubliées de l’histoire. En vue des Jeux olympiques Paris 2024, Virago revient exclusivement sur TV5MONDEplus avec 10 épisodes dédiés à de grandes sportives qui ont toutes un point commun. Elles ont marqué l’histoire du sport : d'Alice Milliat, la pionnière, à Wilma Rudolph, coureuse afro-américaine surnommée "la gazelle noire" qui, malgré la poliomyélite, décrochera trois médailles d'or à Rome en 1960, sans oublier Lis Artel, la Danoise, première femme à remporter une médaille olympique en équitation, et toutes les autres !
Gertrude Ederle nait à New York le 23 octobre 1905 ; elle est la troisième de six enfants. A cinq ans, elle contracte la rubéole et la maladie la prive d’une partie de ses capacités auditives. Gertrude, surnommée Trudy, commence à s’entrainer à la Women’s Swimming Association (WSA) et entre en compétition à 14 ans.
Triple médaillée aux Jeux olympiques de Paris 1924, avec notamment un titre (relais 400 m nage libre), l’Américaine Gertrude Ederle devient deux ans plus tard, la première femme à traverser la Manche à la nage. Le 6 août 1926, elle réussit cette traversée en 14 heures et 39 minutes. Seuls cinq hommes ont alors réalisé l’exploit, et le meilleur temps réalisé étant de 16 heures et 33 minutes.
En 1928, la presse se déchaîne contre la gagnante du 800 m, l’Allemande Lina Radke, dont elle fustige le manque de féminité. Si Lina Radke bat le record du monde en 2:16:9, ce sont les signes évidents d'extrême fatigue affichés par les concurrentes suivantes qui vont faire la une des journaux. Le CIO et la presse déclarent le spectacle "affligeant" et soutiennent que la constitution des femmes est trop fragile pour de telles distances. Dans la foulée, le CIO interdit aux femmes les courses supérieures à 200 m.
Lina Radke
Dans la Revue Olympique de juillet 1997, on lit : "Le 800 mètres féminin se trouva placé au centre de la controverse de 1928. Les administrateurs, les membres du CIO et les médias avaient apparemment décidé une fois pour toutes que les femmes étaient trop fragiles pour courir une distance aussi longue. C’est ce qui explique que les comptes rendus des Jeux de 1928 aient non seulement dénaturé les résultats de cette course, mais que certains aient été jusqu’à en falsifier le déroulement réel à seule fin de justifier le point de vue des opposants. La conséquence malheureuse a été la suppression de cette épreuve du programme olympique jusqu’en 1960."
Lina Radke est la première championne olympique du 800 m à Amsterdam en 1928, ici sur la ligne d'arrivée.
Lina Radke est donc la première championne olympique allemande en athlétisme, et la seule médaillée d'or du double tour de piste. Ce n'est qu'en 1960, à Rome, que l'épreuve féminine du 800 m fera son retour aux JO.
Alice Coachman venait d’un milieu modeste de Géorgie et ses ambitions sportives ne bénéficièrent que d’un piètre soutien parental, d’autant que la ségrégation qui sévissait aux États-Unis lui restreignait l’accès aux installations d’entraînement de haute qualité. Sans se décourager, elle ne compta que sur elle-même pour développer sa force et sa technique. Seule la compétition la passionnait, et c’est ainsi qu’elle se servit d’une corde et de deux piquets pour s’entraîner au saut en hauteur, tout en développant son ardeur en courant pieds nus sur de mauvaises routes pierreuses et poussiéreuses.
Son sport était le saut en hauteur, mais elle présentait des talents dans nombre d’autres épreuves. Elle décrocha des titres nationaux dans le 50 m, le 100 m et le relais 400 m. Elle était par ailleurs très bonne joueuse de basketball. Néanmoins, elle excellait avant tout en saut en hauteur, comme en témoigne le titre national de cette discipline qu’elle conserva dix ans d’affilée, jusqu’en 1948.
Réticente, dans un premier temps, à l’idée de concourir aux Jeux olympiques, elle accepta finalement de se présenter et balaya rapidement le record national de saut en hauteur. C’est lors de ces Jeux d’après-guerre, en 1948, que cette sauteuse en hauteur américaine devient la première femme noire de l’histoire des Jeux à obtenir l’or olympique. Quatre ans plus tard, elle devait signer un contrat avec Coca-Cola, ce qui fit d’elle la première athlète féminine noire à représenter un produit de consommation à l’international.
Cette athlète mexicaine, qui pratique la course de haies, fut la première femme à brandir la torche olympique pour enflammer la vasque. Son rôle lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux de Mexico, en 1948, a fait d'elle une icône planétaire du jour au lendemain. Elle a reçu la torche des mains d'un jeune militaire, à l'entrée du stade olympique. Sous les acclamations de 100 000 spectateurs en délire et de l'ensemble des athlètes réunis pour la cérémonie, elle a ensuite franchi les portes de l'arène.
Dès ses débuts, Nadia Comaneci est clairement un prodige. Elle dispute ses premiers championnats nationaux à 8 ans à peine, et se classe 13e. Cinq années s'écoulent et on la retrouve qui monopolise quasiment tous les titres aux Championnats d’Europe de 1975 en Norvège. Elle s’envole donc pour les Jeux de Montréal en tant que favorite.
À quatorze ans, la jeune gymnaste roumaine enflamme le public de Montréal avec cinq médailles, dont trois en or, et surtout la note parfaite de 10, note qu’elle obtiendra à six autres reprises.
Mais le conte de fées qui fait rêver les petites filles du monde entier dissimule une réalité tragique : Nadia et son entraîneur Béla Károlyi, qui a forgé d'une main de fer, depuis sa plus tendre enfance, cette athlète sans égale, deviennent des figures clés de la propagande des Ceausescu : manipulées, instrumentalisées, mais aussi étroitement surveillées par le régime. Ce documentaire diffusé sur ARTE retrace l'extraordinaire destin de la plus célèbre gymnaste du monde, depuis ses premiers pas sur la poutre, jusqu’à sa demande d'asile aux États-Unis, quelques semaines avant la chute du régime et l'exécution du couple Ceausescu.
Née le 15 avril 1962 à Casablanca, cette athlète marocaine a commencé sa carrière sportive en 1978. En 1980, son entraîneur lui conseille de se présenter aux 400 mètres haies, et c'est dans cette discipline qu'elle remporte le championnat d'Afrique. Elle rafle la médaille d'or aux jeux méditerranéens de 1983 ; la même année, elle se rend aux Etats-Unis pour suivre des études en éducation physique.
En 1984, elle entre dans l'histoire : elle est la première femme arabe, africaine et musulmane à remporter une médaille d'or aux Jeux olympiques de Los Angeles, pulvérisant en même temps le record d'Afrique des 400 m haies en 54 sec 61.
Elle a entamé en 1989 une carrière d'entraîneure après avoir obtenu un diplôme d'éducation physique de l'université américaine de l'Iowa. Elle sera ensuite nommée ministre de la Jeunesse et des Sports de son pays, puis vice-présidente du Comité international olympique et présidente de la Commission de coordination des JO de Rio 2016.
On aurait pu croire que la carrière de Neroli Fairhall était terminée lorsqu'elle se retrouva paralysée des membres inférieurs à la suite d'un accident de moto. Sans se laisser décourager, elle se mit au tir à l'arc, concourant assise dans une chaise roulante. L’archère néo-zélandaise est la première sportive paraplégique à se qualifier pour les Jeux paralympiques, puis aux Jeux olympiques.
En 1980, elle devient championne paralympique de tir à l’arc. Quatre ans plus tard, elle participe aux épreuves olympiques des valides en tir à l’arc. Lorsqu'on lui demande s'il y a un avantage à tirer en position assise, elle répond : "Je ne sais pas. Je n'ai jamais tiré debout."
En 1991, l'Algérienne Hassiba Boulmerka remportait une fabuleuse - mais ô combien dérangeante - victoire aux 1500 m aux Championnats du monde d'athlétisme au Japon. A son retour à Alger, elle fut accueillie en héroïne nationale. Avant de partir pour les JO de Barcelone, en 1992, Hassiba Boulmerka reçoit des menaces de mort. Débardeur et short vert comme l’espoir, cheveux longs bruns et frisés, Hassiba Boulmerka franchit la ligne d’arrivée et réussi à remporter l'or sur 1500m, malgré les pressions du FIS islamique.
Hassiba Boulmerka est croyante et pratiquante mais elle refuse de porter le voile. Elle est forcée à l’exil et sa famille est menacée. Elle déclare qu’il "ne lui viendrait pas à l’idée d’entrer dans une mosquée en short, mais que sur une piste d’athlétisme, elle respecte les règles".
Cette jeune Aborigène remporta sa première médaille d’or à huit ans aux Championnats scolaires d’athlétisme. En 1993, Cathy Freeman fut éliminée en demi-finale des Championnats du monde. Dans l’avion de retour, elle inscrivit sur une poche contre le mal de l’air son objectif pour le 400m des Jeux de 1996 : "48,60 ATLANTA". En fait, elle le courut en 48,63. Ce qui lui valut sa médaille d’argent et fit d’elle la première Aborigène à gagner une médaille dans une épreuve individuelle. En tant qu’Aborigène, elle est considérée comme un modèle par son peuple et également jugée par beaucoup comme un symbole national de réconciliation entre Australiens indigènes et non-indigènes.
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