Rewaz Fayaq was elected as the new #Kurdistan Parliament Speaker during a parliamentary voting on Thursday.
— Al Shahid News (@AlShahidNews) July 12, 2019
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Avec Talabani, l’homme qui croyait aux femmes
Rewaz Faiq est née à Kalar, en 1977, sous le régime de Saddam Hussein. Elle a 15 ans lors de la répression brutale des forces du gouvernement au Kurdistan. Elle rejoint alors l'opposition communiste, puis passe à l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) dirigée, à l'époque, par le défunt président de la République irakienne Jalal Talabani. Lui, dont la femme Hero a longtemps été impliquée dans les affaires du parti, "croyait vraiment aux femmes et à leurs capacités, se souvient Rewaz Faiq, mais aujourd'hui, déplore-t-elle, "alors même que la société est plus ouverte et tolérante sur la question de la participation des femmes en politique, l'UPK a moins de femmes politiciennes".Domination, discrimination, abus sexuel
Car dans cette société du nord de l'Irak, où elles sont bannies des funérailles et des conseils tribaux, les femmes n'ont pas ces espaces pour se faire connaître ou s'imposer. Ni même pour tenter de faire changer les coutumes tribales qui, aujourd'hui encore, tuent des femmes et des jeunes filles, entre crimes dits "d'honneur" et suicides de celles qui sont à bout.Au Kurdistan, entrer en politique n’est pas facile pour une femme : tous les partis "sont minés par la domination masculine, la discrimination et les abus sexuel, assure Rewaz Faik. Une femme, si elle n’est pas assez forte et ne se protège pas, risque de tomber dans le piège des gains personnels et politiques des hommes politiques", poursuit Rewaz Faiq. Docteure en droit, elle-même a été, avant d'entrer en politique, à la tête de la faculté de droit de l'Institut technique de Slemani. Elle fut également enquêtrice juridique, puis juge assistante au tribunal de Darbandikhan.
Une femme au milieu d’hommes
En Irak où hommes politiques et groupes armés vont souvent main dans la main, cette mère de deux garçons, aujourd'hui jeunes adultes, dit refuser "d'être entourée d'hommes en armes". Et face à ceux qu'elle appelle les "faux politiciens", Rewaz Faiq ne mâche pas ses mots : des figures uniquement médiatiques, selon elle, dans un pays où tous les organes de presse ou presque sont affiliés à des partis.
C'est une vraie cheffe qui a donné de l'espoir à toutes les femmes du Kurdistan.
Avan Jaff
Ses positions hétérodoxes lui ont valu l'isolement au sein même de son parti. "Je me sens seule depuis un an et demi”, déclare-t-elle, ajoutant qu’elle a été prise à partie sur les réseaux sociaux par des personnalités de l'UPK. "Au début, cette solitude m'a fait peur, mais aujourd'hui, elle me rend plus forte", assure celle qui a présidé au Parlement le vote de lois censées endiguer les principaux fléaux du Kurdistan irakien, notamment la contrebande d'hydrocarbures et la drogue.
Au cours de la quatrième législature du Parlement du Kurdistan, Rewaz Faiq a été rapporteur de la commission parlementaire de l'éducation et de l'enseignement supérieur (2013 - 2018) et membre de la commission de l'industrie, de l'énergie et des ressources naturelles (2013 - 2017). Elle a également été membre du comité législatif, de 2017 à 2018.
I was delighted to receive a team from #UNITAD today to discuss a proposed parliamentary bill to establish a special criminal court in the Kurdistan Region to prosecute crimes committed by #ISIS. We also spoke about the need for international support to the court and Kurdistan. pic.twitter.com/pHHcD2bCji
— Dr.Rewaz Faiaq (@Rewaz_faiaq) May 31, 2021
Changer la perception de la politique kurde
Pour la militante des droits des femmes Avan Jaff, Rewaz Faiq est au Kurdistan ce que Benazir Bhutto a été au Pakistan (en 1988, Benazir Bhutto fut la première femme à diriger un pays musulman) : "Elle a changé la perception de la politique kurde... Elle a confiance en elle et elle a du charisme. C'est une vraie cheffe qui a donné de l'espoir à toutes les femmes du Kurdistan ", assure Avan Jaff.
La preuve ? Fin mars 2021, un député d'opposition lui a lancé sa chaussure au visage, alors qu'elle présidait une séance au Parlement. "Ca a été diffusé en direct à la télévision mais elle n'a pas perdu son calme une seconde", assure Avan Jaff.
— Hiwa Rwandzi (@RwandziHiwa) March 31, 2021
La réaction de Rewaz Faiq à cet incident n'a pas manqué d'étonner dans un pays où élus, militants ou internautes sont régulièrement inquiétés pour avoir critiqué des politiciens. "Si vous me visiez moi, je vous pardonne, en revanche, si vous visiez le Parlement, je ne peux pas vous excuser", a-t-elle affirmé publiquement
Toujours pas assez
Mais pour Mourad Abdallah, infirmier kurde trentenaire, Rewaz Faiq n'en fait pas assez sur la question sociale dans une région régulièrement secouée par des manifestations contre la vie chère et la corruption. "Tous les mois, le gouvernement ampute nos payes et ni madame Faiq ni le Parlement ne remettent ça en question", s'emporte-t-il. Une question majeure au Kurdistan, où deux foyers sur trois vivent d'un salaire ou d'une pension de l'Etat.
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