Toutes les mesures visant à accroître la promotion des femmes au sein des entreprises doivent être maintenues et, surtout, systématiquement appliquées, selon le dernier rapport du cabinet d'étude McKinsey. Mais le plus important, c'est de travailler sur la psychologie des hommes.
Le constat a quelque chose de désespérant : depuis que le cabinet d'étude McKinsey se penche sur la représentation des femmes dans le monde de l'entreprise - plusieurs années maintenant - les choses ne semblent pas réellement progresser. Selon la dernière livraison de Women Matter, rendue publique par McKinsey au Women's Forum qui se tenait à Deauville du 16 au 18 octobre, les femmes restent encore largement sous-représentées au sommet des grandes entreprises. Elles ne sont que 17% à siéger dans les conseils d'administration au Royaume Uni et 6% au Brésil en 2013, par exemple. Pis, ces chiffres ont tendance à stagner, voire à reculer d'une année sur l'autre....
Enfin, si les femmes semblent faire des progrès lorsque des lois contraignent les entreprises à agir, pour féminiser les conseils d'administration, elles doivent se contenter de performances bien médiocres dès que les entreprises sont libres de faire comme bon leur semble. Ainsi, les Norvégiennes ne sont que 14% à siéger dans les comités exécutifs, contre 34% dans les conseils d'administration, tandis que les Françaises sont 9% dans les comités, mais 27% dans les conseils. Dans les deux pays, un dispositif opère en faveur des administratrices.
La culture contre la nature
Autant dire que “les choses ne changent pas naturellement”, déclare Sandra Sancier-Sultan, directrice chez McKinsey, même si l'étude Women Matter 2013 a prouvé que les femmes interviewées ont le même degré d'ambition que les hommes dans leur vie professionnelle.
Si cette spécialiste insiste pour que les contraintes, de même que les nombreuses politiques visant à promouvoir les femmes et librement adoptées par les entreprises soient réellement appliquées sur le terrain, l'étude qu'elle a dirigée met l'accent sur un autre handicap, autrement plus difficile à lever, celui de l'état d'esprit des hommes. Quand il s'agit de diversité, ces derniers ont tendance à traîner des pieds. Un tiers d'entre eux ne reconnaissent pas les difficultés spécifiques que rencontrent les femmes sur leur chemin vers le sommet. Dans ces conditions, il ne faut pas s'attendre à ce qu'ils appuient des mesures spéciales en faveur des femmes. Certains considèrent ces mesures parfaitement injustes, d'ailleurs.
En finir avec l'autoritarisme
Faut-il donc offrir des séances de coaching, voire de psychanalyse à tous les managers réfractaires à la progression des femmes ? Sandra Sancier-Sultan penche pour un changement de culture collective plutôt qu'individuelle dans l'entreprise. Il faut que l'exemple vienne du haut, dit-elle, et que le grand patron (souvent un homme, évidemment) s'engage délibérément, clairement et sans ambiguïté en faveur de la promotion des femmes, et que ce soutien soit effectivement relayé par les managers.
Plus difficile encore, il faut, indique l'étude McKinsey, que les entreprises revoient leur fonctionnement. Le modèle du manager autoritaire, toujours disponible, à n'importe quelle heure et n'importe où, doit céder la place à un autre système, qui serait plus favorable aux femmes. Une vraie révolution culturelle en somme...
Lysiane J.Baudu
Ancienne grand reporter à La Tribune, Lysiane J. Baudu a rencontré, pendant ses 20 ans de journalisme international, des femmes du monde entier.
Ces "rencontres" feront l'objet de billets, qui lui permettront de faire partager ses impressions, ses analyses, son ressenti au contact de ces femmes, dont l'action professionnelle fait sens pour toutes les autres, de même que pour la société.