Fil d'Ariane
800 000 vies d'enfants chaque année dans le monde
Un allaitement prolongé pourrait donc sauver la vie de plus de 800.000 bébés chaque année tout en faisant économiser des milliards de dollars aux systèmes de santé à l'échelle planétaire grâce à son rôle de protection contre certaines maladies infantiles, selon une série d’articles scientifiques publiées vendredi 29 janvier 2016.
"Seul un enfant sur cinq est allaité jusqu'à ses douze mois dans les pays riches tandis que seul un enfant sur trois est allaité exclusivement les six premiers mois de son existence dans les pays à revenus faibles ou moyens", indique la revue médicale britannique The Lancet qui consacre tout son numéro de janvier à l'allaitement maternel.
Ce sont par conséquent des millions d'enfants qui ne bénéficient pas pleinement des bienfaits du lait maternel, constatent les chercheurs.
Les chercheurs ont par ailleurs calculé qu'en portant à 90% le taux d'allaitement exclusif jusqu'à six mois aux Etats-Unis, en Chine et au Brésil et à 45% au Royaume-Uni, cela permettrait de diminuer les coûts de traitements des maladies infantiles courantes telles que la pneumonie, la diarrhée ou l'asthme.
Grâce à l'allaitement "une économie pour le système de santé d'au moins 2,45 milliards de dollars aux Etats-Unis, de 29,5 millions au Royaume-Uni, de 223,6 millions en Chine et de 6 millions au Brésil" serait réalisable.
Dans les pays riches, le Royaume-Uni, l'Irlande et le Danemark ont les taux d'allaitement à douze mois les plus faibles du monde (respectivement inférieur à 1%; 2%; 3%).
Sur la base d'une étude précédente, publiée en mars 2015, qui soutenait qu'un allaitement contribue à une intelligence accrue, une scolarité plus longue et donc de meilleurs revenus à l'âge adulte, ils estiment que la faiblesse de l'allaitement a représenté une perte de 302 milliards de dollars (0,49% du PIB mondial) en 2012.
Les scientifiques déplorent par ailleurs des publicités agressives en faveur des laits de substitution qui sapent, selon eux, les efforts des autorités pour promouvoir l'allaitement maternel. "La saturation des marchés des pays riches a conduit les industriels à pénétrer rapidement les marchés émergents", ajoutent-ils. "Les ventes mondiales de lait (de substitution) se sont accrues en valeur passant de deux milliards de dollars en 1987 à 40 milliards environ en 2014".
Selon eux, les pays sont pourtant en mesure d'améliorer considérablement la pratique de l'allaitement. A titre d'exemple, au Brésil, la durée d'allaitement est passée de 2,5 mois dans les années 1974-1975 à 14 mois en 2006-2007 grâce à une politique proactive des services de santé et de larges campagnes d'information.
Reste une question majeure : comment concilier vie professionnelle et allaitement ? Est-ce seulement compatible ? Et les femmes ne risquent-elles pas de vivre de sérieux coups de frein à leurs ambitions de carrière ? On attend les propositions....
Trop de pression sur les femmes
En France, certaines estiment que trop de pression pèsent sur les femmes, et que les forcer à allaiter peut être culpabilisant. La gynécologue obstréticienne Odile Buisson, interrogée par nos confrères de France 3, trouve que les femmes sont trop malmenées par ces injonctions et qu'il est urgent de les laisser tranquilles. En revanche Emilie Michaut, enseignante, appartient à un club qui promeut l'allaitement des nourrissons, même si, dit-elle, "ce n'est pas forcément la potion magique". Elle a réussi, grâce à un directeur d'établissement accueillant, "un père" commente-t-elle, à concilier son métier et les nécessités de l'allaitement. Pas si simple pour beaucoup d'autres...