Le foot espagnol en crise après le maintien de son patron

Après le refus de démissionner de Luis Rubiales, patron de la fédération de foot espagnole, vendredi, les joueuses de la sélection ont pris fait et cause pour Jenni Hermoso et annoncé qu'elles ne joueraient plus avec la Roja si la direction actuelle était maintenue.

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Luis Rubiales

Le président de la Fédération espagnole de football, Luis Rubiales contraint à la démission après avoir embrassé de force une joueuse après la victoire de l'Espagne en finale du Mondial de football féminin.

© AP/Paul White
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Ce qui est déjà surnommé le "#MeToo du football espagnol", après l'agression  sexuelle de la N.10 Jenni Hermoso par Luis Rubiales lors de la remise des médailles à Sydney, a connu un ultime rebondissement vendredi soir avec l'annonce d'une grève de l'équipe nationale féminine.


Les 23 joueuses de l'équipe nationale d'Espagne, sacrée championne du monde dimanche en Australie, ont annoncé dans un communiqué du syndicat Futpro qu'elles refusaient de rejouer avec la Roja "si les dirigeants actuels [étaient] maintenus". Le texte, déjà signé par 81 joueuses, reste ouvert à d'autres signatures, a précisé le syndicat.

Je ne tolère pas qu'on mette en doute ma parole et encore moins que l'on invente des propos que je n'ai pas dits Jenni Hermoso, N.10 de l'équipe féminine de football espagnol

Dans le même communiqué, Jenni Hermoso a indiqué qu'elle n'avait "à aucun moment consenti" au baiser que lui a donné Luis Rubiales : "Je ne tolère pas qu'on mette en doute ma parole et encore moins que l'on invente des propos que je n'ai pas dits" a-t-elle ajouté, en référence à un communiqué de la Fédération minimisant l'agression.

Dans ce texte, la Fédération assurait que pour la joueuse, ce baiser était « un geste mutuel totalement spontané en raison de l’immense joie que procure la victoire en Coupe du monde ». Une information démentie d'abord par le média espagnol Relevo, puis par la joueuse elle-même.

"Ça suffit !"

De quoi démonter totalement la défense de Luis Rubiales, qui a refusé de démissionner de son poste quelques heures plus tôt devant l'assemblée générale extraordinaire de la Fédération royale espagnole de football (RFEF) réunie près de Madrid.

En poste depuis 2018, l'ancien défenseur s'est lancé dans une contre-attaque, affirmant que le baiser était, selon lui, "réciproque" et "consenti" et qu'il avait obtenu la permission de le faire, tout en fustigeant le "faux féminisme".

(Re)voir → Baiser forcé : le patron du foot espagnol Luis Rubiales refuse de partir

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Père de trois filles, M. Rubiales a en revanche demandé "pardon à la reine" Letizia pour son geste sur le balcon du stade de Sydney, lorsqu'il avait empoigné ses parties génitales, alors qu'il se trouvait à moins de deux mètres d'elle.

"Ce que nous avons vu aujourd'hui à l'Assemblée de la fédération est inacceptable (...). Ç'en est fini de l'impunité des actes machistes. Rubiales ne peut rester à son poste", a réagi immédiatement Mme Díaz sur X (ex-Twitter), exigeant des "mesures urgentes" du gouvernement.

Par respect pour le football. Ça suffit ! Il est temps que ça change pour de bon Ligue de football professionnelle féminine espagnol

Depuis cette annonce fracassante, de nombreuses voix s'élèvent pour condamner l'attitude de M. Rubiales, à l'instar de la footballeuse du FC Barcelone Alexia Putellas, double Ballon d'Or. "C'est inacceptable. Finissons-en. Je suis avec toi chère Jenni Hermoso", a-t-elle déclaré sur X.

Mondial 2030

D'autres joueuses espagnoles sont sorties du silence, dénonçant un comportement "intolérable" et apportant leur soutien à Hermoso, tandis que le hashtag "#SeAcabo" (C'est terminé) commençait à émerger sur les réseaux. "Par respect pour le football. Ça suffit ! Il est temps que ça change pour de bon", a écrit sur X la ligue de football professionnelle féminine.


Pour sa part, l'ancien gardien du Real Madrid et de la "Roja" Iker Casillas a parlé de "honte totale" à propos de Rubiales tandis que l'attaquant du Betis Borja Iglesias a annoncé qu'il ne porterait plus le maillot de l'équipe nationale.

Même certains clubs se sont indignés, comme l'Espanyol Barcelone  qui a dit attendre "des mesures" de la part de la fédération ou encore le Séville FC qui estime "ne pas se sentir représenté" par le patron du foot espagnol et demande sa démission.

La liste des femmes et des hommes offensés ces dernières années par Luis Rubiales est trop longue, cela doit cesser Javier Tebas, président de LaLiga

Le Barça, ancien club d'Hermoso, a lancé une condamnation en demi-teinte, déplorant des "faits regrettables" et injustifiables. Le club catalan note cependant que "M. Rubiales lui-même a reconnu une erreur et s'en est excusé".

L'affaire a éclaté alors que l'Espagne est candidate, avec le Portugal et le Maroc, à l'organisation du Mondial masculin de 2030, qui sera attribuée à la fin de l'année prochaine.

Tribunal administratif

M. Rubiales avait été filmé pendant la célébration de la victoire de la "Roja" féminine sur l'Angleterre lors de la finale du Mondial, embrassant sur la bouche par surprise Jenni Hermoso.

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Il avait présenté lundi des excuses, expliquant qu'il s'agissait d'un geste "sans aucune mauvaise intention". Mais les condamnations de la classe politique espagnole, dont le Premier ministre Pedro Sánchez, et des milieux du football, dont la célèbre joueuse américaine Megan Rapinoe, n'ont fait que s'amplifier.

L'affaire est finalement remontée jusqu'à la Fifa, qui a lancé jeudi une procédure disciplinaire à l'encontre de M. Rubiales. Le président de LaLiga, Javier Tebas, a sévèrement attaqué son homologue vendredi : "La liste des femmes et des hommes offensés ces dernières années par Luis Rubiales est trop longue, cela doit cesser".

Le Conseil supérieur des Sports, un organisme gouvernemental, a annoncé qu'il allait porter l'affaire devant le Tribunal administratif des Sports dans les prochains jours.

Si le tribunal concluait que ce baiser est une faute selon le code du sport professionnel, le Conseil supérieur des sports, un organisme d'Etat, pourrait alors suspendre M. Rubiales de ses fonctions. Embrasser quelqu'un sans son consentement est considéré en Espagne comme une agression sexuelle.