Et les droits humains ? Cette attitude volontariste séduit l'ensemble des associations féministes françaises et afghanes présentes ce jour-là. Patricia Lalonde salue ce "pays à 80% musulmans, laïc, qui a une vraie politique et une stratégie en matière des droits des femmes". Elle ajoute : "On a été tout à fait étonnées. D'ailleurs, vous arrivez là-bas, vous n'avez pas une seule femme voilée", tout en précisant avant cela, que ce pays, à majorité chiite, est frontalier de l'Iran, aujourd'hui au ban de la communauté internationale pour sa théocratie et le voile imposé aux Iraniennes, et dont pourtant le taux d'éducation supérieure des filles est l'un des plus élevés au monde. Ce voile quasi-inexistant dans l'espace public fait donc oublier les nombreuses atteintes aux droits humains en Azerbaïdjan. La dernière en date :
l'arrestation le 30 juillet à Bakou de Leyla Yunus, militante azéri des droits humains et opposante historique du clan Aliev, au pouvoir depuis plus de vingt ans. Aucune des féministes venues à la conférence n'a évoqué ce cas. Pourtant, les droits des femmes entrent dans la catégorie des droits humains. Omission volontaire ou simple oubli ? Quand l'exemple de Leyla Yunus est mentionné à Patricia Lalonde, elle répond en cherchant ses mots : "Notre voyage en Azerbaïdjan n'a duré que cinq jours. On avait posé la question, mais c'est leurs histoires. En fait, quand j'y étais, on n'était pas au courant au sujet de cette femme (Leyla Yunus). Nous ne sommes pas allées faire un état de lieux des droits de l'Homme mais des droits des femmes. Et puis, justement c'est important que l'on parle des pays musulmans qui font des efforts pour les droits des femmes … En fait, ils sont engagés dans une lutte terrible contre l'extrémisme islamiste. C'est en filigrane tout ça. Je ne sais pas trop qui sont les gens qu'ils arrêtent. Je veux dire, ils (les membres du gouvernement azéris) luttent contre ça, ils luttent pour ne pas que ça devienne …", dit-elle en hésitant, sans finir ses phrases. Paraître moderne Ce soutien à des Etats, quels qu'ils soient, qui mènent des actions pour les droits des femmes, divise les féministes. Car, cet appui se dirige, dans les pays musulmans en particulier en ce moment, vers des "dictatures" ou des régimes autoritaires, tel l'Azerbaïdjan.
Un article de Foreign Policy met justement en garde contre ces pays qui se targuent d'un "féminisme d'Etat". Le but est d'attirer la sympathie de la presse occidentale. Parmi eux : la Syrie, le Bahreïn, la Jordanie, le Qatar, le Maroc ou encore la Tunisie sous Ben Ali, l'Egypte sous Hosni Moubarak et l'Iran au temps du Shah Mohammad Reza Pahlavi. Ces pays ont mis en avant une laïcité et leurs efforts en matière d'éducation des filles par exemple. Pour symboliser cette modernité laïque, rien de mieux qu'une première dame ou une ministre dévoilée ou presque : Asma el-Assad en Syrie, Rania de Jordanie, la princesse Lalla Salma du Maroc ou encore la ministre de l'Information au Bahreïn, Sameera Rajab.