« Une honte à notre humanité » « Cette triste réalité fait honte à notre humanité ». Ces mots, le Dr Mukwege les expriment d’une voix émue, tremblante, comme accablée par les horreurs dont il est témoin dans son pays natal, la République démocratique du Congo. Là bas, les femmes sont abusées au nom d’une guerre de territoire, dans le riche Nord Est du pays, un conflit sans fin malgré les prémices d'un accord de paix en cet automne 2013. Ce 21 novembre 2013, au musée du quai Branly (dédié aux arts premiers et voulu par le président Chirac), le Dr Mukwege fait face à une salle comble. Parmi les 400 personnes présentes, un parterre de personnalités politiques et diplomatiques : des ambassadeurs, des anciens ministre français des Affaires étrangères, l’ancien président Jacques Chirac, et l'actuel locataire de l'Elysée, François Hollande. Tous connaissent et saluent l’action de ce médecin. Depuis une quinzaine d’années, le Dr Denis Mukwege, a soigné, avec l’aide de son entourage, près de 40.000 femmes violées. Des enfants issu-e-s de viol, à leur tour violé-e-s « Derrières les chiffres il faut voir la personne. C’est une femme qui est stigmatisée, exclue, avec des lésions physiques et psychologiques » tonne-t-il. La cause de ces souffrances ? Une guerre qui dure depuis trop longtemps, où les guerriers utilisent le corps des femmes comme armes et prises de guerre. Dans la salle personne ne peut cacher son émotion quand un reportage projeté dans l'auditorium évoque le viol d’une enfant, une fillette de 5 ans, elle-même née d’un viol. Il s’agit de la deuxième génération de victimes. Tous les jours, 40 victimes et un seul hôpital. Toutes ne peuvent pas être soignées, précise-t-il. La récompense française permet au gynécologue de lancer un nouveau message d’alerte. Un appel à l’aide auprès de la France Dans son discours, le docteur Denis Mukwege, affecté mais lucide, demande clairement l’aide de la France, « un pays membre du conseil de sécurité de l’ONU et écouté à travers le monde ». Le président François Hollande est assis face à lui avant de clore l’événement par un discours où il réaffirmé le rôle de la France en Afrique, évoquant le Mali ou encore la Centrafrique. « C’est un prix qui, à la fois, alerte la communauté internationale sur la gravité des violences qui se passent, notamment au Kivu, à l’Est du Congo, mais qui aussi nous oblige à agir » a-t-il déclaré. « Il y a une lueur d’espoir, mais pas encore de paix » finit par confier M. Mukwege à Terriennes, évoquant la récente reddition des rebelles du M23 après la cérémonie, lorsque tout le monde a quitté le théâtre. Et il ajoute : « Avec ce prix, ces femmes ont le sentiment que leur cri est entendu »