Le G7 face à l'enjeu de l'égalité femmes-hommes

Comment améliorer la condition des femmes dans le monde ? Après une nouvelle année de travaux, le Conseil consultatif pour l’égalité entre les femmes et les hommes a dressé plusieurs pistes. Ce rapport est présenté ce vendredi à Paris au président français, à la veille du sommet du G7 à Biarritz. Deux des membres du Conseil ont répondu aux questions de Terriennes : l’ambassadrice du Canada en France Isabelle Hudon et la présidente de Wowen Deliver, Katja Iversen.
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g7Elysée
Le Conseil consultatif du G7 sur l'égalité des sexes va remettre à l'Elysée ses recommandations pour la promotion de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des filles et des femmes, ainsi qu'un appel à l'action.
 
©Elysée/Twitter
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Dans ce rapport d’une soixantaine de pages, le Conseil recommande aux leaders du G7 d’intervenir sur quatre plans pour améliorer la condition des femmes dans le monde et favoriser l’égalité des sexes : lutter contre les violences faites aux femmes, développer une éducation et assurer des soins de santé de qualité aux femmes, leur offrir du pouvoir économique et leur permettre d’avoir une place identique à celle des hommes dans la sphère publique.

« Comme l’an dernier, il y a d’importantes recommandations sur la sécurité des femmes, l’éducation et tout le pouvoir économique, précise Isabelle Hudon, ambassadrice du Canada en France. J’ai un biais particulier pour le pouvoir économique des femmes parce que leur autonomie est importante, il faut leur offrir les moyens de déployer leur ambition. Mais la très grande majorité des conversations que nous avons eues au sein du Conseil, et les recommandations les plus importantes concernent la question des violences faites aux femmes. Cela a été le sujet prioritaire autour de la table ». 

Pour Katja Iversen, présidente de Women deliver et membre du Conseil consultatif pour l'égalité femmes-hommes : « Ce que ce rapport dit aux leaders du G7, c’est 1-Regardez les lois dans vos pays et éliminez les mauvaises, 2- Adoptez des lois progressives qui vont aider à faire l’égalité entre les hommes et les femmes, car tout le monde gagne quand on fait ça, et nous leur donnons 79 lois exemplaires dans ce domaine qui existent déjà dans le monde. 3- Vous devez investir dans les organismes et les organisations qui militent en faveur de l’égalité entre les sexes et 4- Vous devez mesurer et évaluer vos actes, et traduire vos paroles en actes, nous ne nous contenterons pas de promesses ».
 

Du concret sur la table

La spécificité de ce rapport, c’est que pour chacun de ces quatre thèmes abordés, il présente des cas concrets de lois et de programmes montrés en exemple aux leaders du G7.

Je suis assez fière de voir que le Canada est cité en exemple pour certaines lois qui ont livré des résultats probants.
Isabelle Hudon, ambassadrice du Canada en France
isabelle hudon
Isabelle Hudon, ambassadrice du Canada en France, lors du G7 femmes en mai 2019 à Paris.
©IM

« Moi ce que j’ai beaucoup aimé cette année, explique Isabelle Hudon, c’est que l’on s’est penché sur des mesures déjà en place qui livrent des résultats et qui devraient influencer d’autres pays. C’est très concret. Je suis assez fière de voir que le Canada est cité en exemple pour certaines lois qui ont livré des résultats probants. Et à travers cette recherche, on peut voir qu’il y a plein de pays dans le monde qui ont eu de la créativité, ce qui donne à réfléchir sur des actions. Toute cette dynamique d’aller avec des exemples concrets nous a été conseillée par le président Macron et c’est ce qui nous a permis d’écrire un rapport différent de celui de l’an dernier. On avait fait beaucoup de débroussaillage avec notre rapport de 2018, il fallait continuer à avancer et aller un peu ailleurs et ça on a réussi à le faire. Les deux rapports sont vraiment complémentaires ».
 

« Violence, éducation et santé, pouvoir économique et augmentation de l’influence des femmes dans la vie publique : pour chacun de ces quatre thèmes, nous avons identifié des lois et des programmes qui existent déjà dans le monde, au total, 79 lois inspirantes venues de partout. Nous espérons que cela va inspirer les leaders du G7 et des autres pays qui seront présents à Biarritz. Mais cela va aller plus loin encore, notre ambition, c’est que ce document que nous présentons vive au-delà de ce sommet » déclare Katja Iversen.

Imputabilité

Le rapport insiste également sur une notion importante : celle de l’imputabilité. Autrement dit, ce que le Conseil dit aux leaders du G7 c’est : attention, nous allons regarder de près pour vérifier si vous allez suivre nos recommandations. Le rapport présente une sorte de cadre pour permettre aux pays de prouver qu’ils sont passés de la parole aux actes.

Nous voulons les aider à mettre en application des mesures pour atteindre nos objectifs. Alors oui, nous allons garder un œil sur eux !
Katja Iversen, Présidente Women Deliver

« Nous avons défini une grille d’évaluation facile et rapide à remplir pour qu’ils évaluent leurs actions, nous voulons les aider à mettre en application des mesures pour atteindre nos objectifs. Alors oui, nous allons garder un œil sur eux… », explique Katja Iversen.

Isabelle Hudon de son côté se dit très curieuse de voir comment cette question d’imputabilité va être accueillie à Biarritz : « Je ne sais pas comment les leaders vont réagir à cet élément d’imputabilité, se doter d’outils pour démontrer les progrès année après année, pour prouver que les résultats sont au rendez-vous. Je pense qu’il n’y aura pas un consensus des sept pays à ce niveau-là, j’avoue être curieuse de voir comment ça va se passer. Je suis convaincue qu’ils vont accueillir positivement le bouquet législatif de notre rapport, les 79 mesures que nous avons identifiées, mais je ne sais pas comment ils vont réagir à cette obligation de rendre des comptes qu’on leur demande ».
 

Et après ?

Quid de ce Conseil consultatif pour l’égalité entre les femmes et les hommes après ce sommet de Biarritz ? Mis en place l’an dernier par le premier ministre canadien Justin Trudeau pour le sommet du G7 de Charlevoix, au Canada, et reconduit par Emmanuel Macron pour cette rencontre à Biarritz, les États-Unis vont-ils eux aussi maintenir l’existence de ce Conseil pour le sommet qui se tiendra chez eux l’an prochain ?

« Je ne sais pas si les Américains vont emboîter le pas, reconnait Isabelle Hudon. Ils croient beaucoup au pouvoir économique des femmes, ils vont peut-être décider d’axer le travail sur cette question, mais vraiment, on est dans l’inconnu. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas lâcher. L’autre jour dans une conférence, j’ai entendu quelqu’un dire que ça peut prendre des années, voire des dizaines d’années pour grimper des marches, mais il suffit de deux minutes pour le dégringoler cet escalier. Si on délaisse cette tension, on va retourner dans nos biais inconscients et cette zone de confort qui est celle des choses qui se font comme hier et avant-hier. Et ça, ce n’est pas possible. Le Conseil peut vivre autrement, il faut continuer à mobiliser ces experts et expertes, ces passionné-es pour faire avancer le dossier ». 
 

C’est formidable de voir comment la question de l’égalité entre les hommes et les femmes se retrouve maintenant dans les agendas des grandes réunions de pays dans le monde !
Katja Iversen

Katja Iversen est tout aussi motivée à poursuivre cette aventure du Conseil, sous sa forme actuelle ou sous une autre : « C’est formidable de voir comment la question de l’égalité entre les hommes et les femmes se retrouve maintenant dans les agendas des grandes réunions de pays dans le monde et qu’elle s’impose maintenant dans les discussions des puissants de ce monde. Mais cela ne doit pas s’arrêter là, cela va continuer. L’an prochain, on va fêter les 25 ans de la déclaration de Pékin sur les femmes et il va y avoir plusieurs rencontres partout dans le monde et nous serons mobilisées. Cela ne va pas s’arrêter ici, c’est un mouvement qui va se poursuivre pour les femmes et les jeunes filles dans le monde et pour tout le monde. Nous allons poursuivre le travail ».